Narcos: Rise of the Cartels
Contrairement à mon estimé collègue j’avais beaucoup apprécié Phantom Doctrine, son ambiance, son gameplay à contre-courant où il fallait se faufiler plus que combattre ou miser sur des coups mortels. Bref lorsque Narcos: Rise of the Cartels fut annoncé, j’étais assez impatient. Alors certes ce ne sont pas les mêmes développeurs mais le tout avait un fameux air familier. Air familier qui sera de toute façon présent vu que le jeu est basé sur la série Netflix à succès, même si j’ai bien compris la collaboration s’est faite ici entre Gaumont et le studio de devs.
Certains éléments (musique d’intro, voix de certains personnages) sortent tout droit de la série et mettent directement dans l’ambiance. Le jeu propose deux campagnes, une du côté de la DEA, l’autre des Narco trafiquants, même s’il vous faudra jouer la première mission de la DEA avant de pouvoir débloquer la seconde campagne.
Malgré un budget limité, les devs ont réussi à offrir des maps détaillées, des animations de personnages assez réussies, une caméra qui est rarement dans le chemin et même quelques nouveautés comme la possibilité de sauter au dessus de certaines obstacles (pas juste les clôtures mais aussi des espaces entre les toits) et un système de contre qui donne au joueur une fenêtre d’action où il peut viser l’ennemi lui même.
Le contenu est lui aussi tout à faire acceptable, chaque « chapitre » demandant au joueur de d’abord jouer certaines missions secondaires aléatoires avant de jouer la mission principale. Celles-ci ont un intérêt moindre vu qu’elles ne sont pas scénarisées et réutilisent souvent des cartes déjà vues (avec parfois avec une zone d’insertion différente) mais elles ont le mérite d’exister.
Bref, à première vue ce Narcos: Rise of the Cartels a tout pour plaire aux amateur de turn-based tactics et ses défauts semblent secondaires. Les cutscenes, si elles sont détaillées, restent un peu datées dans leur exécution, les personnages que l’ont peut recruter manquent cruellement de charisme et de variété mais, car il y a un mais, vous aurez remarqué que je n’ai pas encore parlé du gameplay…
Là où Phantom Doctrine s’était planté en permettant aux personnages de faire un pas de côté pour se prendre une balle lorsqu’ils étaient derrière une protection, chez Kuju ils ont bien fait attention de ne pas faire cette erreur là. Non non, si vous êtes sur le côté d’une porte vous ne pourrez pas tenter de tirer à l’intérieur sans vous mettre à découvert. Seulement voilà, ils ont décidé d’un autre système dont ils n’ont, je pense, pas bien mesuré les conséquences.
En effet, le jeu est au tour par tour mais ne vous permettra de n’utiliser qu’un seul personnage par tour. Alors ça parait anodin, on se dit qu’on pourra juste en bouger l’un après l’autre et que ça donnera une expérience plus intense avec une IA qui aura plus d’occasions de réagir à vos actions, sauf que pas du tout. Un seul personnage par tour veut dire que si vous le placez à un endroit pour tirer, il faudra ensuite utiliser le tour suivant pour le mettre à l’abri, si un personnage est blessé ou n’a plus de munitions, il faudra passer un tour pour recharger ou se soigner…
D’ailleurs c’est exactement ce que l’IA fait, si elle voit qu’elle peut venir vous attaquer, elle vient se placer à découvert, vous tire dessus, se prend une rafale en retour, tire à nouveau et puis s’en va clopin-clopant se mettre à l’abri. Alors certes ça peut être efficace parfois, si vous n’avez pas d’endroit où vous mettre à l’abri, d’éliminer l’ennemi avant qu’il tire à nouveau ou n’essaie de se soigner, mais vous devez être capable de bouffer deux rafales de suite. Niveau subtilité ou tactique, on repassera.
Outre l’impact sur le côté tactique et le challenge offert par l’IA, ce système en aura un autre : celui de vous « forcer » à n’utiliser qu’un (ou deux grand max) personnages pour les missions dont le nombre de tours est limité et à passer des tours à ne rien faire (enfin si se soigner, recharger) quand ce n’est pas le cas.
Déjà parce que l’IA est assez passive à distance et qu’elle ne peut pas se coordonner avec ce système mais aussi parce que si vous terminez une mission avec des unités blessées, il leur faudra du temps (ou de l’argent) pour les soigner, alors qu’il suffit d’un tour de repos pour récupérer un point de vie pendant la partie…
Ce choix de design casse le tempo et handicape fortement un titre qui aurait pu être assez bon (avec un peu plus de profondeur et de choix au niveau des personnages et de leurs compétences aussi). Certes ce n’est pas le seul défaut du titre (pourquoi je ne peux pas lancer de grenades à l’intérieur, hein !?) mais la plupart des joueurs auraient probablement pu pardonner ceux-ci plus facilement.
Comme quoi parfois ça ne tient pas à grand chose. Après ça n’enlève pas le mérite de proposer un setting différent avec des environnements variés et assez détaillés, une bonne atmosphère, un système de contre (une sorte d’overwatch toujours présent) très sympathique et un jeu somme toute agréable à petites doses. Mais voilà, il manque ce petit quelque chose qui va accrocher le joueur, lui donner envie d’enchaîner les missions. Ici on aura plutôt tendance à faire une pause après la énième mission secondaire et la troisième fois qu’on engage un Rodrigo en short.
Narcos: Rise of the Cartels aurait pu être un bon jeu et avec un bon suivi ses défauts mineurs auraient même pu être réglés. Mais avec cet élément central de gameplay complètement bancal et les devs étant assez discrets, je ne peux vraiment pas le conseiller à prix plein. En solde pourquoi pas si vous savez dans quoi vous vous engagez.
Développeur : Kuju Ltd
Editeur : Curve Digital
Genre: Turn-based Tactics
Prix : 29,99
Date de parution : 19/10/2019