Jeux vidéoJouer

Nightmare Frames

Je ne sais pas si vous avez remarqué, mais il a fait chaud cet été. Pas l’idéal pour lancer des FPS en 4K avec RTX activé, sauf si on veut tester son détecteur de fumée et la réactivité des pompiers.

Par contre c’était le moment parfait pour lancer un point&click en pixel-art qui tourne sur un PC portable de 2008. Avec son ambiance horrifique pour donner des sueurs froides, Nightmare Frames était le candidat rêvé.

S’il ressemble à un jeu de 1994, l’aventure se passe dans les années 80, ces heures sombres de la musique et des coupes de cheveux. On incarne Alan Goldberg, scénariste à Hollywood. Il pèse dans le game, puisqu’il est l’auteur de nombreux synopsis de films d’horreur tendance slasher, le genre où un groupe d’étudiants débiles et lubriques font des groupes de un pour finir démembrés par un tueur masqué.

Ça paye bien, mais ce qui intéresse Alan, c’est d’écrire des films dramatiques, genre qui lui avait valu une nomination aux Oscars quelques années plus tôt. Depuis, il cherche à convaincre des producteurs de financer un nouveau drama, mais l’étiquette d’auteur d’horreur le suit voire même le précède dans toutes ses interactions à Hollywood.

On débute l’aventure dans un film d’horreur mais une panne d’inspiration empêche Alan d’écrire la fin de cet énième slasher gore et convenu. Il repousse de dépit sa machine à écrire, qu’il refuse de troquer contre son ordinateur qui prend la poussière sous un meuble. Oui, on joue un boomer des années 80.

Alan n’est pas antipathique, mais on le sent pas bien dans ses pompes. Il ne manque ni d’argent ni de succès (on le reconnait même parfois dans la rue), mais il fait la gueule.

Puis il part rendre visite à un ami producteur qui pourrait l’aider, mais en arrivant sur place, on apprend que ce dernier s’est suicidé la veille au soir. Un jeu jovial où il fait bon vivre, donc.

On effleure l’univers d’Hollywood et son glamour factice derrière lequel transpire la mesquinerie au travers de rencontres et de situations trop vite survolées. Si le scénario ne nous épargne pas le côté sombre des personnages de Nightmare Frames, on papillonne bientôt de lieux en lieux en prenant rarement le temps d’approfondir.

Le rythme est progressif : après un démarrage un peu poussif, l’histoire prend de l’ampleur et les ramifications du scénario, bien accompagné par des puzzles cohérents m’ont maintenu devant mon écran (même si avec la chaleur, je n’étais pas très motivé pour bouger).

La banale histoire d’Alan qui cherche un financement pour son projet va s’orienter vers le mystère, avec une secte de hippie qui bascule dans l’extrémisme et autres complots, pour glisser vers le surnaturel et enfin sombrer dans l’horreur indicible, sur les traces d’un personnage maléfique qui sème derrière lui folie, violence et barbarie.

Le troublant succède au sordide, avant que des images dérangeantes tirant vers l’horreur me filent des frissons bienvenus en cette chaleur, mais qui n’ont pas facilité mon sommeil. Faut dire que je suis sensible à certaines représentations de l’horreur, surtout quand je ne m’y attends pas.

On sent que c’est une petite production : absence de doublages, graphismes simples et animations sommaires, mais qui sont compensés par un sens du détail, des énigmes un poil plus ardues que dans la plupart des productions Wadjet Eye et un scénario percutant.

Si je trouve le travail du studio Cloak & Dagger ou d’Octavi Navarro plus subtil dans l’écriture et ses représentations de l’horreur, Nightmare Frames est tout aussi efficace.

Il t’attire avec des petits gâteaux à déguster en charentaises dans le premier tiers de l’aventure, avant de te suspendre sans prévenir aux limites de la folie pour finir dans un cauchemar fiévreux noyé sous quelques litres de sang.

C’est le premier jeu commercial de Postmodern Adventures, studio barcelonais fondé par le dev solo José María Meléndez. Je l’avais découvert avec son point&click gratuit sur Itch.io Billy Masters Was Right qui joue aussi avec les codes du slasher, et je l’ajoute à la liste des créateurs d’horreur en pixel art à suivre pour la qualité des jeux fournis (ceux cités précédemment, mais aussi Wormwood et son excellent Strangeland, et j’en oublie évidemment). Je garde d’ailleurs un œil sur le prochain projet de l’auteur, An English Haunting.

Avec sa mise en route un peu longue, son scénario qui part dans tous les sens sans se perdre et son lot d’horreur psychologique, physique et surnaturelle, Nightmare Frames tient bien au ventre. Cet hommage aux films de genre des années 80 offre une demi-douzaine d’heures de jeu bien construites auquel devraient jouer les amateurs de point&click que l’horreur ne rebute pas.

Genre : Point&click horrifique

Développeur indépendant : Postmodern Adventures

Plateforme : SteamItch.io

Non disponible en français

Prix : 10,99€

Date de sortie : 16 juin 2022

Ruvon

Chaologue pas encore retraité, traître renommé, survivant accompli. Mon domaine, c'est le jeu vidéo, du FPS hardcore au point&click niais, et depuis toujours amoureux du tour-par-tour.