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Silicon City

Le monde court à sa perte. Je suis désolé de vous plomber l’ambiance mais on est mal. Le dérèglement climatique est bien engagé, les guerres un peu partout, le manque d’eau, j’en passe et des pires. Bref, il ne nous reste plus que nos yeux pour pleurer, commencer à s’entraîner à filtrer son urine et à repriser ses chaussettes. Oui c’est moche. C’est donc en cette époque troublée, où le recyclage est présenté comme une façon efficace de freiner la course à la consommation, qu’il est important de se poser la question : doit-on faire du neuf avec du vieux, et si oui comment ?

Et ça tombe bien puisque c’est justement la question que se pose Silicon City, un city builder très inspiré par Sim City (jusque dans son titre) de chez Polycorne, un studio indé d’Annecy. Alors simple recyclage, hommage appuyé ou recréation intelligente ? Ont-ils réussi à transformer le vieux guéridon de Mamie en bout de canap’ ultra design tellement classe pour accueillir un Macbook Pro ? C’est ce qu’on va découvrir dans un nouvel article 100% pas recyclé.

Let’s go party

Au départ, vous pouvez faire le mode histoire. Il s’agit bien entendu d’un tutoriel, mais qui a le bon goût de se présenter en 5 étapes simples et efficaces, qui vous donneront les bases pour bien débuter dans la construction et la gestion de votre ville. Là encore, rien de bien compliqué pour quelqu’un d’habitué au genre. Se finissant en une petite heure, ce mode permet de rentrer rapidement dans le vif du sujet.

Silicon City reprend l’ensemble des codes du city builder. Taille de la carte, modification du biome, formes aléatoires de l’environnement, paliers de difficulté, on est en terrain familier. Puis un choix s’impose : jeu classique ou bac à sable. Comme souvent, la différence entre les deux se fera au niveau de la mécanique économique et des bâtiments disponibles au départ. En effet, le mode bac à sable vous libère des basses considérations financières et vous laisse construire votre ville comme bon vous semble avec l’ensemble des moyens disponibles directement.

Petite fonction bienvenue, si une carte vous plaît particulièrement, vous pouvez en récupérer sa « seed » (son numéro d’identifiant unique) pour la partager. Là encore rien de révolutionnaire, mais c’est toujours agréable de voir que cette fonction est bien présente.

Hit the town

Le début est modeste, on place une zone résidentielle, une zone agraire, une zone d’activité économique, une éolienne pour l’énergie et des routes pour relier le tout. La ville, tout juste un village en réalité, n’offre que peu de possibilité d’extension. L’apprentissage se fait petit à petit et la complexification de la gestion de la ville n’arrivera que par la suite. Les premiers habitants arrivent, la ville se construit et s’anime sous vos yeux de grands enfants.

Silicon City vous propose plusieurs niveaux de gestion. Tout d’abord, la ville dans son ensemble avec des tas de données très complètes sur le marché du travail, la gestion de l’énergie, le bonheur de vos concitoyens ou leur couverture santé. Puis la gestion bâtiment par bâtiment, chacun d’entre eux possédant sa propre fiche technique et donc ses propres paramètres dont il faudra tenir compte. Enfin vous pourrez suivre tous vos citoyens individuellement, et même interagir avec eux, comme un bon maire sait le faire !

Maintenir un bonheur élevé est très important. D’une part pour attirer des nouveaux citoyens, d’autre part pour éviter de vous faire jeter aux prochaines élections. Oui il y a des élections, et pour les gagner il faut que vos citoyens soient heureux grâce à vous. C’est pourquoi vous ne devez pas seulement faire une ville efficace mais également leur proposer une ville avec des parcs, des loisirs, des soins, etc.

You can act like a star

Vous avez un outil très efficace pour appréhender les désidératas et l’état général de chaque habitant : les réseaux sociaux. En effet, nos petits êtres siliconés sont accros à Faceblock, Winked In et Barkr dans lesquels nous reconnaissons nos lieux virtuels à décérébrer préférés. Le premier servira principalement à connaître l’humeur, les plaintes et les joies du citoyen, le second son statut social, le troisième vous permettra d’échanger avec le citoyen et de savoir ce qu’il aimerait plus spécifiquement, ou d’avoir une idée de ce qui se passe au quotidien autour de lui.

Tout ces éléments seront à prendre en compte, ou à ignorer royalement, suivant la direction dans laquelle vous voulez faire évoluer votre ville. La contrainte principale, en plus de la réélection, restera économique puisque plus les bâtiments seront d’un niveau élevé (Bibliothèque, Cinéma, Musée, etc.) et plus ils coûteront chers. Faire plaisir au peuple oui, mais faudrait pas se retrouver sur la paille non plus !

Les mécaniques de gameplay sont bien plus profondes que l’aspect « mignon-rigolo » de Silicon City ne le laisse présager. Et au-delà des points abordés, vous pouvez régler finement tout l’aspect imposition (par secteur d’activité s’il vous plait), faire des prêts à la banque en cas de difficulté, mais aussi gérer votre popularité et même faire des sondages !

Life in plastic

Puisqu’on évoque les graphismes, et comme vous pouvez le voir sur les screenshots qui accompagnent cet article, le choix a été fait d’une direction artistique colorée composée de grands aplats de couleurs unies et bien tranchés. Les personnages sont des petits rectangles de silicone. Tout concourt, des arbres aux routes, à cet aspect plastique prononcé. C’est à la fois très esthétique, même si clivant, et plutôt malin. Les ressources ne sont pas accaparées par un rendu photoréaliste et peuvent être dirigées vers d’autres priorités, comme la fluidité de tout ce petit monde ou la grande qualité des éclairages (le crépuscule avec la ville qui s’illumine petit à petit est à tomber par terre).

Autre petit effet bien sympathique, vous pouvez choisir votre vue dans les options. Le jeu vous propose de basculer entre la vue moderne habituelle, où l’on virevolte à l’envie avec sa caméra, mais aussi la vue que nous appellerons « 90’s » c’est à dire en 3D isométrique quasiment fixe, et enfin la vue « 80’s » vue de dessus. La prouesse étant que chaque vue est parfaitement jouable. Il devient donc agréable, mais pas indispensable, de passer de l’une à l’autre. À chacun de trouver celle qui lui conviendra le mieux.

Une musique low-fi, qui a le bon goût de se faire discrète, accompagne la partie. Là encore un très bon point, puisque ce genre de jeu nous fait rester des heures devant notre écran. Il en va de même pour l’habillage sonore qui sait se rendre utile dans la reconstruction mentale du jeu, sans pour autant devenir crispant.

It’s fantastic!

Je pourrais vous parler encore pendant des heures de la personnalisation des bâtiments et de leur architecture procédurale, de la politique à base de popularité et de clientélisme, de la gestion de l’économie ou tout simplement du plaisir qu’on a devant une ville qui fonctionne.

Alors bien sûr ce n’est pas un City Skylines avec son offre pléthorique, mais c’est un excellent city builder. Avec ses multiples niveaux de difficulté et son mode bac à sable ultra permissif, il est accessible à tous. Totalement conscient des standards actuels, il propose une intégration Twitch poussée que nous nous empresserons de tester en live dès que possible.

Comment vous dire que j’aime ce titre ? Intelligent, mignon, calme, exigeant dans ses plus hauts niveaux de difficulté, Silicon City est une franche réussite. Sa DA couplée à une inventivité dans la continuité des grands classiques du genre a su faire vibrer ma corde nostalgique tout en apportant un vent de fraîcheur à un genre trop souvent bloqué dans le « toujours plus ». Vous ne le savez pas encore mais il vous le faut, car le studio Polycorne a brillamment prouvé que oui, on peut faire du neuf avec du vieux.

Genre : City Builder

Développeur : Polycorne

Editeur : Polycorne

Date de Sortie : 22 juin 2023

Testé sur une version presse fournie par l’éditeur

CekterDown

Fasciné par Sherlock Holmes et le mythe de Cthulhu, j'aime également la science-fiction et tout ce qui s'y rapporte, je ne réponds qu'aux superlatifs et ne désespère pas qu'on me voue un culte un jour. J'aime surtout m'entourer de gens plus talentueux que moi.