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Early Access : Plan B: Terraform

Habiter à proximité d’une voie ferrée a changé mon regard sur les trains. Si je reconnais leur capacité à transporter marchandises et voyageurs à grande vitesse sur de longues distances, le tougoudoum tougoudoum des wagons me donne parfois des envies de saboter les rails.

Et je n’ose pas vous dire à quoi je pense quand les conducteurs font pouet pouet quand ils se croisent, mais ça inclut souvent des ongles et des petites cuillères.

Pourtant, dans les jeux vidéo, j’aime toujours autant construire des spaghettis de voies et observer le ballet régulier des locos qui acheminent des ressources. Et ça tombe bien, c’est exactement ce que propose Plan B: Terraform.

Sur une planète inconnue qui a de faux airs de Mars, notre but va être de la rendre habitable et de faire grandir sa population. Pour cela, la logique est mise en place dès le début : extraire des ressources, les transformer et les livrer aux trois petites colonies déjà implantées.

On part pratiquement de zéro : on dispose de quelques extracteurs et de quelques usines, qui nous serviront d’abord à en construire d’autres. Puis on commence les choses sérieuses avec les livraisons de béton vers une première colonie, représentée par un unique hexagone.

Ces premiers trajets se feront en camion, lentement mais sûrement, et la colonie va doucement grandir. Elle va occuper de nouveaux hexagones et demander de plus en plus de béton.

Une des particularités de Plan B, c’est la taille de la planète. Elle est tout simplement immense et gérer les flux de ressources nécessite de bien synchroniser production, transport et consommation.

Les trains deviendront vite indispensables pour ces grandes distances, mais il faudra atteindre certains objectifs pour les débloquer et nécessitent des produits semi-finis pour être fabriqués. Nous voilà partis pour une nouvelle chaîne de production uniquement dédiée à la construction de rails et de locos.

Un autre élément central, ce sont les hexagones de stockage qui sont équipés de drones pour aller chercher les ressources extraites, les apporter aux usines ou les charger sur les véhicules.

A partir d’une certaine quantité de ressources produites, un seul drone ne sera pas suffisant pour tenir le rythme et provoquera un bouchon. Augmenter leur portée et le nombre de drones sera primordial pour tenir le rythme.

Parce que la petite colonie demande de plus en plus de béton. Puis ses besoins vont évoluer. Ce n’est plus de béton dont elle a besoin, mais de béton armé, produit à partir de… béton mais aussi d’acier.

Toute la petite chaîne de production savamment orchestrée doit être repensée. Et bientôt ces colons gourmands vont vouloir de l’oxygène. Et du manger. Hop, nouvelles chaines, à base d’extracteurs de CO² pour l’oxygène, et de forage de la calotte glaciaire aux pôles pour de l’eau pour les serres…

Quand soudain, ces malpropres habitants, de plus en plus nombreux, se mettent à générer des déchets. On met en place des usines de recyclage, qui les transforment en matières utiles, au prix de nouvelles chaînes de production à raccorder à celles existantes.

A ce stade, les alentours de la colonie ressemblent à une zone industrielle et commerciale, chargée de routes, de rails et d’usines dans une joyeuse anarchie à rendre fou un maniaque de l’alignement.

Et ça ne va pas aller en s’arrangeant. La colonie continue de demander de plus en plus de ressources et de changer ses besoins, ce qui nous oblige à ajuster les productions en place et donc le flux des matières premières, des produits semi-finis et de ce qui sera consommé.

Tout est donc régulièrement à recommencer, repenser, reconstruire, et si c’est une des grandes forces de Plan B, c’est à double tranchant. Avoir passé du temps à mettre en place toute une production pour devoir tout mettre à la poubelle peut être décourageant.

Dernier détail mais non des moindres, une unité produit parfois deux ressources distinctes dont le besoin n’est pas forcément équivalent. Mais ne produira plus si elle ne peut plus stocker le surplus d’une des deux.

Par exemple, l’extracteur de CO² produit de l’oxygène mais aussi du carbone, et le forage des calottes glaciaires extrait de l’eau mais aussi de l’azote.

Si l’eau est rare à ce moment du jeu, l’azote n’est pas encore nécessaire dans les mêmes quantités. Il va alors falloir le stocker pour ne pas suspendre la production d’eau, en attendant d’en avoir besoin plus tard.

Même chose pour le recyclage qui peut se retrouver engorgé si on ne parvient pas à réutiliser la totalité des ressources transformées. Et si tout ceci n’était pas déjà suffisamment intéressant et bien pensé, ce serait oublier un peu vite que dans le titre du jeu, il y a « Terraform ».

La température de surface est loin en dessous de zéro, ce qui fait rêver en ces temps de canicules. Mais il faut avouer que pour prendre le petit déj sur la terrasse le matin, ou pour avoir de l’eau à l’état liquide, ce n’est pas idéal.

Heureusement, notre longue expérience en tant qu’espèce en matière de production incontrôlée de gaz à effet de serre va nous servir. En mélangeant des produits chimiques, on va répandre dans l’atmosphère de quoi réchauffer l’ambiance.

Une fois que la température moyenne passe au-dessus de zéro, de l’eau commence à apparaître et on peut planter des arbres au-dessus des nappes phréatiques.

Le processus enclenché, des rivières se forment et deviennent des océans qui peuvent évidemment recouvrir vos usines et autres voies de communication… Plan B: Terraform est un jeu qui demande réflexion, planification et réactivité où tous les éléments sont intelligemment imbriqués.

Si les débuts sont assez simples et intuitifs, la progression est très satisfaisante et le challenge se complexifie et s’approfondit graduellement, même si certaines marches sont plus hautes que d’autres.

L’équilibrage entre les besoins pour produire, les moyens de transport et la consommation des colonies tient encore sur un fil.

On peut épuiser certaines sources de soufre dès le début de partie, l’azote ou l’oxygène sont souvent produits en trop grandes quantités, du moins pendant un temps. J’ai parfois dû cumuler des dizaines de zones de stockage pour ne pas bloquer la production.

Plan B: Terraform est l’œuvre de Gaddy Games, constitué d’un développeur français qui avait auparavant réalisé Dig or Die, un jeu de stratégie / survie bien pensé qui a connu son petit succès à sa sortie en 2018. Ce nouveau projet s’inspire fortement de Factorio comme il l’explique dans cette news sur Steam, et s’il est encore en Early Access, la base est déjà très solide.

Je constate que je n’ai pas encore parlé de la direction artistique. Si les décors monotones à base de sable rouge du début ne sont pas très engageants, une fois la terraformation engagée, les couleurs deviennent plus agréables.

Les éléments sont simples mais lisibles, sauf lorsque la multiplication des ressources uniquement différenciées par la couleur rend difficile la distinction entre certaines nuances. Les graphismes et les animations ne manquent pas de charme, malgré leur dépouillement.

J’ai pour principe de ne pas accorder de Dystoseal of Quality aux jeux en Early Access, d’autant que la moindre modification pourrait casser l’équilibre déjà précaire que j’évoquais plus haut.

Mais la profondeur, la courbe de progression et la cohérence de Plan B: Terraform ont failli me faire déroger à ma règle. Il y a déjà des dizaines d’heures de contenu à découvrir et les updates sont régulières, on sent l’envie de peaufiner son bébé comme le promet la roadmap à retrouver ici.

Amateurs de jeux de gestion de ressources / base builders à l’échelle planétaire, ne passez pas à côté de cette petite pépite de Gaddy Games qui coûte pour l’instant moins de 10€.

Genre : Gestion / Base Builder

Développeur indépendant : Gaddy Games

Plateforme : Steam

Disponible en français

Prix : 9,99€ mais devrait monter d’ici la sortie en version finale

Date de sortie en Early Access : 15 février 2023

Testé sur une version presse fournie par l’éditeur

Ruvon

Chaologue pas encore retraité, traître renommé, survivant accompli. Mon domaine, c'est le jeu vidéo, du FPS hardcore au point&click niais, et depuis toujours amoureux du tour-par-tour.