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The Great War: Western Front

Dire que la Première Guerre Mondiale est une période sous-représentée sur nos machines est un euphémisme que Petroglyph a dû employer pour justifier son travail sur The Great War: Western Front. Certes, les purs et durs me rétorqueront qu’il y a quelques wargames très intéressants sur la période mais j’ai envie de leur dire : tant mieux et ça n’est pas le sujet, la nouvelle production éditée par Frontier Foundry jouant dans la catégorie stratégie temps réel.

Oui, je sais, ça m’a fait tiquer moi aussi : comment retranscrire en STR des batailles où généralement on envoyait de gros paquets de soldats mourir dans le no man’s land ou sous les coups d’une artillerie omniprésente ? C’est une tâche ardue et je pense que nos américains ont rempli leur mission, si on sait vraiment dans quoi on s’embarque. Mais faisons fi de toutes ces hésitations et voyons ce qu’il en est.

The Great War: Western Front vous propose deux campagnes sur le front de l’Ouest – une dans chaque camp – courant sur la durée de la guerre (même s’il est possible de débuter en 1916), une demi-douzaine de batailles historiques ainsi qu’un mode multijoueur. Il y a bien entendu un tutoriel qui, n’en déplaise à SAAvenger qui est allergique à ces bestioles, est indispensable à la bonne compréhension du titre.

En effet, celui-ci est découpée en deux phases principales : la partie stratégique, qui se déroule sur la carte représentant le front occidental, ainsi qu’une partie tactique – le côté STR donc – qui voit les armées s’affronter. La campagne débutant après les phases de manœuvre du début de la guerre, inutile d’espérer de beaux mouvements enveloppant, ce sera dans les tranchées que tout va se régler. Les conditions de victoire sont simples : soit prendre Paris – ou Kreuznach si vous jouez les Alliés – soit faire tomber à zéro la détermination de l’adversaire (qui fluctue avec les victoires et défaites).

La carte est ainsi divisée en hexagones représentant diverses régions qui ont chacune une valeur représentant sa valeur stratégique, symbolisée par des étoiles. Lorsqu’une région perd toute ses étoiles, elle est conquise par le camp adverse. Le hic ? Une étoile n’est enlevée qu’après une victoire majeure. Et une région récupèrera une étoile perdue entre chaque tour. Il faut donc attaquer une région suffisamment de fois pour lui faire perdre toutes ses étoiles durant le même tour, sachant que les troupes présentes dans une région ne peuvent attaquer qu’une seule fois par tour.

Ce qui, comme vous l’aurez compris, vous obligera à masser des troupes non pas dans une région, mais bien dans un maximum de régions autour de celle que vous convoitez. Et que la conquête d’un hexagone est tout sauf rapide… Sans oublier que si vous ponctionnez des troupes d’un endroit pour en renforcer un autre, vous vous mettez en difficulté dans les territoires affaiblis. Oui, on peut dire The Great War: Western Front exploite bien son sujet.

Il va donc falloir jongler avec les ressources. A chaque tour, vous recevez des réserves en or, générées par les pays de votre alliance. Cet or va servir à acquérir de nouveaux avions ou chars, mais aussi – et surtout – va être convertir en ravitaillement, qui est le nerf de la guerre. En effet, tout dans The Great War: Western Front nécessite du ravitaillement, que ce soit sur la carte stratégique ou tactique.

Vous voulez construire un hôpital de campagne dans une région? Ou un aérodrome ? Ça va vous coûter du ravitaillement. Absolument tout coûte cher et il n’est guère possible de tout faire.

Parallèlement à cela, vous aurez un arbre technologique à avancer, divisé en 6 branches. Si sur papier il permet de rechercher absolument tout et n’importe quoi, les points de recherche sont bien trop rares pour faire tout ce que l’on veut et il y aura malheureusement des pans entiers que vous devrez ignorer. C’est un peu dommage et frustrant.

Si la carte stratégique permet donc le mouvement des troupes, la construction de dépôts et autres bâtiments renforçant les régions, rien ne vaut une bonne vieille bataille pour expliquer au gars en face ce que l’on pense. Et désolé de vous l’annoncer sans détours : ça va mal se passer pour vous au début. Parce que l’apprentissage de The Great War: Western Front est rude et chaque erreur se paye cash.

Que vous soyez l’attaquant ou le défenseur, chaque bataille débute de la même manière : le placement des fortifications, abris, tranchées et autres nids de mitrailleuse autour de points à défendre.

Chacun de ses points permet l’intervention de renforts et les conquérir permet de remporter la bataille. Puis vous saupoudrez d’artillerie lourde ou légère, rajoutez ici et là quelques troupes et des ballons d’observation et si vous êtes taquin vous pouvez faire une préparation d’artillerie. Et ensuite seulement vous passez à la bataille proprement dite. Je dis ça mais il ne faut pas pour autant minimiser l’importance de cette phase de préparation.

Utilisez trop de ravitaillement en mettant trop de défenses, vous serez bien embêté pour la suite. Pareil pour les troupes placées dans la phase de préparation : si elles coûtent moins cher, elles sont vulnérables aux tirs de préparation. Faites-les intervenir plus tard, leur prix aura doublé… Tout est affaire de décision et surtout d’utilisation judicieuse du ravitaillement. Encore et toujours lui !

Vous placez une batterie de canons ? Du ravitaillement. Vous voulez faire intervenir cette batterie ? Encore du ravitaillement. Il est donc possible, en n’équilibrant pas assez bien (ou en étant trop généreux dans ses dépenses) de ne plus pouvoir tenter quoi que ce soit, faute de ravitaillement…

La phase de bataille est quant à elle assez classique une fois qu’on a compris les grands principes : une compagnie d’infanterie n’a aucune chance si elle attaque une tranchée occupée. Chaque camp possédant sur la carte plusieurs zones de contrôle qui seront lourdement défendues, il va falloir pour chaque point ramollir la défense avec l’artillerie et monter à l’assaut derrière un barrage roulant (s’il a été débloqué) ou en profitant de la suppression.

Il y a un vrai timing à acquérir et c’est loin d’être évident, le moindre clic malheureux entraînant le décès de dizaines de soldats. On remarquera toutefois bien vite qu’il est plus facile d’attaquer sur un bord de la carte pour déborder un point pour ensuite prendre le reste des défenses par derrière., si on en a encore les moyens.

Les batailles demandent donc beaucoup de concentration si on veut une victoire majeure, mais il est bien plus fréquent de demander un cessez-le-feu pour arrêter l’hémorragie… Et tout recommencer avec une autre armée.

The Great War: Western Front est donc un jeu avec deux facettes. Une stratégique, plaisante pendant laquelle on pourrait faire beaucoup de choses… si on en avait les moyens. Oubliez les opérations simultanées sur plusieurs fronts ou les grandes percées héroïques, là tout sera lentement orchestré et surtout réalisé. Et une tactique avec des phases de batailles épuisantes et longues qui, si elles peuvent être résolues automatiquement, doivent être jouées manuellement pour espérer un meilleur résultat.

Le fait que tout nécessite du ravitaillement – ce qui est tout à fait logique – pousse le joueur à soigneusement planifier et exécuter ses actions. Ce qui pourrait sembler contre-nature avec la notion même de STR. Heureusement d’ailleurs que le jeu permet d’utiliser une pause active et de moduler la vitesse. Il faut avoir un œil partout et il n’est pas rare, en restant concentré sur un coin de la carte, de s’apercevoir que l’IA en a profité pour anéantir des défenses de l’autre côté.

The Great War: Western Front n’est pas un jeu que je recommande à tout le monde. Il est très exigeant d’une part, avec un côté très punitif lors des batailles et d’autre part, la conquête d’une région et le développement technologique sont tellement lents qu’il risque de faire hurler de rage les plus impatients. Mais quelque part, c’est la guerre des tranchées qui veut ça donc en tout objectivité on ne peut pas dire que les développeurs aient raté le coche.

Petroglyph m’avait beaucoup déçu avec Conan Unconquered mais avec The Great War: Western Front ils parviennent à livrer un titre solide qui ravira ceux qui parviendront à s’investir. La difficulté est réelle, la courbe de progression très raide et on ne lancera pas une partie pour se changer les idées le soir en rentrant du boulot. Mais si on aime la planification sur le long terme, il y a un grand potentiel !

Genre : Stratégie

Développeur : Petroglyph

Editeur : Frontier Foundry

Date de sortie : 30 Mars 2023

Prix : 34.99€

Testé sur une version presse fournie par l’éditeur

Harvester

Collectionneur compulsif et un peu trop passionné, accumule jeux et livres en essayant d'entraîner un maximum de gens dans ses vices...