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Someday You’ll Return

J’aime bien l’approche qu’ont les studios indépendants des jeux d’horreur. Plutôt que de se baser sur une licence connue, comme c’était le cas pour Blair Witch, ils préfèrent souvent s’inspirer de leur folklore local, ce qui donne des titres comme Through the Woods, basé sur le folklore norvégien ou, plus récemment, sur Someday You’ll Return des Tchèques de CBE Software, dont les jeux sont généralement bien accueillis par la critique (à défaut de devenir des blockbusters).

Après la forêt de Blair Witch et celle de Scandinavie modélisée par Antagonist, place donc aux… forêts tchèques ! Oui bon, a priori le folklore regorge de contes et légendes se passant en forêt, c’est comme ça alors désolé pour les personnes souffrant hylophobie. Et quand on voit celle qu’arpente Daniel, notre héros parti à la recherche de sa fille Stela, il y a de quoi se dire qu’effectivement, il n’y a pas besoin de beaucoup d’efforts pour imaginer le pire. Pourtant elle présente bien cette forêt : de grands espaces explorables, des pistes de randonnée balisées de différentes couleurs, des lieux pittoresques (avec QR code renvoyant sur les sites officiels s’il vous plaît !) détaillés avec d’intéressants panneaux informatifs et des points de vue à couper le souffle.

Bref, de quoi donner envie de prendre un sac à dos et de partir à l’aventure. Sauf si bien entendu, on s’appelle Daniel et qu’on a un passif avec les lieux. Parce que figurez-vous que notre bonhomme, qui doit compter parmi les héros les plus antipathiques qu’ils m’aient été donnés d’incarner, a passé sa jeunesse dans ces bois et s’était bien juré de ne pas y revenir. Manque de bol pour lui, et nos sous-vêtements, c’est là que sa fille a choisi de fuguer. Du moins, c’est ce que tout laisse à penser…

Bôôôô !

Nous voilà donc parti, armé de notre téléphone portable et d’une sacrée dose d’antipathie (les développeurs ont réussi à rendre le personnage détestable de part ses remarques) à l’assaut de ces beaux sentiers forestiers. Mais très vite, ce qui n’était qu’un simple walking simulator prend une tournure horrifique avec l’apparition d’un mystérieux inconnu (affectueusement surnommé la Bête) qui nous pousse dans un précipice au fond duquel une gamine nous parle comme si elle nous connaissait de longue date et nous met en garde. Contre quoi exactement ? Ce qu’il va falloir découvrir tout au long de l’aventure.

Main gauche ou pied droit ?

Mais sachez qu’il vous faudra éviter des monticules de bras vous barrant le passage, le mystérieux inconnu qui vous tue à chaque fois qu’il vous croise et d’autres créatures aussi difformes que pénibles. Oui, je vous balance ça comme ça parce qu’en fait, la partie « horreur » de Someday You’ll Return n’est pas la meilleure. A vrai dire, elle m’a laissé de marbre, me faisant même parfois pousser un petit soupir las. Oui, comme quand belle maman vous parle.

Oh ben dis donc, j’ai très envie d’avancer là !

Tout ça pour dire que je trouve un peu dommage de résumer un jeu avec autant de bonnes idées à un tag Horreur sur sa fiche. D’une part, parce que par rapport à la concurrence et en se basant sur ce seul critère la production de CBE Software ne tient pas la comparaison, et ensuite parce que les développeurs eux-mêmes, suite aux retours de la communauté, ont patché le jeu pour… enlever du contenu. Oui messieurs dames, pas pour en rajouter, mais bien pour enlever certains moments que personne n’appréciait, dont… des phases d’infiltration qui brisaient le rythme. En proposant en parallèle une potion permettant de ne pas être attaqué par les monstres. Cela démontre d’une part que les développeurs sont vraiment à l’écoute et d’autre part que l’intérêt, tel la vérité, est ailleurs. « Mais où donc ? », me demandera le lecteur aussi impatient que notre Flad local devant l’annonce d’un jeu lovecraftien. Si la tentation d’une réponse en trois lettres est forte (et malheureusement impossible à satisfaire, des enfants nous lisent), sachez, cher lecteur, qu’il est dans l’atmosphère et les petites touches originales amoureusement ajoutées par CBE Software.

Bôôôôô ! (bis)

Durant l’exploration de la forêt et des différents sites accessibles, que ce soient un château en ruine, un campement ou une église, vous n’avez rien pour vous guider, mis à part des cartes disposées à côté des sites dignes d’intérêt. A vous donc de repérer quel sentier emprunter grâce à son code couleur et… suivre les marques de cette couleur peintes sur les arbres et autres panneaux. C’est tout couillon mais niveau immersion, c’est parfait. On est loin du « je suis le sentier parce qu’à droite et à gauche de toute manière c’est bloqué » de Blair Witch. Alors certes on peut se perdre, mais cela permet aussi d’arriver à des sites que l’on aurait négligés. Et comme les décors sont superbes, on ne regrette pas le temps perdu.

Bôô euh non, yerk !

D’autre part, Daniel tombe assez vite sur des obstacles dont il va devoir s’affranchir en résolvant de petites énigmes ou en bricolant. Equipé d’outils perfectionnés comme un marteau et un tournevis, il va devoir clouer des planches pour se fabriquer une échelle, déchiffrer des messages codés et bien d’autres choses. Rien de bien difficile mais encore une fois, ce système oblige à bien ratisser les lieux visités et à se poser quelques minutes pour réfléchir. Même les phases d’escalade, où il faut trouver son chemin vers le sommet, sont intéressantes et changent des bêtes QTE habituels. Niveau gameplay, c’est donc du solide malgré une certaine lourdeur de notre héros.

Non ruvon, il n’y a pas CETTE plante là…

Cerise sur le gâteau, Daniel trouve aussi très vite le kit du parfait petit botaniste et des recettes ici et là. Elles indiquent comment, grâce à certaines plantes, confectionner des potions bien utiles qui permettent par exemple de s’affranchir des effets néfastes de certains grigris maléfiques ou de voir le passé. Vous l’aurez compris, il faudra lors de votre balade faire un peu de cueillette pour ramasser les ingrédients nécessaires à la confection de ces potions. Ça n’est encore une fois pas une idée révolutionnaire mais elle est tellement bien intégrée au reste du jeu qu’on prend plaisir à faire des détours pour aller chercher des ingrédients manquants.

Someday You’ll Return, à l’instar de tous les jeux ayant un pied dans le surnaturel, tente tant bien que mal de construire une histoire plausible à laquelle le joueur n’aura pas trop de mal à accrocher. Autant vous dire que les passages dans le monde réel ne posent aucun souci, avec l’apparition de personnes qu’il faudra aider (ou qui vous aideront. Ou pas…), tandis que ceux impliquant des délires hallucinatoires dignes des soirées les plus chargées de notre hippie attitré (t’as vu ruvon, pour une fois je ne t’ai pas cité) sont tellement perchés que je n’avais qu’une hâte : les passer pour découvrir la suite. En me demandant quand même comment Daniel (je vous ai dit qu’il est antipathique ?) digère tout ça avec calme et stoïcisme. Bref, ça n’est pas pour sa composante horreur qu’il faut acheter ce jeu, même si soyons honnêtes, certains moments sont bien flippants.

Exclusif, le journal intime de Flad retrouvé en pleine forêt !

L’expérience globale est donc extrêmement satisfaisante, c’est le moins qu’on puisse dire, mais pas à cause de ce que les développeurs ont mis en avant dans la fiche du jeu. Oubliez l’horreur, prenez Someday You’ll Return pour la formidable aventure (et longue) qu’il vous propose. Explorez cette superbe forêt, résolvez les nombreuses énigmes, cherchez tous les secrets, bricolez-vous une torche pour chasser des araignées et écrasez des racines avant de les faire bouillir. Fermez les yeux sur ces passages un peu téléphonés avec ces monstres peu impressionnants et consacrez-vous à l’essentiel : vous paumer parce que vous n’avez pas tourné à droite au chêne avec la branche tordue, débarquer au bord d’un précipice et prendre douze captures d’écran tellement c’est beau. Comme quoi, c’est pas si mal la forêt !

Genre : Aventure, Indépendant

Développeur : CBE software

Éditeur : CBE software

Date de Parution : 5 Mai 2020

Site Officiel

Testé sur une version presse fournie par l’éditeur

Harvester

Collectionneur compulsif et un peu trop passionné, accumule jeux et livres en essayant d'entraîner un maximum de gens dans ses vices...

2 réflexions sur “Someday You’ll Return

  • Je m’attendais à voir plus de licornes dans le journal intime de Flad.

    • Harvester

      Les lecteurs ne sont pas prêts…

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