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Zool Redimensioned

Mon rédac chef, qui me gâte, semble décidément penser que seuls les titres datant de plus de 20 ans sont susceptibles de m’intéresser. C’est donc avec une joie infinie que j’ai trouvé dans ma besace Zool Redimensioned, une version reliftée de Zool, ancien jeu de plate-forme qui a fait la gloire de cette machine maléfique qu’on appelle l’Amiga (ne faites surtout pas de recherches. Quand vous contemplez l’abîme, c’est lui qui revient vous emmerder avec une version mini collector et une fausse souris).

La machine du démon, version miniature

Pour ceux qui l’ignorent, Zool est une tentative signée par l’éditeur Gremlin Graphics (rappelez-vous, Lotus Esprit Turbo Challenge, c’était eux ! Enfin, surtout Magnetic Fields mais ne pinaillons pas.) de créer une mascotte sur micro-ordinateur, capable de rivaliser avec celles qui triomphaient alors sur les consoles de salon, à l’image de Sonic ou de Mario (là, si vous êtes obligés de faire une recherche, je crains que vous vous ne vous soyez plantés de site).

Ce truc jaune est en réalité une cymbale. Et oui, elle veut me faire la peau.

Un peu comme Electronic Arts avec son Robocod (vous êtes libres d’admirer le jeu de mots), le développeur semble faire une fixette sur les bonbons et autres friandises.

Une fois passé l’intro quasi-inexistante qui vous raconte que… bla bla bla… vous vous êtes écrasé sur une planète inconnue… Zzzz… et qu’il est désormais nécessaire, pour vous échapper de ce bourg pourri, de retrouver les pièces de votre vaisseau (oui, ça pourrait être très exactement le résumé de Toe jam & Earl sur Sega Megadrive) et qui franchement ne présente pas le moindre intérêt, vous vous retrouvez lâché dans un niveau constitué de sucres d’orge, de bonbons et d’adversaires en forme de gelée comme seuls les anglais sont capables d’en ingurgiter (attention, les enfants, n’essayez surtout pas ça à la maison).

Pas de doute, ce blob est contagieux. Je vais donc l’exterminer pour son bien.

Passé le choc visuel causé par tous ces gros pixels et ces couleurs sorties tout droit des enfers, un constat s’impose : le jeu transpire par toutes les pores le début des années 90 (plus précisément, l’année 1992, mais ça devient tout de suite plus pointu comme pronostic).

Il s’agit, tout comme Sonic ou Super Mario et la bonne centaine de jeux que j’aurais pu citer si je n’avais pas eu la flemme de vous éblouir, d’un classique jeu de plate-forme découpé en plusieurs sous-niveaux ponctués de checkpoints et qui se concluent invariablement par un affrontement avec un boss plus ou moins retord.

La ligne d’arrivée est proche.

En gros, chaque monde est scindé en 4 sous-niveaux et le dernier d’entre eux vous oblige à défier un adversaire nettement plus costaud (avec une tête improbable) que la moyenne. Oui, exactement comme le premier Wonderboy ou Sonic The Hedgehog. Plus proche de l’esprit irrévérencieux de Sonic que de la force tranquille du bedonnant moustachu de Nintendo, Zool mise tout sur la vitesse de son personnage principal et l’action ininterrompue.

Contrairement à d’autres mascottes du genre, Zool ne se contente pas de sauter sur ses adversaire pour les éliminer et dispose d’un pistolet dont les munitions sont illimitées. Autant vous dire que vous allez en abuser. Zool pas réfléchir, Zool buter tout le monde.

Ahhh crève, pourriture !

Visuellement, le jeu trahit ses origines micro-ordinateur avec un visuel, qu’il s’agisse des personnages ou des décors, qui évoque bien plus les classiques de l’Amiga et de l’Atari ST(E) que ses homologues nippons qui évoluent alors sur la Super Nintendo ou la Megadrive de SEGA.

Mais tu vas crever, hein ?

Nous sommes donc plus proche de Titus the Fox, également connu sous le nom improbable de « Lagaf’: Les Aventures de Moktar — Vol 1 : La Zoubida » (mais on me dit dans l’oreillette que ce titre a été cancelled), Fire & Ice, The Seven Gates of Jambala ou encore des Blues Brothers que de Parasol stars, the New Zealand story, Marvel Land ou The Looney Toons.

Le deuxième niveau, consacré à la technologie de pointe, comprendre les télécommandes, les câbles micro-informatique et les CD (vous ai-je dit que le jeu fêtait ses 30 ans ?) rappellera aux plus vieux et aux plus nostalgiques les merveilleuses captures d’écran qu’on pouvait trouver sur un magazine comme Gen 4.

Une certaine idée de la modernité.

Autant vous dire qu’en 2023, tout ceci sent assez fortement la naphtaline. La question, finalement assez opportune, est de savoir si un tel titre a toujours sa place dans nos ludothèques déjà gavées jusqu’à la moelle. Étrangement et sous réserve que vous ne soyez pas trop réfractaires au retrogaming, la réponse est assez positive.

Alors que je m’apprêtais à dézinguer le jeu comme certains rédacteurs malveillants qui rodent dans le coin, je me suis surpris à apprécier ce feeling purement old school et le dynamisme du jeu.

Tout va ici vite, très vite. Zool tire sur ses ennemis, esquive, glisse, dérape, saute quand il ne double saute pas (oui, cette formulation est effectivement assez laide), et franchit à la vitesse du son les différents sous-niveaux à la recherche des précieux bonus.

Car, la ligne d’arrivée n’est pas réellement l’objectif… Ou alors seulement pour les noobs.

Bon, c’est le début du jeu mais j’ai assuré !

La substantifique moelle du jeu, c’est la recherche quasi obsessionnelle des bonus plus ou moins cachés et l’obtention du meilleur score. Non seulement les niveaux sont jonchés de bonus mais ils comprennent également 3 bonus géants plus ou moins bien planqués qu’il faudra débusquer pour obtenir le meilleur score.

Véritable allégorie du capitalisme et ode à la boulimie, Zool en veut toujours plus et se gave de dizaines et de dizaines de bonus au fur et à mesure des niveaux, ne s’arrêtant guère que pour dézinguer les gros affreux – brièvement – promus boss de chacun des sept grands niveaux thématiques qui composent le jeu.

Des fruits et des légumes : les ennemis jurés des enfants !

D’un point de vue technique, ce Zool Redimensioned est propre. Encore heureux vu qu’on parle d’un relooking d’un jeu de 1992. Côté positif, le jeu ne pèse que 79 Mo dans sa version Steam et tourne très bien sur le Steam deck de Valve. La re-jouabilité du jeu viendra essentiellement de l’envie d’améliorer encore et toujours son score et de récupérer toutes ces saletés de bonus. Retrogaming 101 !

Côté bonus et en dehors d’un point spécifique qu’on a abordera plus bas, les gens de chez SecretMode et de Sumo Digital (encore eux) ne se sont pas trop foulés.

On a déjà vu mieux sur les ressorties retrogaming, nous sommes bien d’accord.

En dehors du choix des scanlines (on ou off, oubliez toutes autres fioritures), d’une encyclopédie famélique, d’un party game local (j’ai honte, je suis un escroc, je ne l’ai même pas essayé) et de la présence d’une émulation de la version d’origine (ou presque puisque les développeurs se sont, assez ironiquement, basés sur la version Megadrive du jeu) circulez, y’a rien à voir.

Ah, j’oubliais l’intégration de cheat codes. Un conseil, oubliez également leur existence.

Vous voyez, je ne vous ai pas menti…

Là où cette version fait vraiment la différence, en dehors des graphismes retravaillés mais toujours vieillots, c’est sur la spécificité Redimensioned qui lui donne son nom.

Un des points noirs de la version d’origine (en dehors du fait d’être sortie sur Amiga bien entendu) était que la caméra était trop rapprochée du personnage principal et que celui-ci allait trop vite, combo fatal s’il en est.

La version Megadrive en action. Notez la caméra TRES rapprochée.

Du coup, ça ne ratait pas, le joueur se prenait les ennemis et les pièges en travers de la tronche, faute de pouvoir anticiper suffisamment à l’avance.

Oui, l’inspiration des développeurs devient de plus en plus étrange au fur et à mesure des niveaux.

Un peu comme un type qui conduirait en regardant juste l’avant de son capot et irait s’encastrer dans un arbre dès le premier tournant.

Cette nouvelle version a l’excellente idée d’éloigner la caméra, ce qui ne nuit pas à l’action, toujours frénétique, mais améliore considérablement la lisibilité du jeu.

Le développeur, qui a manifestement anticipé la volée de bois vert qu’allaient lui réserver les puristes, a également prévu un mode « Wide 1992 » qui, comme son nom le laisse présumer, permet de jouer à cette nouvelle version avec l’angle de vue réduit de l’original.

Quelque chose me dit que les joueurs qui opteront durablement pour ce mode seront assez largement minoritaires (et masochistes). Autre nouveauté, l’apparition d’un double saut qui fera s’interroger sur le fait que l’original en ait été dépourvu.

A l’arrivée, Zool Redimensioned est un solide remaster d’un vieux jeu dont nombre de qualités restent à peu près intactes malgré les 30 ans qui nous séparent de sa sortie initiale. Pourvu que ça ne leur donne pas envie de remasteriser Cool Spot.

Au prix auquel le jeu est vendu (7.99 €), je ne peux qu’inviter les nostalgiques et les curieux à y jeter un œil.

Genre : jeu de plateforme

Développeur : Sumo Digital Academy

Editeur : Secret Mode

Prix : 7.99 €

Date de sortie : 18 Aug, 2021

Testé sur une version presse fournie par l’éditeur

Baalim

Vieux joueur, atariste convaincu, collectionneur de trucs bizarres et hétéroclites, geek à ses heures perdues, pratiquement certain de n’avoir rien signé et de ne pas être payé, il se demande encore ce qu’il fait là.