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Brochette de films #6 : Blade j’aimais bien le 2, mais sans le 3.

En 1998, le Marvel Cinematic Universe (MCU pour les fainéants) n’existait pas encore et les adaptations de super héros n’avaient pas franchement bonne presse avec des versions filmiques très oubliables, même pour les figures emblématiques. Le Spider-man de Sam Raimi n’est pas encore sorti et les X-Men de Bryan Singer non plus (il sort son second film : un élève doué qui est injustement méconnu). Les raisons sont certainement multiples, mais comment adapter un univers aussi vaste et une imagerie qui passe très bien au format comics, moins au cinéma et pour quel budget (vu le coût du dernier Avengers, on peut comprendre la frilosité de l’époque) ? Alors certain(e)s ont décidé d’aller piocher dans les personnages moins connus. Ainsi Blade s’est vu gratifier d’une adaptation en trois opus avec une qualité assez inégale suivant les films même si le scénariste (David S. Goyer) est resté à son poste pour les trois films, tout comme Wesley Snipes dans le rôle de Blade.

Blade de Stephen Norrington (1998)

Revoir Blade après le MCU permet de se rappeler qu’un film de super héros ne doit pas forcément baser son scénario sur une origin story comme c’est devenu la règle pour introduire un nouveau personnage voué à faire de la figuration dans la prochaine réunion de famille (Captain Marvel, je pense fort à toi). Ici Blade est déjà un tueur de vampires accompli en pleine possession de ses moyens et quelques flashbacks nous en apprennent plus sur le passé du personnage. C’est largement suffisant pour laisser place à une histoire de vampires qui souhaitent éliminer leurs faiblesses afin de pouvoir bronzer en paix tout en mangeant de l’aïoli avec des couverts en argent.

Blade est bien campé par un Wesley Snipes mutique comme le veut son personnage, Stephen Dorff fait du Stephen Dorff et les méchants sont très méchants. Le film fonctionne bien avec quelques poses iconiques un peu forcées pour Blade, malgré des idées que le commun des mortels pourrait qualifier de complètement crétines (la crème solaire étant le summum). La violence est présente et le gore aussi. La réalisation est solide à défaut de plus. Stephen Norrington fait le job et c’est un peu ce qui résume sa filmographie. Je ne le qualifierais pas de tâcheron, mais c’est loin d’avoir de la personnalité et en regardant le second opus dans la foulée, c’est flagrant.

Blade II de Guillermo Del Toro (2002)

Le premier opus ayant bien marché, c’est assez naturellement qu’une suite est mise en route. Le scénariste reste en place, Wesley Snipes rempile et Guillermo Del Toro prend la place de Stephen Norrington. Del Toro n’est pas encore le réalisateur connu et reconnu d’aujourd’hui (je conseille l’Echine du Diable qui est lié au sublime Labyrinthe de Pan par l’époque évoquée). Trois films à son actif (Cronos, Mimic et l’Echine du Diable) et un univers qui s’affirme déjà.

Blade II se situe quelques années après le premier opus. Les vampires viennent demander de l’aide à Blade pour contrer une nouvelle espèce de vampires qui se nourrit de vampires. Le scénario est anecdotique et balance un ou deux twists pour justifier son existence. On retrouvera quelques idées reprises dans le mésestimé Hellboy II (et des acteurs). C’est l’occasion de découvrir le monde des vampires un peu plus en profondeur. Je pense que Del Toro a fortement influencé l’écriture du scénario tant ça ressemble à du Del Toro avec une appétence pour les monstres et leur monde. Le blood pack ressemble plus à des sado-masos en randonnée qu’à un groupe d’élite censé tuer Blade, mais il est composé d’un Ron Perlman en nazillon qui semble beaucoup s’amuser, un Conan le Barbare accompagné d’une Red Sonja du pauvre avec un gros flingue, un adepte du sabre mutique, un gros benêt qui finira chez les vikings et un hippie à cheveux longs qui a du servir de modèle pour ruvon.

Del Toro s’amuse tout le long du film et ça se voit avec un gros travail sur les mouvements de caméra, les décors hyper travaillés et un travail sur la photo qui manque de subtilité, mais renforce la personnalité du film. Blade réussit ses poses iconiques et apparaît comme le Némésis absolu des vampires. Il ne craint pas grand chose, ne se retrouve jamais franchement en danger et sait tout en avance. Tout juste pourrait-on reprocher le retour d’un personnage qui semble être là parce que l’acteur a signé pour une trilogie et non pour donner de la contenance à l’histoire.

Au final, un second opus qui porte la marque de son réalisateur et envoie le premier dans les limbes de la médiocrité. Le troisième opus clôturera une trilogie pensée par le scénariste qui deviendra réalisateur pour l’occasion.

Blade Trinity de David S. Goyer (2004)

Del Toro ayant préféré adapter Hellboy plutôt que revenir clôturer la trilogie, David S. Goyer s’est senti pousser des ailes (ou on l’a forcé). Il passe à la réalisation et ce n’est pas pour le meilleur, loin de là. Wesley Snipes revient, Kris Kristofferson aussi et Jessica Biel comme Ryan Reynolds rejoignent le casting (il y en a quelques autres dans des petits rôles). Dominic Purcell fera l’antagoniste pour le plaisir de tous les amoureux des acteurs mono-expressifs.

Le scénario est un peu toujours pareil avec des vampires qui réveillent Dracula (Drake ou Dagon selon l’époque apparemment) pour combattre leurs faiblesses. Blade doit le combattre et se faire de nouveaux amis parce que son père de substitution s’est enfin décidé à mourir au bout de quelques minutes de film, après avoir raté son coup dans les deux précédents films. Passons sur les raisons de la venue de la fille du défunt alors que toute sa famille est morte à cause des vampires, que Dracula se soit enfermé dans le désert syrien plutôt qu’en Transylvanie où le temps est moins ensoleillé et que Blade a fait une razzia chez un styliste copiant Louboutin pour se concentrer sur cet opus qui accumule les défauts plutôt que les qualités.

Commençons par les acteurs avec un Wesley Snipes qui semble s’emmerder à un point rarement vu. Il passe dans le film comme une ombre et ce ne sont pas des scènes d’action bien troussées à défaut d’être originales qui vont sauver sa prestation (sa doublure a bien bossé). Jessica Biel tente tant bien que mal de s’en sortir avec un rôle tout sauf développé tandis que Ryan Reynolds fait des blagues pourries que Kev’ Adams ne renierait pas. Les autres acteurs font de la figuration, même l’antagoniste qui est sous développé, sous exploité et interprété par un Dominic Purcell qui devrait plutôt muscler son jeu que ses bras. Mention spéciale au Loulou de Poméranie qui est la pire idée du film.

La réalisation est insipide et même Stephen Norrington faisait un meilleur boulot sur le premier opus. La bande son pas fameuse de la série est au niveau du film, c’est à dire pas terrible. Blade devient un grand bavard, donneur de leçons par instants et dénature ce personnage taciturne, peu enclin à s’attacher. Les décors sont génériques. Pour résumer Blade Trinity, c’est l’actionner classique du début des années 2000. De l’action, de l’humour bas du front et surtout pas trop de gore pour faire plus d’entrées. Il en ressort une conclusion ratée pour une trilogie de films qui avait réussi son entrée, magnifié son plat de résistance avec un réalisateur inspiré et qui rate son dessert.

Au final Blade aura eu droit en guise d’adaptation à une trilogie imparfaite, une série TV que tout le monde a oublié, un animé qui n’aura pas marqué et un quatrième opus qui ne viendra jamais puisque Blade devrait rejoindre le MCU en phase 5.

Machiavel

Toujours à l'affût de ce qui peut piquer ma curiosité, peu importe le domaine avec une légère préférence pour les jeux vidéo, le cinéma, la littérature, les séries TV, les jeux de société, la musique, la gastronomie, les boissons alcoolisées et quelques autres petites choses . Ma curiosité est telle le tonneau des danaïdes, sans fond.