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Formula 1: Drive to Survive

Sport en série, épisode 2. Les derniers mois m’ont permis de visionner des séries très intéressantes, dont une poignée ont pour cadre le sport. De retour depuis peu, la Formula 1, comme d’autres sports n’a pas existé en ce printemps 2020 confiné. Pas mal de pilotes désœuvrés ont couru des Grands Prix virtuels par l’intermédiaire du jeu vidéo en affrontant les meilleurs pilotes gamers de la planète.

Les yeux déjà dans la course.

Pour ma part, j’ai décidé de jeter un œil sur la série documentaire produite par Netflix : Formula 1: Drive to Survive. J’ai le sentiment que cette série (2 saisons de 10 épisodes) est en mesure de passionner ceux qui ne s’intéressent pas à cette discipline… car c’est l’humain qui est au cœur du point de vue choisi. 

Ricciardo et ses parents, des moments intenses avant le départ.

La saison 1 suit les protagonistes du Championnat du Monde 2018. Donc tout est basé sur la réalité, et si vous le souhaitez, Wikipedia vous raconte la fin ! L’intérêt est ailleurs.

 Fast and Furious mais sans diesel

Les considérations techniques ne sont pas au centre des épisodes, qui sont construits sur un storytelling plutôt habile. Les hommes et les femmes ont constamment la parole, au travers des conférences de presse ou d’interviews avec l’équipe de tournage. 

Un des jeunes loups de la meute.

Pilotes, directeurs d’écuries, familles, journalistes, se livrent et expriment leurs états d’âme. Et ce sont parfois des réactions spontanées dans d’autres cadres (réunions de travail, courses, vacances, séances promotionnelles, préparation physique, moments de détente au domicile) qui révéleront plus encore leurs sentiments.

La pression du palmarès pour l’écurie Red Bull.

Vous apprenez à les connaître, vous cernez leurs objectifs et les obstacles qu’ils rencontrent. Comme dans une fiction, vous construisez peu à peu votre connaissance des personnages. La série vous plonge ensuite rapidement dans ce qui fait le sel de cette discipline : des rivalités. PLEIN de GROSSES rivalités. 

« Sans rancune, j’ai une pensée pour tous ceux que nous allons devoir battre cette année. »

Épique ma place

Vous verrez ainsi les écuries Haas et Renault lutter farouchement pour la 4ème place au classement, pour une place honorifique de  « Best of the rest » derrière les 3 grosses écuries. Pendant ce temps, les deux pilotes de Red Bull, Daniel Ricciardo et Max Verstappen se livrent une  concurrence exacerbée qui va dégénérer en course.

Le duel fratricide des Red Bull en 2018 : double abandon à venir.

Toujours plus d’ambiance : le manager de Renault et celui de Red Bull se livrent à des joutes verbales médiatiques, héritées de leur partenariat technique long et amer. Sébastien Ocon, jeune prodige de Force India, doit se battre contre son équipier Sergio Perez appuyé par ses sponsors pour conserver un siège de pilote la saison suivante. 

Travail de mémorisation du tracé pour Sébastien Ocon.

Regards noirs, petites phrases, trash-talking, coups de pression, moqueries, punchlines, ce serait la cour du collège… si il n’y avait pas des centaines de millions en jeu et le danger permanent.

Bim.

Les accidents sont spectaculaires, et les auteurs ont accès à des images inédites par rapport à celles diffusées lors de la la retransmission des courses. Le montage qui en est fait, accompagné d’un audio adéquat (musique-radio-commentaires-public), font de ces crashs des séquences à couper le souffle. C’est leur issue sans gravité qui les rendent supportables.

Bam.

La saison de Formule 1 est suivie dans un ordre chronologique, mais le point fort est de l’avoir scénarisée, ce qui permet de retrouver quelques mois/épisodes plus tard un des protagonistes rencontré précédemment.

Les grosses écuries Ferrari et Mercedes ne font que passer dans le décor (elles n’ont pas ouvert leurs portes aux caméras), et la série se concentre sur le milieu de tableau. L’accent n’est pas toujours mis sur les mêmes. Un épisode peut être centré sur l’écurie Haas ou Force India, un autre sur McLaren ou Red Bull.

Cela permet de découvrir des talents moins réputés. Lewis Hamilton ou Sebastian Vettel, les plus connus du grand public, ne font ainsi que des apparitions. Pierre Gasly, Charles Leclerc, Lance Stroll, George Russel, Carlos Sainz, Sebastien Ocon : toute une génération de pilotes jeunes, charmants et talentueux est mise en avant, dans un but promotionnel évident. Et ça marche. Sans se priver de montrer aussi à l’occasion le côté obscur des personnalités : l’ambition dévorante, l’agressivité, la prétention.

“Qu’il signe chez eux ! L’an prochain, je lui ferai un signe de la main quand je lui prendrai un tour à chaque course.”

Ferveur et réseaux sociaux, l’air du temps, … en 2018.

Bien guidés par des journalistes spécialisés qui décodent pour vous les situations de chacun, vous serez capable de comprendre le dilemme du pilote australien Daniel Ricciardo qui réfléchit à changer d’équipe. Vous ressentirez l’admiration de Carlos Sainz pour Fernando Alonso, son idole d’enfance qu’il affronte en course. Vous reconnaîtrez la nécessité pour Christian Horner, le directeur de l’écurie Red Bull, d’être impitoyable dans les négociations pour le futur moteur.

Christian Horner, un regard, une gueule, un personnage.

« En étant honnête, je pense qu’ils sont très éloignés de notre niveau. »

Vous ressentirez la pression subie par Claire Williams, la fille de Frank, héritière de la direction d’une équipe au passé mythique et qui joue les dernières places. Sous le luxe et le champagne, un peu de drama.

Les yeux dans les pneus

Formula 1: Drive to Survive excelle dans l’art de rendre la Formule 1 passionnante, ce qu’elle n’avait plus l’air d’être depuis des années. Les Grands Prix, parfois décrits comme longs et ennuyeux, sont ici résumés en quelques minutes.

20 voitures seulement à chaque départ.

Ils sont représentés par les images fortes, le rituel des départs, les dépassements, les accidents. Ces faits de course sont entrecoupés de ce qui n’est jamais télévisé : les réactions spontanées (joie, colère, stress, inquiétude etc) des équipes dans les stands ou des responsables qui suivent la course dans une loge.

Encore un dimanche de seum pour Claire Williams.

Les commentaires anglais sont forcément passionnés et dithyrambiques, et mettent une touche finale à cette bataille épique à coups de volant entre pilotes qui veulent tous être « Champion-du-Monde-dans-les-2-ans ».

Façon puzzle

Le téléspectateur est happé par les caméras embarquées et bénéficie des échanges radio entre les pilotes et les responsables qui ne sont pas piqués des vers : ça  encourage, ça râle, ça s’affole, là aussi l’intensité est de mise.

On est aux première loges.

L’intérêt de la série est donc de mettre en scène assez brillamment le suspense, le spectacle, l’intimité et les émotions.

Alors oui, j’ai suivi la Formule 1 pendant des années avant de m’en détourner à la fin des années 90. J’ai même eu la chance d’assister au Grand Prix de Silverstone en 1983. Et j’ai eu ma période « jeu de F1 » au début des années 2000. J’étais open au sujet sans doute. 

C’est un univers sportif très particulier. Les sommes en jeu sont colossales. Le prestige y côtoie le luxe. Les acteurs de cet univers vivent dans un monde à part, et sont sélectionnés pour la rareté de leurs compétences. Celles de pilote, d’ingénieur, de mécanicien… ou parfois le talent d’être multimillionnaire.

Bagué comme ja’ : la guerre du goût.

Se détacher de cet aspect et du débat périphérique sur la pollution permettra de devenir un témoin privilégié des émotions fortes générées par ce qui reste une compétition très exigeante et héritière de son riche passé. Et de voir qu’au milieu des moteurs, des pneus et des ordinateurs, évoluent des êtres parfois sans pitié, mais qui restent des hommes.

Création : James Gay-Rees, Paul Martin, Sophie Todd

Genre : Documentaire, Sport

Acteurs principaux : Daniele Ricciardo, Fernando Alonso, Charles Leclerc

2 saisons de 10 épisodes

Durée : 45 minutes