Limits of Glory: Maida 1806
Vous vous en souvenez sûrement, j’ai eu la chance de rencontrer Andrew Rourke à la PunchedCon 2024. Le patron de Form Square Games m’avait présenté sa série Limits of Glory et j’étais reparti avec un exemplaire du premier volume, Bonaparte’s Eastern Empire. Les deux volumes suivants, Maida 1806 et Santa Maura & Capri étant encore en cours de financement à l’époque, il aura fallu attendre une petite année avant de les voir débarquer dans les boutiques, et donc sur ma table de jeu.
Continuons donc notre découverte de la série avec Maida 1806, qui envoie les joueurs dans la région de Naples, soit dans les bottes de la troisième coalition pour protéger Naples et le Royaume des deux Siciles, soit dans les bottes françaises pour finir le travail après Austerlitz. Un théâtre d’opérations moins exotiques que l’Egypte du précédent mais pas forcément moins intéressant, bien au contraire.
Avant d’attaquer les spécificités de ce volume II, petit récapitulatif des règles des Limits of Glory, conservées bien entendu d’un volume sur l’autre (avec quelques petites modifications selon le théâtre d’opérations bien entendu). L’avantage du système, qui est très simple, est que vous pouvez enchaîner les titres sans avoir à réapprendre de nouvelles règles à chaque fois. Ce qui est extrêmement appréciable !
Limits of Glory repose sur un système simple, que j’ai détaillé dans mon précédent article, et donc je vais vous rappeler les grands principes : la carte est découpée en grandes zones, qui doivent être activées pour que les unités présentes puissent agir. L’activation est simple : on jette un nombre de dés égal au chiffre noté sur la zone, tout 5 ou 6 est un succès permettant l’activation. S’il n’y a pas de succès, le joueur peut décider d’utiliser les points de Gloire de son général commandant les troupes pour relancer autant de dés, et ce une seule fois.

En cas d’échec, on place un marqueur de Momentum dans la zone, qui devient inactive jusqu’à la fin du tour, et l’initiative passe à l’autre. Si le joueur ne disposait plus de marqueur de Momentum, son tour est terminé. En cas de succès, il peut continuer à activer des zones. Simple et efficace, obligeant à gérer intelligemment les points de Gloire, qui servent bien entendu lors des combats.
Ceux-ci sont simples eux-aussi : on calcule la force de chaque armée présente (chaque type de troupes ayant une force différente : 1 pour l’infanterie, 2 pour la cavalerie et 3 pour l’artillerie), on repère dans la table des combats la ligne adéquate (selon la nationalité des troupes dirigées) et on lance 4 dés. Le but est encore une fois de faire un maximum de 5 et 6 qui infligeront des pertes, tout en atteignant le total inscrit dans la case (par exemple une force Française de 10 points doit faire au moins 14 avec les 4 dés. Si ce total n’est pas atteint, aucun succès ne comptera.

Chaque joueur est libre d’utiliser les points de Gloire pour relancer autant de dés que de points investis et ensuite seulement, chaque joueur peut utiliser ses points de gloire pour faire relancer les dés de son adversaire… C’est une excellente idée, cela permet de bons retournements de situation et des petites larmes de frustration. Les points de Gloire étant limités, il faudra ainsi les utiliser à bon escient entre déplacements et combats.
Notons, et c’est plus important pour Maida 1806 que cela ne l’était pour le premier volume, que les combats contre des places fortes – les sièges donc – se jouent sur une table des dégâts spécifiques et que les navires peuvent intervenir. Les grands principes de la série étant clairs – et d’une grande simplicité comme vous pouvez le voir – penchons-nous sur ce volume Napolitain.

La partie se déroulera – comme dans Bonaparte’s Eastern Empire – en deux phases : une phase où le joueur Coalisé va se repositionner en attendant l’événement qui déclenchera les hostilités, et la phase principale, où tout le monde s’écharpe joyeusement.
Contrairement à son prédécesseur, où la phase d’invasion impliquait des courses poursuites navales, la phase d’invasion est bien plus rapide et statique dans Maida 1806. Il faut dire que l’aire de jeu est bien plus réduite et que l’arrivée des Français se fait par un seul territoire.

En observant la carte, on se rend compte de plusieurs choses : le Français arrivant invariablement du même endroit, le Coalisé peut être tenté de bétonner devant pour anéantir rapidement les forces françaises. Ce qui pourrait être une bonne idée si ces dernières n’étaient pas si efficaces en terrain découvert.
Qu’à cela ne tienne, le Coalisé n’a qu’à se retrancher dans les forteresses, notamment celle de Gaeta qui non seulement offre un énorme bonus défensif mais qui fait aussi partie des conditions de victoire. Cela pourrait être aussi une bonne idée, mis à part que cela laisse le champ libre au Français de se promener partout ailleurs et surtout d’aller tranquillement visiter la Sicile.

La bonne stratégie semble être entre les deux, où chaque camp va essayer de se jeter sur les places fortes les moins défendues tout en tentant de ne pas trop disperser ses forces. Pour rappel, la capture d’une place forte fait gagner des points à un camp tout en en faisant perdre à l’autre. L’avantage du Coalisé est qu’il n’a par défaut pas besoin de laisser de garnison pour tenir une région, ce qui équilibre la toute puissance du Français.
La victoire appartiendra au Français si à n’importe quel moment il contrôle Geata et a plus de Points de Victoire que les Alliés, ou si lorsque l’événement déclenchant la fin de partie (14 avec les 4 dés lancés à chaque début de tour) se produit, il a plus de 24 points de victoire. Les Alliés gagnant dans tous les autres cas de figure bien entendu.

Si encore une fois les Français ont l’avantage de la puissance, leurs faibles effectifs les empêchent de faire, comme dans le Volume 1, la technique du rouleau compresseur. Les places fortes de Maida 1806 sont en effet bien plus avantageuses pour les défenseurs que leurs équivalents égyptiens. Par exemple Gaeta apporte 12 points de force, ce qui est énorme par rapport aux 5 points des forts égyptiens. Comme on ne peut faire qu’un combat de siège par tour, le défenseur peut espérer jouer la montre et rameuter des navires pour le soutenir, bloquant de fait les assaillants qui ne peuvent continuer leur conquête.
Le Français peut quand même espérer prendre toutes les places fortes continentales, mais le total en PV sera tout juste suffisant et surtout, le joueur Coalisé n’aura aucun souci à vider les faibles garnisons que le Français aura déployées, handicapé comme il l’est par ses faibles effectifs. La solution d’aller prendre les places fortes en Sicile – Messine, Syracuse et Palerme – est très tentante mais elle repose sur la condition d’avoir… des bateaux pour faire traverser les troupes, sachant que la Marine française est aux abonnés absents.

Il va donc falloir capturer des ports, où des barges et des canonnières stationnent pour pouvoir aller débarquer en Sicile. En évitant bien sûr les navires Coalisés qui eux sont bel et bien présents. Et qui serviront aussi pour appuyer les troupes réfugiées dans les places fortes…
Cerise sur le gâteau, ou ultime caillou dans la chaussure française selon le point de vue, les Alliés peuvent faire appel à la Guérilla, des troupes faibles mais bien utiles pour harceler comme l’étaient les Mamelouks du volume précédent.

Maida 1806 est paradoxal : on pourrait croire que l’intérêt est plus limité que celui de Bonaparte’s Eastern Empire, la carte offrant moins de possibilités de mouvement et les troupes étaient en nombre inférieur mais il n’en est rien, bien au contraire. Le fait de ne pas pouvoir négliger le pan naval, d’avoir des forces globalement bien plus équilibrées et d’avoir ce constant va-et-vient des troupes profitant de la moindre faille dans le dispositif adverse en font un opus bien plus intéressant que son prédécesseur.
Les parties sont plus courtes et dynamiques, notamment grâce à une phase d’invasion bien plus limitée (je vous avoue qu’elle n’avait pas ma préférence dans le premier volume) et des points de rupture plus décisifs. Il suffit en effet de prendre une ou deux mauvaises décisions – ou même d’échouer au pire moment – pour voir la partie basculer. Cela peut sembler cruel ou injuste mais malgré le nombre de dés lancés à la minute, Maida 1806 ne repose pas tant que ça sur le hasard.

Avec ce deuxième volume, Andrew Rourke exploite donc parfaitement les mécaniques simples et dynamiques créées pour Limits of Glory. Le terrain de jeu plus ramassé, la meilleure intégration du pan naval et l’équilibrage plus satisfaisant des forces en font un jeu très agréable et facile à sortir avec des parties durant environ 2 heures. Petit mot sur le matériel, comme la direction artistique, qui est identique d’un volume à l’autre, ce qui permet de conserver une excellente unité.
Il me reste maintenant à vous parler cet été du troisième (et dernier ?) volume napoléonien, Santa Maura & Capri et surtout à attendre le volume se déroulant dans la Vendée de 1793. Autant vous dire qu’il me tarde un peu, surtout après la sortie du jeu de Fellowship of Simulations. Mesdames et messieurs, gardez donc un œil très attentif sur Andrew Rourke et Form Square Games !
Auteur : Andrew Rourke
Artistes : Isaac Cruikshank, George Cruikshank, James Gillray
Editeur : Form Square Games
1 – 2 joueurs
90 à 150 minutes
Testé sur une version presse fournie par l’éditeur