Wild: Serengeti
J’ai le plaisir de vous présenter Wild Serengeti, un jeu issu d’un financement participatif lancé sur Kickstarter durant l’été 2021 par Bad Comet avec une promesse de livraison en Juillet 2022. La promesse fut tenue, les backers ayant reçu leur pledge durant cet été.
Vous êtes reporter animalier en plein safari dans le magnifique parc national de Serengeti en Tanzanie (pour la bande de cancres au fond de la classe c’est en Afrique). Votre objectif est de réaliser les plus beaux reportages et photos en respectant des scènes imposées selon des critères de placement, de terrain ou d’adjacence (à priori le mot existe bien dans le dico), le gagnant étant le joueur ayant cumulé le plus de points de victoire sur la piste de score.
On en reparle dans la partie gameplay mais le jeu mélange de manière assez maligne des éléments de puzzle et de construction de moteur (sans jamais aller dans la complexité d’un IAWW pour ne citer que lui).
Wild: Serengeti est très beau, vraiment. En tout cas si vous aimez les jeux ayant pour thème le monde animalier vous allez être servi.
Entre les animaux en bois imprimés, la thématisation du jeu en général, le décor du plateau double, oui c’est très beau et ca sent la savane (et pas le savane de Papy Brossard).
Mais tout ça prend assez vite de la place sur la table.
Les cartes sont de bonne qualité, elles sont subjectivement très belles et participent à l’ambiance générale. L’iconographie est très claire même si les récompenses affichées dans le cartouche en bas de chaque carte mériteraient d’être un peu plus grosses pour une meilleure lisibilité. Mais parlons du truc qui m’a le plus dérangé, ce p**** de rocher millénaire à monter/démonter pour suivre les rounds.
N’est pas Everdell qui veut (déjà dans Everdell, l’arbre était chiant à monter mais il participait de manière plus importante au décorum du jeu) et on a bien compris le rapprochement avec le Roi Lion, son oiseau majordome etc.
Mais le rocher à monter, ils étaient pas obligés… ça s’abîme hyper rapidement, ca n’apporte rien de plus au gameplay qu’une simple piste. J’aurai éventuellement signé pour un petit paysage en carton à la Tang Garden derrière la piste mais là franchement, si c’est beau, cela n’a aucun intérêt et charge inutilement la table. Je suis un gros “deluxifieur” de jeu et j’aime les jeux qui en imposent sur la table, mais là ca prend de la place pour rien.
Pour rester dans les notes « négatives », l’iconographie du plateau pourrait être un peu plus marquée sur les symboles permettant d’identifier le type de terrain.
Dès qu’il y a beaucoup de monde sur plateau, certains animaux sont un peu « perdus » et difficilement identifiables au premier coup d’œil. On a pas mal confondu la hyène et le chacal par exemple en raison de leur taille (et pourtant ils ont pas la même couleur) et le léopard et la gazelle en raison de leur couleur.
On reste quand même sur une vision très positive de l’ensemble, en dehors de l’arbre, c’est une belle production, avec des matériaux de qualité, qui donne envie et flatte la rétine.
Le jeu se déroule sur 4 zones :
- Le plateau représentant la savane avec des cases pour y placer les animaux.
- Le plateau d’actions où vous allez choisir les actions à réaliser.
- Le rocher millénaire pour suivre le round en cours et les événement à actionner.
- La rivière de cartes scène où se trouve également la pioche.
Vous allez donc avoir des scènes à réaliser. Chaque scène possède des contraintes à remplir en plaçant ou déplaçant des animaux sur le plateau de la savane.
Les cases du haut du plateau d’actions permettent d’aller chercher un animal. Celles du bas permettent de déplacer/échanger de place ceux déjà présents dans la savane ou d’aller chercher de nouvelles cartes scène.
Vous devrez placer votre pion sur un des emplacements disponibles sachant que les premiers emplacements coûtent une pièce et les autres deux. Les emplacements les moins chers ne peuvent être occupés que par un pion, les autres par plusieurs. On n’est jamais réellement bloqué dans ce jeu, mais certaines actions peuvent coûter plus cher afin de réaliser notre stratégie.
Le partie se déroule en 6 rounds symbolisés sur le rocher et Zazu vous indique le numéro de l’actuel.
- Sur les rounds 1, 2 et 3 vous ne gagnerez que de l’argent
- Sur les rounds 4, 5 et 6 vous piocherez en plus une carte migration qui viendra « nettoyer » une partie du plateau. Si vous n’avez pas finaliser un combo entre ces rounds, il est probable que vous ragiez un peu.
- Sur les rounds 4 et 6, nous allons avoir un second événement. Nous allons comptabiliser les majorité des animaux indiqués sur les tuiles tirées en début de partie. Le premier gagne deux fois le nombre d’animaux en points de victoire et le deuxième une fois le nombre.
Les conditions de réalisation des scènes sont liées au type de terrain (il y en a 4 : montagne, prairie, forêt et rivière), l’adjacence des animaux (un animal central entouré d’un ou plusieurs autres animaux) ou encore à la création d’une ligne droite de plusieurs animaux dans un certain ordre sans contrainte de proximité (il peut même y avoir d’autre animaux entre eux).
Quand vous remplissez les conditions, à votre tour, vous pouvez valider une carte scène et vous emporterez potentiellement :
- une récompense immédiate de points de victoire, de jetons nourriture ou effets spéciaux signifié dans le cartouche en base de la carte.
- un bonus récurrent à chaque round de jeton nourriture ou effets spéciaux indiqué en haut à droite.
- un ou plusieurs éléments de collection pouvant générer des points pendant ou à la fin de la partie indiqués en haut à droite de la carte.
Les jetons nourriture vous permettent, toujours à votre tour, de déplacer orthogonalement et gratuitement une animal d’une case. Les jetons effets spéciaux vous permettent d’ignorer une condition de terrain sur la carte que vous souhaitez réaliser (vous photoshopez votre image). Les jetons sont cumulables.
A noter que le jeu possède aussi une mécanique de collection qui vous permet d’obtenir des points de différentes manières :
- Les « likes » symbolisés par des cœurs vous permettent d’obtenir des points en fin de partie (sans l’ajout des spécialistes dont je parlerai plus tard, c’est le seul objectif de fin de partie).
- Les « papattes » (symbole animal) comme les appelle ma femme, qui vont vous permettre d’augmenter votre calcul de majorité lors des rounds 4 et 6 (cette stratégie a payé pour ma femme lors de la deuxième partie).
- Les feuilles, fleurs et fruits qui vont sur certaines cartes permettre de générer des points de victoire en fonction du nombre en votre possession (mais un seul type à chaque calcul).
- Les diamants qui sont liés entre eux. Chaque carte ayant un diamant multipliera les points gagnés à chaque carte réalisée.
Pour essayer de résumer, vous allez réaliser des scènes afin d’obtenir des points de victoire ou de collectionner un maximum de symboles identiques pour alimenter un moteur.
C’est donc un jeu de placement léger en apparence mais bien plus velu qu’il n’y paraît d’après sa devanture toute mignonne. Les différentes mécaniques (puzzle solving, engine building et collection) s’entremêlent plutôt bien. c’est très malin avec un thème bien retranscrit.
Peu propice au changement de stratégie en cours de parties (d’ailleurs l’un des conseils dans le livret de règle est de rester focaliser sur une) mais vous pouvez jouer sur plusieurs tableaux en même temps sans trop de problème (et l’un peut potentiellement rattraper l’autre).
Comme vous le voyez ci-dessous, les mains de chaque joueur sont ouvertes. Les autres joueurs peuvent lire les cartes que vous essayez de réaliser. Cela est censé générer de l’interaction et des blocages. Dans les deux parties que nous avons jouées avec madame, au final nous avons surtout eu des « tu m’as déplacé mon animal » ou « tu m’as piqué l’emplacement d’action qui m’intéressait ».
Et honnêtement, vu comment le jeu peut vite devenir touffu, malgré les cartes “migration”, même à plus de 2 joueurs, je ne suis pas sûr qu’on puisse réellement se focaliser sur le blocage d’un joueur. On est bien plus embêté par la limite de 3 animaux de chaque type et donc la recherche d’optimisation permanente de ces placements.
6 rounds à 2 ça va relativement vite (Partie 1 = 1h30, Partie 2 = 1h45), autant qu’un Ark Nova mais pour une charge mentale moindre.
Du fun, beaucoup de fun. On a vraiment aimé et on en redemande.
Si je devais quand même ressortir deux défauts :
- Une invitation au calcul et à la planification importante pouvant rebuter les joueurs qui préfèrent des interactions plus directes, un jeu plus instinctif.
- Un manque d’objectifs de fin de partie en mode simple (uniquement les likes) et je pense que l’ajout des spécialistes qui rend le jeu asymétrique va devenir vite nécessaire.
Je réitère cependant tout le bien que j’en pense et je recommande franchement ce joli jeu animalier très bien produit (sauf le rocher millénaire que je conspue). Il va rester dans la collection !
Le jeu va être renommé “Life of Serengeti” en raison d’une question de droit pour son prochain reprint. Comme vous avez pu le lire un peu plus haut, un manuel traduit en français par Don’t Panic Games (l’éditeur du très bon Cowboy Bebop Space Serenade que je recommande à tout fan de la série) est disponible sur BGG. J’imagine donc qu’il arrivera à leur planning prochainement mais je n’ai pas réussi à trouver de date sur le site.
A noter que l’éditeur Bad Comet a déjà annoncé son prochain Kickstarter qui s’appellera “Life of Amazonia”. Le financement participatif sera lancé le 12 octobre à cette adresse.
Bon y’aura pas de rocher millénaire mais ils ont prévu un truc dans le genre ¯\_(ツ)_/¯
Auteur : Gunho Kim
Artiste : Hani Chang, Sophia Kang
Editeur : Wild Comet
De 1 à 4 joueurs
De 45 à 120 minutes
14 ans et plus