Architectes du Royaume de l’Ouest
C’est un fait mondialement reconnu : j’aime Shem Phillips d’un amour véritable. Cet homme me comble à chacun de ses jeux, avec des concepts simples mais très bien exploités, une patte graphique très particulière et des composants de qualité. Voilà, c’était mon article sur Architectes du Royaume de l’Ouest, vous pouvez ouvrir un autre onglet et le commander chez votre dealer habituel. Des bisous.
Comment ça vous voulez être convaincus ? Parce que vous ne faites plus confiance aux rédacteurs de Dystopeek peut-être ? Misère, dans quel monde vivons-nous… Architectes du Royaume de l’Ouest démarre donc la deuxième trilogie de Shem Phillips, la première ayant été conclue par Pillards de la Mer du Nord. D’ailleurs, petite parenthèse : il faut vraiment que je vous cause d’Explorateurs de la Mer du Nord (le deuxième jeu de la première trilogie, suivez un peu) un de ces quatre.
Donc, nouvelle trilogie, nouvelle période, nouveaux lieux et nouveaux concepts. Alors que précédemment vous deviez explorer et piller à la tête de votre clan Viking, vous devez maintenant construire une cathédrale et divers bâtiments pour satisfaire votre Roi, dans le Royaume Carolingien de 850. Celui-ci n’est pas trop regardant d’ailleurs et vous laissera bâtir n’importe quoi, de la tour de guet à la scierie en passant par le puits ou l’université. Ce qui compte, c’est que vous mettiez la main à la pâte !
Mais pour construire, et satisfaire votre Suzerain, il va falloir des ressources : bois, argile, marbre, pierre, or et argent bien entendu. Pour les récupérer, il va falloir envoyer vos ouvriers dans divers lieux à travers le Royaume. Et une fois ces ressources acquises, il vous faudra éventuellement embaucher des apprentis pour vous aider. C’est simple, c’est limpide et n’importe qui ayant déjà joué à un eurogame sera immédiatement à l’aise.
Si le concept est classique, la résolution l’est un peu moins. Alors qu’habituellement vous jouez une série définie de tours avec un nombre souvent croissant d’ouvriers, dans Architectes du Royaume de l’Ouest les auteurs ont innové : vous disposez d’un pool d’ouvriers au départ de la partie et jouerez un nombre indéfini de tours. Tout dépendra en fait de votre rapidité à construire, que ce soient les bâtiments ou la cathédrale.
Chaque joueur va donc, à son tour, prendre un ouvrier de son pool et l’envoyer à la carrière pour avoir de la pierre, dans la forêt pour du bois… Le truc est que la quantité de ressources récoltées dépend du nombre d’ouvriers présents sur le lieu. Par exemple, un ouvrier à la mine ramènera 1 bloc d’argile, plus un en bonus plus un par autre ouvrier déjà présent. Plus vous répétez l’action, plus vous récoltez. Mais moins il vous reste d’ouvriers. Il faut donc ne pas être trop gourmand pour ne pas se retrouver démuni, surtout que… vos adversaires peuvent capturer vos ouvriers et les conserver sur leur plateau avant de les envoyer (ou pas !) en prison pour gagner de l’argent.
Le principe de la capture est tout simple : vous capturez en un lieu, tous les ouvriers d’une couleur. Vous comprendrez donc bien vite que vos 10 ouvriers à la carrière, s’ils vous permettent de récolter un maximum, sont aussi une terrible tentation pour vos adversaires. La solution pourrait être de s’étaler partout pour être une proie peu intéressante, mais cela voudra dire que vous ne ramènerez que peu de ressources à chaque action. Optimisation, optimisation !
Vous allez donc principalement récolter des ressources, engager des apprentis (dont le nombre est limité) disposant de bonus et de spécialités différents et choisir des bâtiments à construire (qui nécessitent diverses spécialités d’apprentis en plus des ressources). Et vous apercevoir très vite que vous ne pouvez pas tout faire et que si vous voulez récupérer vos ouvriers pour continuer à jouer, il va falloir les capturer vous-même ou aller les chercher en prison. C’est d’ailleurs assez marrant d’observer les autres et d’estimer à quel moment ils vont commencer à s’intéresser à vos regroupements et à quel moment il vaut mieux être raisonnable et les rapatrier pour éviter des frais supplémentaires.
En plus de tout cela, il y a une notion de Vertu et de malhonnêteté : allez au marché noir, très lucratif, et vous vous retrouverez avec des dettes et une perte de Vertu. Allez à l’Entrepôt Royal pour en regagner en faisant des offrandes. Vous manquez de cash ? Pillez l’Hôtel des Impôts (en acceptez de plomber votre Vertu). C’est un ballet incessant entre pertes et gains, même s’il est possible de s’en sortir sans commettre de délits.
Vous vous demandez maintenant quand se finit la partie, si on peut récupérer ses ouvriers au fur et à mesure. C’est simple : à chaque fois que vous voulez construire un bâtiment, ou avancer le chantier de la cathédrale (j’y reviens bientôt), vous devez placer un ouvrier dans un emplacement libre de la Maison des Corporations. Petit twist : cet ouvrier ne peut pas être récupéré ! C’est donc ce qui fera office de compte-tour, avec un nombre de constructions variant selon le nombre de joueurs (12 à 1 ou 2, 16 à 3…). Il faut donc garder un œil sur ses adversaires, afin de pouvoir construire avant qu’il ne soit trop tard.
J’ai parlé plusieurs fois du chantier de la cathédrale qui est un autre type de construction, qui peut rapporter bien plus qu’un simple bâtiment mais qui s’apparente à une course : il faut en plus de sacrifier un ouvrier, donner un grand nombre de ressources et une carte de bâtiment. On grimpe alors un des 5 niveaux de constructions, sachant que le nombre de places diminue au fur et à mesure qu’on monte en niveau. Les points de victoire pour celui qui arrive tout en haut sont donc conséquents mais en adéquation avec les ouvriers et ressources investis.
Une fois la fin déclenchée, c’est celui ou celle avec le plus de points de victoire qui gagne : bâtiments, chantier de la cathédrale, pouvoirs des bâtiments ou des apprentis, piste de vertu et dettes, tout ceci vous fera grimper – ou descendre.
Architectes du Royaume de l’Ouest est donc un eurogame pur jus, dans lequel chacun va cogiter dans son coin et faire ses choix de développement, mais en gardant quand même un œil sur ses adversaires, pour savoir d’une part si ses ouvriers sont en danger et d’autre part si ceux des autres valent le coup d’être capturés. Il en résulte un jeu très rapide à jouer – on pose un ouvrier sur une case, on fait l’action correspondante – sans temps mort avec un matériel de qualité et une charte graphique bien personnelle (merci The Mico !).
Il n’y aura pas de gros moteurs à points à construire, juste à décider vers quoi s’orienter et s’y tenir tout en pouvant s’adapter aux actions des autres. Cela change agréablement des gros jeux auxquels vous êtes habitués et ça n’est pas plus mal car cela permet de sortir le jeu avec des novices et de jouer 15 minutes après la mise en place. Cette relative simplicité ne doit toutefois pas faire oublier que le jeu est bien plus profond que ce que l’on pourrait penser de prime abord. Et si personne ne veut vous rejoindre, n’ayez crainte : le bot à affronter en solo est redoutable !
Architectes du Royaume de l’Ouest pourrait obtenir un Dystoseal of Approval, il le mérite largement. Mais je serais alors embêté pour juger Paladins et Vicomtes du Royaume de l’Ouest, les deux opus suivants. Je vais donc me contenter de vous dire que si vous cherchez un eurogame qui plaira aux débutants comme aux experts, ne cherchez plus !
Et si d’aventure vous vous lassiez du jeu de base, sachez qu’une première extension, l’Age des Artisans, est déjà disponible et qu’une deuxième, Works of Wonder, est en chemin après un kickstarter réussi. Et que comme pour la première saga, un mode campagne permettant d’enchaîner les parties sur les trois jeux est déjà disponible. Si avec tout ça vous n’êtes pas convaincu, je ne sais pas ce qu’il vous faut. Un article sur Paladins du Royaume de l’Ouest peut-être ?
Auteur : Shem Phillips, S J Macdonald
Artiste : Mihajlo Dimitrievski
Editeur : Garphill Games, Pixie Games
De 1 à 5 joueurs
De 60 à 80 minutes
A partir de 12 ans
Il me fait penser à Caylus ce jeu, ouvrier, bâtiment à construire, le château à construire à la place de la cathédrale, nombre de touts non définis, et 0 aléatoire.
Je ne connais que la dernière version de Caylus et si les deux sont de la pose d’ouvriers, Architectes est moins classique dans son découpage je pense.