Open de Paris des Jeux d’Histoire 2019
Samedi 28 Septembre 2019. Nous sortons du métro, Harvesterette et moi. Je l’embrasse, lui souhaite une bonne promenade et regarde l’édifice imposant qui se dresse devant moi. La bibliothèque Thiers. Je gravis les marches lentement, intimidé à l’idée de me retrouver au milieu de tous ces Grognards. Des mecs capables de couper vos lignes de ravitaillement en moins de deux tours. Car je suis à Paris en ce samedi presque ensoleillé pour assister à mon premier OPJH. L’Open de Paris des Jeux d’Histoire. Le rendez-vous incontournable des wargamers français.
Une fois à l’intérieur, mon appréhension disparaît rapidement : le lieu est bondé, les tables de jeux sont toutes occupées et chaque visage qui lève les yeux sourit au nouvel arrivant. Je prends mon temps et parcours les différentes salles en essayant de mémoriser un maximum de détails. Des tables de Wings of Glory, du wargame Napoléonien, du Memoir ’44, du Heroes of Normandie le Jeu de Cartes… Il y en a pour tous les goûts et, visiblement, tous les âges. Les grands classiques côtoient les prototypes et il y a même des tournois organisés pendant les trois jours : Heroes of Normandie, Twilight Struggle, Advanced Squad Leader et autres Napoléon 1806, impossible de tout faire ou voir. Surtout quand vous rajoutez par-dessus une conférence de Yann Le Bohec sur « l’Armée Romaine, une armée efficace ? » le vendredi et le Dîner des Grognards le samedi. J’avais pour ma part décidé de venir en électron libre et de prendre la température. Grand bien m’en a pris, j’ai pu discuter avec beaucoup de monde et faire de surprenantes rencontres.
Si les stands d’Asynchron, Nuts! Publishing et Taktyka I Strategia (entre autres) offraient une large gamme à prix réduits et très tentants, j’ai réussi à me concentrer sur des objectifs précis : voir le prototype de Successors, pour être sûr d’avoir fait le bon choix en ne le pledgeant pas sur Kickstarter (spoiler alert: non), voir une partie de Hannibal & Hamilcar et surtout essayer de me trouver une petite pépite jouable en solo, ma chère et tendre restant désespérément insensible devant des pions empilés sur un hexagone (et franchement je ne comprends pas pourquoi).
Personne ne s’installant devant Hannibal & Hamilcar, je décide d’aller voir les prototypes et me retrouve devant deux créations originales. La première, Notre Histoire de France, est un mélange entre le Trivial Pursuit et le jeu de l’Oie. Sur une piste divisée en cinq grandes périodes historiques (de l’Antiquité et Moyen-Âge à nos jours), chaque équipe doit répondre à des questions présentées sous la forme de QCM et traitant de sujets variés comme la vie quotidienne, les personnages et lieux marquants… Il y a bien entendu des cases déclenchant des événements particuliers où vos adversaires pourront par exemple reprendre la main, d’autres qui vous seront positifs. Un jeu idéal pour initier des jeunes à l’Histoire ! L’auteur recherchait d’ailleurs un éditeur…
C’est ensuite Louis XI qui m’a été présenté, un jeu de stratégie qui se joue uniquement avec des cartes. Si l’aire de jeu m’a d’abord fait penser à 1750: Britain vs France, le jeu semble bien plus complexe. Si pour le moment le prototype m’a l’air embryonnaire au niveau du design, l’auteur m’ayant confié rechercher des développeurs pour l’aider à finaliser sa création, les règles ont l’air sur la bonne voie, entre volonté de laisser une grande liberté aux joueurs tout en posant quelques garde-fous. Si vous êtes sur Paris et rêvez d’aider au développement du jeu, n’hésitez pas !
Continuant mes pérégrinations dans cet Open de Paris des Jeux d’Histoire, je tombe alors sur ce qui allait être LE moment de mon salon : la découverte de The Lost Valley, de Jacques Rabier, l’homme à l’origine du Lion de Karthoum, un jeu en solitaire. Devant une carte de Diên Biên Phu représentant les différents points d’appui français pendant le célèbre siège ainsi que le cheminement des divisions Viêt Minh tentant de les submerger, le joueur va devoir résister 16 tours pour l’emporter. Pour ce faire, il aura à sa disposition des points d’action qu’il faudra judicieusement affecter à ses troupes. Déplacer des unités, lancer des contre-attaques ou gérer le moral du camp, il y a fort à faire ce qui obligera à des choix déchirants. Le jeu semble difficile, l’équilibre délicat à trouver surtout qu’il y aura des cartes d’événements, favorables ou non, pour chambouler vos plans. Prévu pour le début de l’an prochain et édité par White Dog Games, The Lost Valley attire par son design propre et épuré et ses mécaniques bien huilées. Le réalisme historique (notamment concernant les événements) n’est bien entendu pas en reste, M. Rabier ayant effectué des recherches poussées sur le sujet. Il suffit de le voir parler avec un enthousiasme communicatif de son œuvre pour avoir envie de faire une partie. Ce qui ne devrait d’ailleurs pas tarder pour votre serviteur qui devrait recevoir un prototype sur lequel poser ses sales pattes. A très bientôt pour une présentation plus poussée !
Des étoiles encore plein les yeux, je continue mon tour et me retrouve devant le stand Days of Wonder qui présentait la nouvelle extension du jeu Memoir ’44 : New Flight Plan. Et là, deuxième choc du jour : l’illustre Guy Moquette lui-même, ancien rédac’-chef chez Canard PC et désormais chef de projet chez DoW, attend patiemment une victime pour l’humilier. Inconscient du danger je m’avance avec un grand sourire. Après un moment à prendre des nouvelles, le scélérat me propose alors une partie. Ravi de pouvoir mettre en œuvre mon génie tactique, je m’installe et écoute les explications de règle. « Easy peasy, je lui rentre dedans et je l’étrille comme en ’41 » me dis-je en lançant mes troupes allemandes à l’assaut. Après plusieurs tours, il me fallut me rendre à l’évidence : allant à l’encontre de toutes les règles de bienséance, le bougre n’allait pas me laisser gagner. Pire, il allait essayer de me battre. Et il le fit, profitant d’une chance insolente aux dés devant laquelle mon savoir-faire pourtant loué dans les couloirs de la rédaction (étrangement, uniquement quand je reçois un bon jeu et cherche quelqu’un pour le tester) ne put rien. C’est défait mais ravi de l’avoir revu que je l’ai quitté.
A ma grande surprise, la journée touche à sa fin et il me faut rejoindre ma chère et tendre qui a osé pénétrer dans le bâtiment et qui me cherche. Excité comme un Flad devant une licorne, je lui conte mes aventures et nous repartons, elle m’écoutant patiemment et moi, rêvant déjà à la prochaine édition.
Je me retiens de respirer de jalousie.
C’est pas comme si t’étais invité :p