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Curse of the Sea Rats

Ça faisait bien dix jours qu’on était en mer, tout l’équipage souffrait du mauvais temps, le bateau était secoué comme une coque de noix et les voiles menaçaient de se déchirer. Mais notre capitaine ne voulait rien savoir, il fallait qu’on ramène ces gibiers de potence en Angleterre pour qu’ils soient jugés et probablement pendus haut et court. La pire d’entre eux était Flora Burn, la célèbre pirate qui se proclamait sorcière. Le capitaine rigolait bien quand on lui en parlait, il disait qu’on était des ventres-mous. Sauf qu’il y a eu un grand éclair, que nos voiles ont fini par se déchirer, que le bateau s’est fracassé sur des rochers, et qu’on s’est retrouvé transformé en rats. Et les hurlements sauvages de la sorcière qui ne nous quittaient plus. « It’s the curse ! The Curse of the Sea Rats ! » (oui, elle est anglophone).

Ah, il rigole moins le capitaine maintenant, c’est moi qui vous le dit…

Pire Rate !

Curse of the Sea Rats est un jeu de plateforme-action solo, et coop, où nous incarnons jusqu`à quatre prisonniers transformés en rats par le mauvais sort d’une pirate sorcière : Flora. Mais, comme une malédiction n’est jamais très précise, c’est la totalité des occupants du navire qui ont été transformés. Vous, les militaires anglais, l’équipage, l’ensemble de la bande de pirates et Flora elle-même! Nous voici donc tous sous la forme de rats, éparpillés sur une côte mystérieuse, à la recherche de Flora et de ses sbires, détenteurs du médaillon qui pourra nous faire redevenir humains.

L’aventure, car c’en est une, nous fera passer par différents endroits tous connectés les uns aux autres. Nous devrons, comme on s’y attendait, affronter chaque membre de la bande de Flora sous forme de boss de fin de niveau, pour espérer arriver à vaincre cette dernière, récupérer le médaillon et reprendre notre forme originale.

Au Rat, des pâquerettes

Pour celles et ceux qui ne sont pas familiers avec le terme metroidvania, une courte explication s’impose. Le mot vient de la contraction de deux des représentants les plus emblématiques du genre qui nous intéresse : Castlevania et Metroid. D’après notre source principale d’information en ce premier quart de 21e siècle (Wikipédia) : « les jeux du type metroidvania comportent des cartes avec des mondes connectés entre eux que le joueur peut explorer, mais certaines parties ne sont pas accessibles, fermées par des portes ou des portails. Le joueur peut y accéder seulement s’il gagne des armes ou des capacités particulières. »

Bon ok, cette définition pourrait s’appliquer à n’importe quel jeu. Mais il y a un « genre » metroidvania, des sortes de canons à respecter, alimentant un débat sans fin depuis la cours de récré jusqu’aux fins de soirées difficiles quand on a plus vraiment grand chose à se dire mais qu’il faut bien trouver un sujet pour se réveiller.

Ma définition personnelle est plus simple : c’est un jeu de plateforme-action avec des phases de combats où on fait beaucoup trop d’aller-retours. Faites-en ce que vous voulez.

Qu’a Rat ? thé

Vous sentez mon enthousiasme ? C’est normal, ce n’est vraiment pas mon genre de prédilection. Pas parce que ce sont des mauvais jeux, mais parce que je suis mauvais. Pas un peu mauvais, ce serait trop simple, mais vraiment très très très en dessous de la moyenne admise pour un enfant de quatre ans encore mal coordonné. Je tombe toujours dans les mêmes trous, rate toujours les mêmes enchaînements, me fais toujours toucher par les mêmes ennemis. Je ne retiens pas les patterns et j’appuie de toute façon trop tard sur les boutons. Bref, je ne suis pas taillé pour ces jeux.

Et pourtant ici je m’acharne, je m’accroche, je passe des heures sur le même niveau, à faire et refaire le même passage, revivant le même échec douloureux. Masochisme ? Probablement un peu. Mais surtout, dans Curse of the Sea Rats, ce sont ses graphismes, son ambiance et, d’une façon générale, sa direction artistique, qui m’ont donné envie de rester.

Rat vit d’être las

Comment ne pas aimer ces graphismes et ces animations réalisés à la main ? Comment ne pas être émerveillé par ces petits rats et leur environnement qui font immédiatement écho aux Disney de notre enfance ? J’y ai retrouvé le plaisir visuel d’un Aladin sur SNES, mais aussi dans un parallèle évident, la saveur d’un Basil, Détective Privé. Ce sont bien sûr les références également données par l’équipe en charge du projet.

Des personnages hauts en couleur, souvent très caricaturaux, qui auraient totalement leurs places dans un Disney. Chaque individu est bien identifié, son caractère est posé en quelques traits. Et, s’ils sont d’un classicisme total, ils restent suffisamment uniques pour ne pas être lassants. À l’instar des héros, eux aussi uniques et très classiques. Nous pouvons incarner au choix : le guerrier, l’agile, le costaud et la versatile. Quatre personnages aux techniques différentes, qu’on pourra incarner à l’envi grâce à un vieux génie désagréable. C’est également lui qui nous permettra de remplir notre arbre de talent (spécifique à chaque héros) et d’acquérir de nouvelles compétences.

De ce point de vue là, le jeu fait preuve d’une grande générosité. Jugez plutôt : les ennemis lâchent des pièces d’or pour acheter des objets (potions de vie, nourriture, …), mais également d’autres pièces qui permettent d’acheter des compétences et d’ouvrir les portails de téléportation entre les zones, et on collecte également des xps puisqu’on passe de niveau, ce qui améliore votre fiche de personnage (elle-même très précise et digne d’un hack&slash). En outre, vous collectez des tas d’objets plus étonnants les uns que les autres (qui vont de la pelote de laine à l’idole d’une temple maya) qu’on devra parfois donner à des PNJs , et parfois ben.. je ne sais pas.

Enfin, à votre mort, vous perdez une partie de ce que vous avez accumulé, et il faudra récupérer tout ça sans mourir de nouveau, au risque de tout perdre (oui, exactement comme un Dark Souls). C’est très (trop ?) riche mais pas spécialement indigeste sur la quinzaine d’heures de jeu (prévue) que dure l’aventure.

Rat dit « Calle »

En parlant de durée, Curse of the Sea Rats est difficile, vraiment difficile. C’est aussi pour ça que je parle de quinzaine d’heures prévues. Pour ma part à 15h de jeu, j’en étais à la moitié. Alors d’accord, je ne suis pas très doué en metroidvania, mais celui-là me semble particulièrement velu, et pas toujours pour les bonnes raisons. Certaines hitbox sont aléatoires (les crabes du début sont tellement énervants), certaines morts sont clairement injustes et la parade est inutile car son animation est peu lisible. D’ailleurs pourquoi une parade ? Une roulade aurait été tellement plus adéquate. Par contre, les patterns des boss sont clairs, les phases de plateforme demandent de la précision mais restent jouables et les zones s’enchaînent avec fluidité.

Tous les reproches que je peux faire à Curse of the Sea Rats ne sont probablement pas liés au jeu en lui-même, mais à son genre en tant que tel. Par exemple, je ne supporte pas les repops des mobs quand on change d’écran et qu’on revient, pourtant c’est le genre qui veut ça. Curse of the Sea Rats se revendique comme metroivania, ce qu’il est effectivement, et très scolairement. Aller-retours, passages qui s’ouvrent au fur et à mesure, clefs à trouver et ennemis en boucle, tout est à l’endroit prévu, comme prévu, sans surprise. Enfin, soyons honnêtes, la rejouabilité est inexistante, et une fois terminé, il faut vraiment être tombé fortement amoureux du jeu pour y retourner.

Rat trappe, toi !

En résumé, c’est un metroidvania efficace, servi par une direction artistique très agréable et qui donne envie d’aller jusqu’au bout de son histoire malgré les quelques crispations que le genre peut provoquer. De plus, il a le bon goût de proposer une partie multijoueurs jusqu’à 4 en local.

Franchement, c’est suffisamment rare pour qu’on ne boude pas son plaisir. De plus les graphismes très cartoon, ainsi que l’ambiance totalement foutraque et mignonne, rappellent les meilleures moments des jeux et des films d’animation Disney. Une jolie réussite.

P.S. On me dit dans l’oreillette que certains bugs se sont glissés ici et là. Deux remarques sur le sujet : quand ils ne sont pas bloquants j’ai tendance à ne pas en tenir compte dans mon évaluation (ce sont des choses qui arrivent), et de toute façon l’éditeur a proposé un patch day one (comme quoi, j’ai bien fait de pas m’affoler).

Genre : metroidvania (ou plateforme-action)

Développement : Petoons Studio

Éditeur : pQubes

Date de Parution: 6 avril 2023

Testé sur une version presse fournie par l’éditeur

CekterDown

Fasciné par Sherlock Holmes et le mythe de Cthulhu, j'aime également la science-fiction et tout ce qui s'y rapporte, je ne réponds qu'aux superlatifs et ne désespère pas qu'on me voue un culte un jour. J'aime surtout m'entourer de gens plus talentueux que moi.