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Strategic Command: World War I

« Ton intro sent le réchauffé » me sort le chef alors que j’avais à peine écrit deux lignes. Il avait pas tort et j’avoue que c’est un peu le sentiment que j’avais face à Strategic Command: World War I. Certes, il n’y a pas beaucoup de wargames sur la première guerre mondiale, évidemment ça fait envie, mais après tout le gameplay, comparé aux opus précédents, n’est-il pas le même ? Y avait-il assez de nouveautés pour en justifier l’achat ? J’hésitais donc mais Slitherine nous ayant fourni une clé, je n’ai pas hésité longtemps, hein chef ? (NdHarvester : t’es un bon petit, j’ai même pas eu besoin de te menacer cette fois-ci)

En route, grosse troupe!

Cette fois ci, la carte est moins grande que dans Strategic Command WWII: World at war vu qu’ici le jeu se focalise sur les trois fronts majeurs (Ouest, Est, Balkans) mais elle est très agréable à naviguer, avec une échelle un peu moins petite (le Luxembourg fait ici 2 hexes au lieu d’un seul !). La lisibilité de la carte et la simplicité générale de l’interface sont d’ailleurs des points forts du titre.

Les events historiques sont nombreux et appréciables

Pour un wargame, c’est assez simple à prendre en main et à jouer : il n’y a qu’un seul type de ressources (MPP = ManPower Points) qui sert autant à la recherche qu’à la diplomatie et l’achat de nouvelles troupes. Si Diplomatie il y a, elle vise principalement à essayer de faire pencher les pays limitrophes dans la balance d’un côté ou de l’autre, on est plus dans l’abstraction de mécanismes que dans la grande stratégie. Ce côté très « pourcentage » avec très peu d’influence au final de la tournure de la guerre est un peu dommage, voir la Norvège se plaindre tous les tours des attaques du Royaume-Uni sur leur navire et ne pas se rapprocher beaucoup des puissances centrales est un peu dommage.

On investit des points dans une recherche et puis on espère qu’elle avance suffisamment vite.

La particularité principale du titre par rapport à d’autres wargames, c’est que vous contrôlez ici non pas un seul pays mais bien tous les pays majeurs qui sont du côté choisi (la Triple Entente ou les Empires Centraux donc), les pays mineurs sous votre contrôle seront eux assujettis à un pays principal, c’est donc l’Allemagne qui s’occupe de la production des Pays-Bas si ceux-ci la rejoignent dans la guerre. Cela peut-être perturbant au premier abord et on a peut-être plus de mal à « s’identifier » (à défaut de terme adéquat) aux belligérants en début de partie, surtout que certains pays sont loin d’être prêts ou utiles au premier abord. Alors évidemment, les ressources ne sont pas partagées, ni le moral et il faudra donc assurer le suivi de chacun pour éviter un effondrement d’un front ou un retard technologique trop important.

Sprites ou NATO counters c’est votre choix, question de préférence et de lisibilité.

Pas question ici de trop mélanger les troupes non plus, c’est possible mais risqué car une grosse partie de la gestion de vos armées vise à assurer un ravitaillement adéquat pour combattre et donc une bonne communication entre les troupes et leur QG. Le terrain ne pardonne pas, ni la bonne sécurisation des lignes de ravitaillement, il faudra donc les suivre au mieux et tenter de couper celles de l’ennemi.

Coupez ! C’est dans la boîte.

Comme dans tout wargame qui se respecte, les manœuvres d’encerclement sont cruciales, la difficulté ici tient à l’échelle et au nombre de troupes à votre disposition. Par la définition du conflit, l’Entente aura obligatoirement plus de troupes que les Puissances Centrales, et ce sera donc votre agressivité et votre vitesse qui seront essentielles si vous jouez celles-ci. En général, je joue de manière plus défensive et ai donc tenté une stratégie de ralentissement côté ouest pendant que je m’occupais des Russes. Si ça a superbement marché côté Russe, ce ne fut pas le cas côté Français, qui n’ont pas hésité à déclarer la guerre à la Belgique puis aux Pays-Bas pour tenter de me contourner. Enfin je dis tenter mais avec l’aide des Anglais et l’apport incessant de troupes sur ce front, le mien a fini par se briser.

Niveau production, ça manque un peu de troupes pour assurer ma survie à long terme mais je fais avec ce que j’ai.

A ce niveau, il m’est arrivé plus d’une fois de pester contre l’équilibrage du scénario, alors que je peinais à avoir suffisamment de points à disposition pour ne fut-ce que faire une seule dépense après avoir renforcé et amélioré mes troupes sur le terrain, l’ennemi lui baignait dans une production forcenée et ce sans même le soutien réel des Etats-Unis ou de l’Italie. Je pense d’ailleurs que les devs en sont conscients vu qu’un autre scénario propose lui de rajouter l’Italie du côté des Empires centraux dès le départ. Après, il ne faut pas lire ce que je n’ai pas dit, jouer l’Entente ne sera pas spécialement un mode facile car s’il y a bien une chose que l’IA sait faire, c’est être agressive.

Percée française à travers les Pays-Bas.

L’IA sait exploiter vos faiblesses et va toujours se focaliser sur les troupes les plus faibles, qui ne sont pas retranchées ou qui n’ont pu être renforcées. Le jeu se jouant au tour par tour, les combats sont assez onéreux en hommes. En effet, le meilleur moyen d’attaquer c’est déjà de le faire du côté où l’ennemi n’a pas creusé de tranchées – car oui on peut déterminer le côté où les tranchées seront creusées et c’est vital – mais surtout arriver à attaquer suffisamment en un tour pour que l’unité ne puisse ni se ravitailler ni se retirer au tour suivant. Il faudra donc assurer un roulement d’unité sur le front qui va à nouveau avantager le côté avec le plus de troupes.

Metz aura tenu plus de deux ans sous les coups de butoir de l’ennemi mais l’apparition d’une unité blindée aura changé la donne.

Ce système de combat est aussi particulièrement dévastateur sur mer, le moindre navire, peu importe sa force, pourra en effet se faire détruire si l’ennemi décide de l’attaquer et de se retirer pour laisser la place à un autre de ses navires jusqu’à la réussite de son action. A ce niveau, il aurait peut-être utile d’abstraire certains navires plus petits pour permettre la formation d’escadres, mais le tout permet aussi des affrontements plus violents et donc plus dynamiques que ce soit sur terre ou sur mer.

Mes côtes sont sûres, ce qui n’empêche pas les destroyers ennemis de tenter de poser des mines.

Chaque tour, vous devrez donc décider si vous renforcez vos positions ou tentez d’avancer, sachant qu’il vous faudra rapidement prendre avantage de toute ouverture sous peine de perdre tous les efforts qui ont amené à celle-ci. Le jeu en devient très addictif, on prépare, on regarde les actions de l’ennemi et puis on lance notre attaque, il devient presque impossible alors de résister à l’envie de lancer le tour suivant afin de voir comment l’ennemi réagit. Ce côté « encore un tour » est très très prenant, tout du moins tant que les dés ne sont pas jetés sur l’issue du conflit.

Avec le brouillard de guerre difficile de savoir ce qui m’attend

Le jeu a ses petits défauts, tels que l’artillerie étant presque inutile en début de partie mais vite très meurtrière ensuite, l’aide sur les « hot keys » pas mis à jour (c’est shift+clic pour inverser l’emplacement de deux troupes, touche on ne peut plus vitale mais uniquement visible dans le manuel), l’impossibilité de détruire les mines navales sans se les prendre dans la tronche (NdHarvester : technique belge de déminage ça…), les déplacements trop rapides dans le désert mais rien qui empêche vraiment de prendre du plaisir, surtout que si l’équilibrage ne vous convient pas, il est possible de paramétrer la difficulté en début de partie.

Résumé des pertes, les russes s’en prennent plein la tronche

A noter quand même qu’au bout d’un certain nombre de tours, l’exécution de ceux-ci peut prendre un certain temps si le total des troupes à gérer par l’IA est important. Après c’est un peu inhérent au genre si on veut une IA un peu capable. Je n’aurais pas non plus craché sur un scénario permettant une montée en puissance avant de déclencher la guerre mais vu que le jeu permet les mods, qui sait ce qui sera disponible dans le futur.

L’orientation des tranchées, le moral, l’expérience, tout joue!

Strategic Command: World War I est un très bon opus pour ceux qui voudraient se lancer dans les wargames, facile à prendre en main, offrant un gameplay assez proche de Panzer Corps tout en divulguant petit à petit la complexité de ses mécanismes. Pour les vétérans du genre, ils doivent probablement déjà savoir s’ils vont craquer ou pas car le principe est presque totalement identique aux deux précédents opus (heureusement il y a 25% de réduction pour les possesseurs de celui-ci).

Une petite percée au Nord là et hop.

Personnellement, je trouve que les mécanismes s’adaptent parfaitement à la première guerre mondiale, avec ses fronts figés, les tranchées et les attaques meurtrières sans résultats. L’IA offre un réel challenge si vous n’arrivez pas à imposer le tempo dès le départ et vous quitterez le PC, beaucoup trop tard et à regret tout en pensant à vos prochaines actions. Bref si vous avez toujours rêvé de lancer vos troupes à l’assaut des tranchées ennemies, n’attendez plus. Sifflez l’assaut !

Genre : Wargame

Développeur : Fury Software

Editeur : Slitherine

Prix : 33,99 €

Date de sortie : 5 décembre 2019

Testé sur une version presse fournie par l’éditeur

SA_Avenger

Le Belge taciturne du groupe, pas fan de quoi que ce soit mais touche-à-tout aux goûts éclectiques, amoureux du cinéma, de littérature et de chanson française à texte, bref un nostalgique invétéré. Ancien beta testeur hardcore, je joue encore régulièrement à des jeux obscurs aux règles complexes que je termine d'ailleurs rarement.