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Fight’N Rage

Fight’N Rage est un jeu indépendant sorti initialement en 2017 sur PC dont une des principales caractéristiques est d’avoir été quasiment réalisé par une seule et même personne, l’espagnol Sebastián García (à l’exception notable de la musique très typée heavy metal).

Quand on voit le résultat, on ne peut que saluer le travail abattu par ce développeur espagnol qui signe là une des meilleures (et hélas plus méconnues) adaptations modernes du beat them up à l’ancienne dont Final Fight (Capcom, Arcade et pratiquement toutes les machines au monde depuis la SNES) et Streets of Rage (Sega, Megadrive).

En effet, sous les gros pixels bien rétros, l’écran  baveux et le look très 80’s des personnages du jeu, on se rend vite compte que le développeur a absolument tout compris à ce qui faisait le sel des jeux de baston qui furent les rois des salles d’arcade du milieu des années 80 jusqu’à la première moitié des années 90 à l’image des classique Double dragon (Technos Japan), Teenage Mutant Ninja Turtles, Vendetta (Konami), Undercover Cops (Irem), Arabian Fight (Sega), Growl (Taito) ou encore Knights of the round table (Capcom) pour n’en citer que quelques-uns.

Comme tous ses homologues récents (au hasard, les récents remakes de Streets of Rage et de TMNT pour ne citer que les meilleurs) Fight’N Rage ne s’embarrasse pas d’un quelconque scénario pour justifier le tabassage de tous les loubards qui vont avoir le malheur se dresser sur le passage de notre irascible trio.

Oui, c’est le bazar

Car oui, le développeur a eu l’excellente idée de proposer de lancer une partie à trois joueurs et en local. Sortez les bières et les pizzas (sauf pour les mineurs, même anglais, et rappelez-vous que l’abus d’alcool est mauvais pour la santé). Pour faire bref (parce qu’en vrai, on s’en fout tous un peu) dans un monde où cohabitent plus ou moins aisément les humains, classe dominante, et les humanoïdes mi-bêtes mi-hommes, prolétariat, un groupe décide de se dresser contre l’injustice et….

Ah non, on me glisse dans l’oreillette qu’il s’agit des méchants et qu’on jouera en réalité la jeune humaine dénudée qui va leur dessouder la tronche, histoire de leur rappeler qu’on ne bouscule pas les rapports de classes comme des malpropres (pour ça, on se fait élire, on siège et on ne gueule pas comme un veau sur les marches de l’assemblée… Mais je crois que je m’égare).

Enfin, c’est ce qu’il m’a semblé comprendre entre quelques distributions de baffes. On ne va pas se mentir, on ne joue pas à un beat them up pour son scénario. Au mieux, on le subit.

Ce sera plutôt pour les dents qui volent, les baffes qui se perdent et les loubards qui terminent dans le décor que vous lancerez le jeu, seul ou, idéalement, en compagnie de deux Charles Bronson en herbe.

Qui n’en veut du costume bonus ?

Car une des grandes forces du jeu (oui, je radote mais c’est un des privilèges des boomers), c’est qu’il est effectivement jouable intégralement à trois joueurs affalés sur un même canapé, à l’image des vieux Turtle Mutant Ninja Turtle (quoique là, il me semble qu’il y avait quatre tortues), ce qui rend tout de suite l’expérience plus conviviale, à l’image de l’excellent remake de Street of Rage sorti chez Dotemu.

Tout comme dans ce dernier, les joueurs auront la possibilité de désactiver ou non les collisions entre eux et les dommages collatéraux. Vu le bordel à l’écran, les reproches et/ou insultes risquent de pleuvoir si vous laissez l’option activée.

Streets of Rage 4 de Lizardcube, probablement la nouvelle référence du genre

En effet, l’écran, bien baveux pour imiter le rendu d’un ancien tube cathodique (ce qui est désactivable mais ça serait dommage), affiche très régulièrement des tonnes d’adversaires de toutes tailles et formes allant du cochon humanoïde à la dominatrice à fouet en passant par l’homme croco (au chômage depuis la mort d’Amstrad) et le hérisson relou (une constante dans les jeux vidéo).

Autant vous dire qu’il est parfois difficile de savoir précisément qui l’on tape, si tant est qu’on frappe réellement quelqu’un dans cette joyeuse foire d’empoigne.

Certaines options et bon nombre de costumes sont à débloquer

A ce stade du test, vous vous demandez très vraisemblablement ce qui distingue le jeu des multiples beat them up (voir beat them all pour les fans de JM Destroy) sortis ces dernières années.

La grande force de Fight’N Rage tient au fait que son développeur est étrangement un des seuls qui ait bien compris le côté viscéral de l’expérience que pouvait provoquer ce type de jeux et réussi à la reproduire quelques décennies plus tard alors que les mécaniques de jeu ont quand même été grandement améliorées, tous types confondus, rendant désormais le genre un peu désuet.

Au chômage, il se reconvertit dans le banditisme

Le gameplay reste assez classique et proche de celui de Final Fight. Un bouton pour les coups, un bouton pour les sauts, un bouton pour les coups spéciaux qui vous feront perdre une partie de la jauge de puissance (qui se remplit à coup de bourres pif ou, lorsqu’elle est complètement vide, de votre vie (ce qui est tout de suite plus problématique).

Comme on peut s’y attendre quand on a joué à Golden Axe (Sega) notamment, une double pression vers l’avant permet à votre personnage de courir et de terminer sa course… en général dans la tronche d’un adversaire.

Évidemment, il est tout à fait possible, comme dans tout bon émule de Streets of Rage, Final Fight ou de The Combatribes (Technos Japan), d’agripper un adversaire pour le rouer de coups (le juste courroux) ou l’envoyer valser dans le décor (le ménage de printemps).

Ajoutez enfin des possibilités de rétablissement durant une projection et des contres et vous disposez de toute panoplie nécessaire à la réinsertion accélérée des loubards que vous croiserez.

Toute référence a une personne existant ou ayant existé serait parfaitement fortuite

Encore une fois, Fight’N Rage n’invente rien mais recycle à la perfection les mécanismes anciens les plus éprouvés. Bref, il n’invente pas la roue mais passe consciencieusement un coup de polish sur la jante. Alors, must have ?

À vrai dire, la tonalité générale du test aurait probablement été très différente s’il avait été rédigé à la sortie du jeu sur PC.

Souvenirs, souvenirs

A sa sortie, Fight’N Rage faisait figure de petit miracle.

Venu de nulle part, il offrait la possibilité de retrouver les sensations des beat them up d’époque (et les odeurs de tabac froid et de sueur des salles d’arcade) quand ses contemporains, à l’exception de Mother Russia bleeds, singeaient la formule sans feeling et sans aboutir à autre chose que des bâillements.

Ricardo est le type subtil du casting

Oui, un peu comme une série générique sur un site de streaming. Tous les ingrédients sont là mais le dosage fait que le résultat est insipide.

Aujourd’hui, Fight’N Rage reste une expérience gratifiante et viscérale mais les sorties récentes des très bons Streets of Rage 4 (Lizardcube, cocorico !) et TMNT Shredder’s Revenge (et, soyons fous, du reboot du Battletoads de Rare) lui ont un peu fait perdre son caractère d’exception.

Pendant ce temps là, du coté de Manhattan…

Cela dit, ne vous y trompez pas, ça reste un excellent représentant du genre et vous auriez bien tort de vous en priver si vous aviez un peu d’affinité avec ce style qui, il faut bien le reconnaître, s’avère tout de même un brin bourrin et répétitif.

Genre : Beat Them up

Développeur / Editeur : sebagamesdev

Date de sortie : 1er mars 2023

Plateformes : PS5 / Xbox Series

Testé sur une version presse fournie par l’éditeur

Baalim

Vieux joueur, atariste convaincu, collectionneur de trucs bizarres et hétéroclites, geek à ses heures perdues, pratiquement certain de n’avoir rien signé et de ne pas être payé, il se demande encore ce qu’il fait là.