Terra Alia
Je croyais que les jeux d’apprentissage étaient derrière nous. Ces jeux des années 80-90, quand l’industrie ludo-informatique (je crois qu’on disait ça comme ça) tentait d’entrer dans nos foyers aux forceps. Tous les moyens étaient utilisés : vous allez apprendre l’histoire, vous allez apprendre la géographie, vous allez apprendre les maths, vous allez apprendre une langue ! J’avais un peu espéré que ces tentatives foireuses étaient mortes avec la démocratisation du net et qu’enfin les gens avaient compris que ce n’est pas parce que le savoir est présenté sous forme de jeu qu’il en est plus pertinent. Bon ben je me trompais. Voici donc, sorti sur PC en 2021 et ce 11 octobre 2023 sur Switch, Terra Alia – The Language Discovery RPG. Non, je n’ai pas inventé le titre !
Rosa Rosam Rosea
Je vous balance le pitch comme ça, sans transition, parce qu’on s’en fiche totalement : Terra Alia se déroule dans un monde où technologie et magie se mêlent. Vous êtes un jeune diplômé de la grande académie de magie et vous venez rendre visite à votre mentor, le Professeur Espéranto (je n’invente toujours rien). À votre arrivée, coup de théâtre, vous découvrez qu’il a disparu et qu’il vous a laissé un mystérieux message qui vous implique mystérieusement dans tout un tas de mystères mystérieux. Comme la magie est basée sur les langues (oh ben ça tombe bien alors), vous devez apprendre la magie des mots.
Bon, passons ce pitch aussi intéressant qu’un dimanche de pluie et entrons dans le cœur du jeu : l’apprentissage d’une langue. Il vous propose 10 langues : français, anglais, allemand, espagnol, portugais (du Brésil), chinois (simplifié), japonais, coréen, russe et italien. Vous devez choisir la langue que vous maîtrisez le mieux (votre langue natale par exemple), qui sera votre langue de départ, et la langue que vous souhaitez apprendre.
Vous créez votre personnage (enfin, vous modifiez son genre et la couleur de ses habits, on n’est pas non plus dans Baldur’s Gate 3), et vous voici fin prêt pour l’aventure.
La ventura
Enfin pas tout à fait, vous devez récupérer une baguette magique et un artefact dans un coffre et vous voilà prêt pour l’aventure. Ah non pardon, vous devez aussi écouter les explications de l’hologramme magique de votre prof et puis maintenant c’est bon on peut y aller ? Merci !
Donc, après quelques pérégrinations dans le bureau de votre maître et ami, ce qui vous permet d’apprendre vos premiers mots, vous résolvez une énigme et vous arrivez enfin sur le campus. Bon ok c’est un parc avec trois clodos et une cahutte qui sert d’université mais on va faire comme si c’était Poudlard. Les étudiants sont statiques ou font les mêmes gestes en boucle, et ils se ressemblent tous. Craignant pour une invasion de zombies mutants, j’ai tenté de les attaquer, mais en vain, l’interaction étant limitée à quelques personnages importants. Ceux-ci me parlaient effectivement, mais avec les différentes voix des lecteurs d’écran. Niveau immersion cauchemardesque, on est bien.
Ok, j’arrête de me moquer pour aborder le plus gros problème : son aspect technique. Comme le montrent les screenshots, on est sur un titre qui semblait déjà dépassé en 2013. Les textures sont simplistes, les personnages sont mal animés, et même les jeux de lumières ne sont pas convaincants. Même si les éléments de mobilier sont assez clairement identifiables, ce qui est heureux dans un jeu prévu pour vous apporter du vocabulaire, on ne peut vraiment pas dire qu’on en prenne plein les yeux. Il y a évidemment des problèmes de collision et des murs invisibles un peu partout. En résumé, ce n’est pas la joie.
Niveau musique et habillage sonore, c’est également peu pratique. Il y a un canal pour la musique et un pour tout le reste. Du coup, si vous augmentez le son pour comprendre ce que disent les personnages, vous augmentez aussi les effets sonores (dont les bruits de combats magiques) au risque de vous éclater les tympans. Là encore, c’est du service minimum que de séparer les canaux de son dans un jeu vidéo.
Vox Populi
Mais, me direz-vous, l’important n’est-il pas dans l’apprentissage ? Qu’importe la forme si le fond est bon, après tout ? Et vous aurez raison. Car, n’est-on pas là pour apprendre une nouvelle langue ? Et de ce point de vue là Terra Alia tient-il ses promesses ?
J’ai donc testé le jeu avec deux langues à apprendre : l’anglais, que je maîtrise, et le japonais où je suis très grand débutant. J’ai trouvé la progression sympathique dans les deux cas. Mais le jeu ne se repose exclusivement que sur la répétition. De plus, il ne se focalise quasiment que sur le vocabulaire.
Si ce n’est pas gênant pour une langue utilisant un alphabet romain et une structure grammaticale proche de la langue de départ, ça se complique nettement quand il s’agit d’aborder une langue comme le japonais qui n’a rien à voir ni en terme de signes utilisés, ni en terme de constructions des phrases. Il y a, fort heureusement, la lecture en romanji sous chaque mot, mais sans aucune base il me semble terriblement difficile d’avoir une quelconque progression dans la langue.
Toutefois, et malgré mes remarques précédentes, c’est une façon agréable d’acquérir du vocabulaire. Le jeu ne vous servira pas à grand chose d’autre, mais la diversité de ses environnements vous permettra d’enrichir fortement votre petit dictionnaire personnel. Vous ne deviendrez clairement pas un pro de la langue et vous ne pouvez pas compter uniquement sur le titre pour l’apprendre.
Mais si vous avez déjà quelques bases dans une ou plusieurs des dix proposées, alors Terra Alia sera un compagnon sympathique pour faire quelques petites révisions ou vous familiariser avec un champ lexical mis de côté.
Genre : RPG – Langues
Développeur : 30 Parrallel
Editeur : 30 Parrallel
Date de Sortie : 11 oct 2023
Plateforme : Switch
Testé sur une version presse fournie par l’éditeur