Jeux vidéoJouer

Sky Oceans: Wings for Hire

Il ne me semble pas à avoir déjà autant souffert pour tester un jeu. En principe, un jeu vidéo est appelé à vous divertir, vous donner un échappatoire du monde réel et à tester votre imaginaire. Le problème avec ce Sky Oceans: Wings for Hire, c’est qu’il a testé ma patience et m’a juste donné envie de retourner au boulot. Et plus vite que ça. 

Très honnêtement, j’avais envie de dire du bien de cette petite production indépendante développée par la jeune équipe chilienne Octeto Studio et qui semblait puiser ses inspirations dans l’immense Skies of Arcadia d’Overworks/Sega sorti sur Dreamcast.

Le retour à la réalité fut d’autant plus douloureux qu’il s’agit probablement d’un des jeux qu’il m’a été le plus compliqué de ne pas lâcher en cours de route et de ne pas massacrer allègrement dans une chronique expresse. Voici ce que j’aurais été tenté d’écrire si j’avais fini par balancer ma manette au cours de l’atroce tutorial que propose le jeu.

Même si la suite n’est pas bien brillante, les choses s’améliorent quand même un petit peu au fur et à mesure de l’aventure, ce qui permet de sauver légèrement un jeu et un test qui s’annonçaient tous deux exécrables.

Oui, c’est vide mais c’est un des plus beaux passages que j’ai pu voir…

Avant toute chose, ne faites pas comme moi et refoulez, au plus vite, toute image ou tout souvenir des grandioses Skies of Arkadia (Sega / Overworks), Crimson Skies (Microsoft / Fasa) ou même Starfox (Nintendo / Argonaut Games) en vous lançant cette production indépendante.

Il s’agit ici d’un petit RPG pur jus où les phases en vol, qui semblaient pourtant devoir constituer l’essentiel du jeu, se bornent à de faméliques passages d’exploration. 

Comment ça, j’ai fait exprès de prendre cette capture ?

Inutile donc de rêver à des dogfights puisque les combats se résoudront dans de très classiques phases au tour par tour. Mais reprenons les choses par le commencement. Sans s’énerver.

Vous allez donc incarner, Glenn, un jeune adolescent, futur pilote de l’ile de Floraise (j’avoue, j’ai été me renseigner sur un autre test car j’avais déjà oublié le nom). Sa mère, Agnes, pilote émérite, s’est complètement repliée sur elle-même depuis une mission d’exploration dont elle est rentrée seule, le Pater Familia ayant purement et simplement disparu dans les limbes sans qu’elle ne veuille ou puisse expliquer ce qui s’est réellement passé.

« Arts » est l’option qui vous permet d’utiliser les coups spéciaux qui consomme votre réserve d’AP qui apparait en dessous de chaque personnage

Le jeu commence par un très classique tutoriel au cours duquel vous apprendrez à diriger votre personnage dans le village de Floraise et, c’est là que les choses se corsent, à piloter votre jet. Soyons clairs, cette phase d’introduction aux combats m’a fait hurler. 

Si le jeu proposait, jusque-là, un bilan pas très réjouissant avec des textures ultra sommaires, du clipping et du tearing, un peu partout, des modèles 3D assez moches et des quêtes FedEx sans intérêt (va donc retrouver tes amis, va donc parler au marchand, va donc revoir ta mère pour t’expliquer avec elle, va donc faire 30 allers-retours qui ne servent à rien…. arrrgh), l’apparente difficulté et l’injustice des tous premiers combats m’ont clairement donné envie de tout envoyer balader et d’aller plutôt me pencher sur mes remboursements sécu. C’est dire le degré de fun. 

Saletés d’Allibatross ! Allez pourrir en enfer !

Les combats se déroulant dans les airs et en dogfight (en tout cas dans l’esprit puisqu’on reste sur du tour par tour), notre brave héros et son amie Fio (oui, il y a plusieurs sidekicks plus ou moins transparents) vont donc apprendre à se battre contre des sortes de crocodiles volants, les Allibatross (assez moches, histoire de rester dans le ton).

Jusque là, les choses sont simples et les options basiques (simple, basique. Vous l’avez ?) : vous pouvez tirer, utiliser une action spéciale (« ARTS ») (balle réfrigérante, accélération de mouvement, balle au napalm, soin etc.) qui consomme des points d’aptitude (« AP »), lesquels se reconstituent de tour en tour, utiliser un objet (« Arsenal ») ou encore pratiquer une esquive (« Evade »… sans rire), ce qui aura pour effet de vous rendre provisoirement invulnérable tout en reconstituant votre stock de points d’aptitude. 

En bas à droite, l’ordre de passage lors de chaque tour

Alors, OK, nous sommes dans un tutoriel et nous sommes là pour apprendre. Mais expliquez moi pourquoi ces cons d’alligators volants m’ont explosé à 5 ou 6 reprises et pourquoi nos apprentis pilotes ratent systématiquement leur tir alors que leurs plumitifs adversaires sont, à l’évidence, de redoutables snipers. Bref, vous allez vite apprendre à utiliser les objets de soins et à prier pour que le RNG (Random Number Generator : en gros, le lancer de dés aléatoire) du jeu soit le moins injuste possible. 

Quelque part, ce tutoriel des plus pénibles donnera le ton du reste du jeu avec des combats parfois étonnamment simples et d’autres fois particulièrement ardus, les deux pouvant s’enchaîner sans la moindre once de logique. 

Admirez la cape du personnage au premier plan… ou l’herbe d’ailleurs. Oui, nous sommes bien sur Playstation 5.

Mais le tutoriel de Sky Oceans: Wings for Hire ne s’arrête pas là puisqu’il va également vous apprendre à naviguer dans les airs. Et là, les choses ne sont pas beaucoup plus glorieuses avec des décors, particulièrement sommaires, des courants aériens assez piteusement reproduits et une maniabilité et une caméra qu’on qualifiera très gentiment et poliment de perfectibles.

Alors, comme je le disais, après ce tutoriel durant entre 1 heure et 1 heures 30, je n’avais plus qu’une seule envie : lâcher ma manette et aller détruire scrupuleusement tous les aspects du jeu dans le test que je m’apprêtais à rédiger. Cela dit, ma très grande éthique de travail (et, soyons honnêtes, ma peur bleue du rédac’ chef) m’a convaincu de pousser un peu plus loin l’expérience en espérant que l’histoire allait enfin décoller. Sic.

Textures sommaires, tearing et clipping vous accompagneront fidèlement durant l’aventure

Arrivé à ce quatrième chapitre de Sky Oceans: Wings for Hire, j’en viens à la conclusion que rien n’est vraiment brillant ou palpitant mais que le désastre annoncé se voit quelque peu atténué par la suite avec ce qui semble être, au final, un RPG très très (très ?) moyen. 

Si l’on peut suivre gentiment l’histoire de nos braves et intrépides pilotes en herbe devenus de parfaits résistants suite à l’attaque impromptu de leur village par une guilde maléfique à la recherche d’on ne sait trop quoi, il faut bien reconnaître que tout ceci n’est pas particulièrement palpitant et que le character design n’est pas vraiment de nature à vous inciter à poursuivre l’aventure.

Quand je vous disais que le character design n’était guère somptueux…

J’ai récemment testé le RPG japonais Reynatis dont le character design plutôt chouette permettait de passer outre un certain nombre de lacunes et de carences. Dans le cas présent, c’est absolument l’inverse avec ce qui me semble être un des pires design que j’ai vu (subi ?) depuis longtemps. 

Si les modèles 3D sont particulièrement sommaires avec des textures moches et une modélisation idoine, ce n’est rien à côté des versions 2D des personnages qui sont parmi les plus rebutantes que j’ai pu voir depuis un bon moment. 

Admirez les textures et modélisations

Vous me direz, les goûts, les couleurs, tout ça tout ça.Ok mais là, je suis désolé, c’est quand même très très moche et ça en vient à me déconcentrer pendant les phases de dialogue. 

En définitive, il m’est particulièrement difficile de recommander ce titre à qui que ce soit. Les amoureux de RPG au tour par tour joueront à bien mieux ailleurs, les amateurs esseulés de Crimson Skies ne trouveront rien pour épancher leur soif d’aventure et pourront allègrement s’enfuir à Mach 1, tandis que les joueurs lambda ne découvriront ici que peu de choses qui puissent réellement les intéresser, à défaut de les passionner. 

Sérieusement, c’est pas possible, ce visuel…

Sans être le désastre annoncé, ce Sky Oceans : Wings for Hire est néanmoins un coup dans l’eau et une belle déception qui aura au moins eu le mérite de rappeler aux joueurs l’existence du grandiose Skies of Arcadia sorti naguère sur la dame blanche de Sega. Quelque part, c’est déjà ça. 

Messieurs les éditeurs, faites nous donc plaisir et ressortez une version remasterisée de ce classique. Ou même pas remasterisée d’ailleurs. On en est là. Quant à vous, Octeto Studio, il n’est jamais trop tard pour vous remettre à l’ouvrage et produire quelque chose d’autrement plus stimulant. Mais, par pitié, changez de character designer.

Genre : RPG au tour par tour

Développeur : Octeto Studio

Editeur : PQUBE

Date de sortie : 11 janvier 2024

Testé sur une version presse fournie par l’éditeur


Baalim

Vieux joueur, atariste convaincu, collectionneur de trucs bizarres et hétéroclites, geek à ses heures perdues, pratiquement certain de n’avoir rien signé et de ne pas être payé, il se demande encore ce qu’il fait là.