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Early Access: Jumplight Odyssey

L’intro de Jumplight Odyssey a fait remonter des souvenirs d’enfance, quand je m’envoyais des bols de céréales devant Albator ou Ulysse 31. Malheureusement, même chez mes parents, il n’y a plus de Miel Pops dans les placards depuis plus de vingt ans.

C’est donc un thé à la main (mais quand même un samedi matin) que j’ai regardé ce dessin animé d’une qualité remarquable, au style années 80 parfaitement restitué.

Le pitch, vous le connaissez déjà : des méchants sont venus pour faire des trucs de méchants avec leurs vaisseaux de méchants près de la planète des gentils. La bataille fait rage, mais les méchants ont l’avantage et sortent alors leur étoile de la mort pour tuer des gentils.

Ils détruisent d’un coup de gros laser la planète des gentils en rigolant grassement, et la princesse qui commande la flotte des gentils est contrainte de fuir en hyperespace, pour sauver les derniers survivants gentils.

Ce scénario tragique (et si subtilement résumé) pose le décor : à la tête d’un vaisseau endommagé, à l’équipage traumatisé et pas équipé pour assurer la subsistance de dizaines de passagers, il va falloir fuir la flotte des méchants qui nous pourchasse en sautant de système en système pour trouver un refuge.

Le vaisseau est composé de plusieurs étages aux fonctions prédéfinies : le poste de commande d’où la princesse et ses officiers donnent leurs ordres, l’espace de vie où l’équipage mange, dort et se détend, le pont principal où il travaillera aux différents ateliers, et où se trouvent les postes de combat.

Plus bas, on trouve ensuite le hangar qui accueille les navettes d’exploration, le pont secondaire quasiment vide et enfin la salle des machines où se recharge le moteur de saut.

La configuration de départ est spartiate. Quelques lits, une douche, une infirmerie, et des générateurs d’énergie à peine suffisants pour alimenter les tourelles de défense. Pas de loisirs, aucune source de nourriture et des réserves d’eau limitées : c’est un croiseur de bataille, pas la croisière s’amuse.

Il faudra pourtant repenser l’aménagement pour assurer la subsistance de l’équipage et éviter qu’il meure de faim, de soif ou qu’il s’abandonne au désespoir. Ils ont tous vu leur planète natale exploser, il y a eu des blessés durant la fuite, il va falloir prendre soin d’eux sous peine de les voir errer sans but dans les couloirs, foutre le feu à leur lit voire même se suicider.

Le gameplay se rapproche d’un RimWorld dans lequel les membres d’équipage sont affectés à un rôle : ingénieur, qui construit, répare et produit, scientifique, qui soigne, cultive et gère le moteur de saut, porteurs, qui alimentent les postes de travail en ressources et qui cuisinent, et enfin les militaires qui sont là en dernier recours, si la flotte adverse nous rattrape.

On commence avec un stock de ressources limitées et un vaisseau qu’il faut déconstruire pour y prévoir une serre pour nourrir tout ce petit monde, des ateliers pour transformer les débris en matières utiles et de nouveaux ordinateurs pour augmenter les capacités du moteur de saut en urgence.

L’interface n’est pas trop mal pensée après un petit temps d’adaptation, on divise les cases en pièces à fonction unique qu’on remplit des meubles et installations nécessaires et on regarde le ballet des porteurs et des ingénieurs exécuter nos ordres.

La flotte ennemie va nous laisser peu de répit : on a en général qu’un petit quart d’heure par système pour charger le moteur vers le prochain saut et exploiter les ressources locales.

En effet, après avoir envoyé une navette scanner la zone, des équipages peuvent tenter de ramener ce qui nous fait défaut, mais cela prend du temps et comporte un risque de pertes. Attention à ne pas sauter tant que toutes les navettes ne sont pas rentrées au bercail.

Comme dans FTL, on choisit sa prochaine destination, les plus lointaines nécessitant de charger le moteur plus longtemps et comme évoqué il faudra parfois améliorer le moteur pour pouvoir continuer son voyage.

Sur le papier, Jumplight Odyssey cuisine des concepts connus pour les servir sur un plateau appétissant. Mais la cuisson n’a pas été homogène, certains ingrédients ne sont pas cuits et d’autres sont restés collés au fond de la casserole.

L’interface est agréable, mais elle n’est pas toujours pratique et manque cruellement d’informations. Déjà, j’ai passé le jeu en anglais, la version française étant truffée de fautes et d’erreurs de traduction.

Ensuite, vous n’avez aucun moyen de connaitre la consommation quotidienne de votre vaisseau pour pouvoir ajuster la production, qu’elle soit d’énergie, d’eau ou de nourriture.

Sans prévenir, une épidémie d’assoiffés ravagera l’équipage, suivie de peu par une horde de puants, puis d’une famine généralisée (l’eau sert à étancher la soif et assurer l’hygiène, mais aussi à faire pousser la biomasse et les légumes…).

En cas de surconsommation, le courant pourra aussi être coupé de façon aléatoire dans différentes parties du vaisseau. Aucun moyen de prioriser la distribution, c’est donc dans le noir et en flottant sans gravité que vos pauvres hères crieront famine et désespoir.

La production de métal et de plastique est extrêmement lente même si un ingénieur reste en poste des heures durant, rendant quasiment inutile les ateliers ; seules les expéditions extérieures vous en fourniront des quantités utiles.

Mais ce que j’ai surtout regretté, ce sont les bugs. La liste serait trop longue, mais elle va des anomalies visuelles rigolotes, comme des jambes pliées dans le mauvais sens, aux fonctions toutes pétées qui font monter la rage, comme quand des ingénieurs ignorent des ordres de construction sans explication, entrainant la perte d’une partie pour manque de ressources et de place pour installer la pièce ailleurs.

La direction artistique si parfaite du dessin animé d’intro laisse ensuite la place à quelque chose de plus classique mais de tout aussi agréable. Mais elle ne viendra pas sauver un équilibrage mal pensé et une difficulté torpillée par les bugs trop fréquents.

Jumplight Odyssey est sorti en Early Access il y a quelques semaines, plusieurs patchs ont déjà été appliqués mais il reste encore beaucoup de polish à passer, ainsi que de nombreux éléments à ajouter (comme de nouveaux vaisseaux ou amiraux). J’ai envie de l’aimer très fort pour toutes les raisons évoquées plus haut, mais il n’est pas encore dans un état recommandable, surtout au prix demandé.

Les australiens de League of Geeks (qu’on connait pour leur très bon Armello sorti en 2015, et qui ont aussi le remake de l’excellent jeu de stratégie en tour par tour Solium Infernum sur le feu) ont donc du travail.

Mais s’ils réparent ce qui ne marche pas, rééquilibrent la production de ressources et ajoutent quelques grosses louches de confort et d’informations primordiales (ce qui fait beaucoup de si, je vous l’accorde), Jumplight Odyssey pourrait bien d’ici sa sortie en version finale être un bon petit jeu de gestion à déguster avec ou sans Frosties.

Genre : gestion / survie

Développeur indépendant : League of Geeks

Plateforme : Steam

Disponible en français

Prix : 28,99€

Date de sortie en Early Access : 21 août 2023

Testé sur une version presse fournie par l’éditeur

Ruvon

Chaologue pas encore retraité, traître renommé, survivant accompli. Mon domaine, c'est le jeu vidéo, du FPS hardcore au point&click niais, et depuis toujours amoureux du tour-par-tour.