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Age of Dogfights WWI

Pour ceux qui me connaissent, vous savez que je suis un féru de jeux d’aviation. Dans cette catégorie, il existe beaucoup de jeux solos qui ne sont pas forcément ma tasse de thé, je préfère les jeux contre un ou des adversaires humains, c’est généralement plus amusant et intéressant. Cependant, les jeux d’aviation ont la réputation d’être assez compliqués et longs, donc peu accessibles en général. Car trouver un camarade qui accepte (et accessoirement qui a le temps) de se farcir 35 pages en anglais, par exemple pour The speed of Heat n’est pas forcément facile.

En début d’année est sorti Fighters of the Pacific, jeu de combat aérien tactique d’une simplicité hallucinante, autant dans la gestion des mouvements que celle des combats. Il a montré qu’on pouvait simuler de façon décomplexée les mouvements et manœuvres d’aviation sans avoir à se prendre la tête avec de multiples tables. Mais bien sûr simplicité rime avec limitation (si, je vous assure que ça rime).

Le principal reproche des Grognards sur le jeu était que le résultat des tirs était prédéterminé, ce qui transformait les parties en jeu d’échec car il « suffisait » de bien se positionner pour endommager l’adversaire qui, s’il a fini son mouvement, ne peut éviter d‘être touché. L’autre gros problème est bien sûr la gestion de l’altitude, restreinte à seulement 2 niveaux, réduisant l’impression de vol. Néanmoins, l’ébauche de simulation du combat aérien est là mais effectivement le Grognard cherchant un peu plus d’immersion peut se sentir frustré.

Eh bien, ça tombe bien ! Il existe un jeu qui est le step-up (le niveau juste au dessus) de Fighters of the Pacific niveau complexité (pour le commun des mortels ça veut dire en gros qu’il y a des lancers de dés : Hourra !). Ce jeu c’est : Age of Dogfights WWI, le jeu combats aériens tournoyants durant la première guerre mondiale.

GET ON YOUR FLIGHT UNIFORM, BOB !

La promesse des auteurs, Predrag et Dragan Lazovic est particulièrement alléchante ! Comme le précise l’acronyme inscrit sur la boite : MCMD qui signifie Minimum Complexity Maximum Diversity. Nous verrons si cette promesse est tenue ! Pour la petite histoire, j’ai acquis ce jeu à la fabuleuse Punchedcon’ 23 de Coventry en mai 2023, j’ai lorgné dessus pendant les 3 jours de la convention et comme le dernier jour, il était toujours là : ben … j’ai craqué !

Donc Age of Dogfights WWI qu’est-ce que c’est ? Déjà c’est une boîte pesant 1,9 kg  d’après le site de l’éditeur ! D’où mon lumbago dès que je sors le jeu ! Le matériel est pléthorique ! Je vous mets le lien vers le site de l’éditeur pour que vous voyez ça.

Sans trop entrer dans le détail : il y a environ 70 pions avions (français, anglais et allemands) en plastique en forme d’hexagones, une centaine de supports d’altitude (dont les hauteurs correspondent à des niveaux d’altitude de 1 à 6), 3 cales de compensation d’inclinaison, 3 marqueurs de position initiale, 18 fiches d’avions, 5d6, des marqueurs représentant des zones d’objectifs, des nuages, des bateaux, les indicateurs vent/soleil, des panneaux de contrôle, 90 curseurs, des marqueurs photographie et bombes et j’en passe… Les auteurs semblent avoir penser à tous les cas de figure et ont tout mis dans la boîte !

Sur chaque fiche de personnage.. pardon, d’avion, on retrouve les caractéristiques suivantes : la nationalité et le type d’appareil, l’année de mise en service , une note d’équilibrage, un numéro d’initiative (le matricule), le type d’armement (puissance, localisation), la vitesse de base, le plafond de vol maximal, les capacités de montée et descente (différentes suivant le type d’appareil), la présence d’un effet gyroscopique ou non, la capacité ou non de faire des manœuvres acrobatiques et aussi des emplacements pour placer les curseurs indiquant le nombre de munitions dépensées et ceux indiquant combien de fois le plein régime a été utilisé.

A noter que chaque fiche correspond à 2 ou 3 avions du même type, ce qui réduit l’encombrement sur la table. De plus, ces fiches sont vraiment bien détaillées et claires et s’avèrent très particulièrement pratiques à l’usage : elles apportent un réel confort de jeu car sinon il faudrait lire les caractéristiques sur les pions qui sont de la taille d’un hexagone de taille normale ! Ouille les yeux ! J’ai mal à ma presbytie !

Concernant les avions, il a fallu coller les autocollants représentant les avions sur les pions hexagonaux (noirs pour les allemands et blancs pour les franco-anglais) et pour les bombardiers les coller sur les pions. Il faut faire de même avec les dés, je trouve que ceux-ci roulent un peu bizarrement mais ils font le job. C’est un peu fastidieux mais ça permet de réduire le prix du jeu et c’est torché en 2-3 heures devant la télé.

Les supports d’altitude peuvent parfois être tordus si, comme moi, vous les avez détachés comme un gros bourrin ! Néanmoins je pense qu’un séjour dans de l’eau chaude devrait suffire à les redresser.

ALORS COMMENT ON Y JOUE :  TURN THE ENGINE ON, JOE !

Age of Dogfight est donc un jeu de combats aériens tactique de combats durant la Première Guerre Mondiale comprenant trois modes de jeu : le combat aérien impliquant les avions de chasse (pions numérotés de 1 à 12), de la reconnaissance (les avions de reconnaissance sont ajoutés, pions numérotés de 13 à 15) et le bombardement pour lequel on ajoute les bombardiers (pions numérotés de 16 à 18).

La séquence de jeu est des plus classique sur le mode I go / you go : chaque camp active directement tous ses avions les uns après les autres. Il n’y a pas de phase de programmation comme dans Wings of Glory. Ici, c’est plutôt de la réaction directe aux mouvements de l’ennemi et cela me semble plus réaliste. En commençant par l’avion avec le plus petit numéro d’initiative, le joueur actif active ses avions un par un. L’initiative permet donc de connaître l’ordre dans lequel les avions vont bouger, ce qui peut parfois entraîner un comportement gamey de la part des joueurs.

L’activation d’un avion comprend un déplacement suivi d’un tir si on est en position favorable et le joueur non actif peut répliquer si sa position le permet. Puis une fois qu’il a activé tous ses avions, c’est au tour de son adversaire d’en faire autant. Chaque séquence de mouvement dure 10 secondes environ. Les avion se déplacent de point en point (voir photos) en fonction de leurs points de mouvement.

Ceux-ci se calculent en additionnant le facteur de mouvement de l’appareil plus le résultat du dé bleu si le moteur est en régime normal (de -1 à +2 de bonus en mouvement) ou du dé vert s’il est à plein régime (de 0 à +5 de bonus en mouvement) mais dont l’utilisation est limitée au risque d’endommager le moteur si on le pousse trop. Donc on n’est jamais sûr du nombre de points à chaque mouvement !

Grace à ces points de mouvement, vous gérez les virages et surtout l’altitude d’une manière vraiment simple : chaque montée d’un niveau d’altitude coûte un point de mouvement alors qu’en descente, vous gagnez un point de mouvement, et c’est tout ! Cette gestion de l’altitude s’insère dans le gameplay en toute simplicité. Pas de calculs ni tables alambiquées à consulter – et donc de cassage de neurones – ni d’interruption dans la fluidité du jeu ! Elle est gérée comme un virage à la verticale.

A noter que c’est à la fin de chaque mouvement qu’on indique si on veut changer d’altitude en inclinant son avion vers le haut ou le bas (fun) ! Une fois le changement d’altitude indiqué, on doit obligatoirement changer au tour suivant d’au moins un niveau d’altitude dans la direction annoncée. Une fois qu’on change d’altitude, on fixe l’avion sur le nouveau support d’altitude correspondant : encore un élément fun du plus bel effet sur la table et permettant de visualiser directement les hauteurs respectives de chaque appareil et donnant l’illusion de la 3e dimension.

Par contre, on ne peut pas changer d’altitude en cours de mouvement : cela peut paraître contre-intuitif mais je pense que c’est un parti-pris des auteurs pour éviter des manœuvres trop rapides de la part des joueurs. Un petit mot sur quelques particularités des mouvements et l’effet gyroscopique qui permet d’avoir un virage en plus si, lors du mouvement, vous ne faites que des virages dans le sens où tourne le moteur ou en moins si on ne tourne que dans sens contraire, ce qui permet de jouer avec le nombre de points de mouvement.

A noter qu’on ne peut pas finir son mouvement directement devant un autre avion et que les collisions sont interdites. Un marqueur de position initial permet de réfléchir à sa trajectoire sans perdre de vue le point de départ. Voilà en gros comment on gère le mouvement qui permet de se mettre en position de tir !

LOAD THOSE MACHINE GUNS FRANKIE !

Mais pour pouvoir vider les chargeurs de ses mitrailleuses, il faut trouver la bonne position de tir car toutes ne sont pas possibles : par exemple, le tir en arrivant de côté en avant n’est pas possible du fait de la vitesse des avions (ça a eu du mal à rentrer : comment ça on m’empêche de tirer d’où je veux !). En fait, c’est logique et raccord avec la réalité du combat aérien.

Pour les combats on lance 2D6 (ah !) et on regarde le résultat sur une CRT (re ah ! ça fait du bien !) qui comprend 2 colonnes dont les résultats dépendent de la position dans laquelle on se trouve par rapport à la cible : colonne A la plus destructrice et la B plus clémente, correspondant aux positions d’attaques moins efficaces.

Trois résultats sont possibles : manqué, détruit et endommagé. Dans ce dernier cas, il faut lancer un autre dé de dommage (yeah !) pour déterminer quelle partie de l’avion est touchée : ailes, gouvernail, mitrailleuses, et quel malus en découle : perte d’un ou deux points de vitesse, diminution de la capacité à tourner ou au pire impossibilité de tirer, ce qui est vraiment handicapant (ça m’est arrivé lors d’une partie !).

Ces dégâts sont indiqués par des marqueurs de couleurs différentes suivant le type de dommage, à poser sur l’avion lui-même ! Idée géniale ! Après ce premier tir, Il est possible pour l’avion attaqué de riposter une fois s’il possède un armement qui le permet. Puis l’attaquant, s’il est en position favorable (c’est à dire volant en parallèle et dans la même direction mais pas forcément à la même altitude) peut effectuer un tir en rafale (long burst) c’est-à-dire relancer une fois les dés de tir mais avec un plus grand risque d’enrailler ses mitrailleuses (sur un 2, 4, 6 ou 8 au jet de dé). Si un appareil prend 2 dommages au total, il est détruit, d’où l’intérêt de cette rafale.

DU CHROME OPTIONNEL A GOGO : THE SKY’S THE LIMIT !

Les règles optionnelles mais toutefois simples permettent d’ajouter du chrome, tels que le vent qui influe sur le mouvement, le soleil qui joue sur le tir, les nuages au travers desquels on ne peut pas tirer. Pour encore plus de chrome : on peut envisager la variabilité de ces facteurs optionnels (malus de tirs de -2 si soleil en face / -1 si de côté) Le vent qui pourrait souffler en bourrasque et pourquoi pas de la pluie.

Des manœuvres acrobatiques comme des Immelman, des split S voire des looping peuvent être utilisées lors des mouvements. Il est aussi  possible de faire évoluer le niveau de ses pilotes : de bleusaille à chevronné qui sont plus ou moins affûtés au tir et aptes à faire des acrobaties. Il existe aussi une table donne des malus de tir en fonction du différentiel de vitesse entre les avions.

Pour finir, le livret de règles contient quelques scénarios génériques :  reconnaissance, bombardement terrestre et maritimes. Il existe sur BGG une campagne sur Arras comprenant plusieurs scénarios que je n’ai pas encore joué.

FLYING HIGH !

En conclusion,  si vous recherchez un jeu d’aviation rapide aux règles simples mais pas simplistes avec un degré de simulation et d’immersion convenable, Age of Dogfights WWI est fait pour vous ! Il tient toutes ses promesses : minimum complexity ! Le système de jeu est simple, intuitif et fun. Les règles s’assimilent très vite. Seules les positions de tirs représentent une légère difficulté d’apprentissage du fait de leur nombres surtout. Mais rien d’insurmontable et c’est instinctif au bout de 2-3 tours.

La gestion de l’altitude est très intuitive et s’intègre sans heurt dans le gameplay, sans le ralentir ni le complexifier. Le système de combat est lui aussi simple et rapide. Effectivement, il y a la nécessité de chercher la bonne position de tir, d’où la comparaison avec le jeu d’échec mais ça traduit la réalité du combat aérien. Dès la première partie, j’ai été séduit par la simplicité et la fluidité du système !

L’autre point positif est l’ergonomie du jeu. Les panneaux de contrôle sont complets et clairs, un coup d’œil dessus et vous savez ce que vous pouvez faire. La pléthore de marqueurs permet de suivre toutes les caractéristiques des avions : que ce soient les munitions, l’état du moteur, les dégâts, l’altitude etc. Tout est fait pour faciliter la jouabilité !

A bord de vos avions, vous virevolterez  à la recherche de la position idéale pour abattre l’ennemi et pour éviter de vous faire descendre, il faudra jouer avec l’altitude pour échapper à l’ennemi. La durée des parties est assez courte et tourne autour de 2 heures. Pour créer ses propres scénarios, vous pouvez vous servir de la note d’équilibrage : chaque camp choisit ses appareil en additionnant ces notes en se fixant le même montant maximum de points à atteindre.

Pour le une diversité mmaximale, il existe de multiples extensions comprenant de nombreux autres avions. Enfin, la version pour la Deuxième Guerre Mondiale est attendue pour la fin d’ année avec la fameuse nécessité de s’incliner avant de tourner, des niveau d’altitude allant jusqu’à 13, la possibilité de piquer et des B-17… Que demander de plus sinon des frais de port non prohibitifs !

Auteur : Predrag Lazovic, Dragan Lazovic

Artistz : Predrag Lazovic, Dragan Lazovic

Editeur : Forsage Games

De 1 à 4 joueurs

De 30 à 120 minutes

Mitchpuru

Revenu au wargame et aux jeux de plateau en général à l'occasion de la pandémie mondiale. J'ai retrouvé les cartes avec des hexagones et les symboles NATO avec plaisir. J'apprécie le mélange de graphisme et de réflexion qu'apportent les jeux ainsi que les ascenseurs émotionnels que peuvent procurer les jets de dés.