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Tortuga: a Pirate’s Tale

Avant Tortuga: a Pirate’s Tale, le dernier jeu de pirates auquel j’avais joué était A Sea of Thieves avec la pire équipe de bras cassés possible : la rédaction de Dystopeek. Autant vous dire que c’était le bordel, que nous n’avions pas beaucoup progressé dans les quêtes mais que fort heureusement, nous avions beaucoup voyagé, chanté et… récupéré de poules. Ne cherchez pas, une vieille obsession dont je pensais m’être débarrassé.

C’est donc avec de grandes attentes que j’ai lancé Tortuga: a Pirate’s Tale. Je rêvais de quêtes épiques, de grandes expéditions et de belles batailles, d’une aventure qui me ferait oublier ma solitude. Est-ce que Gaming Mind Studios a réussi son coup ? Est-ce que l’exclusivité sur Epic Games Store importe encore à quelqu’un à part Ruvon et Evilblacksheep ? Pourra-t-on prendre des cuites au rhum ? Des questions auxquelles je vais tâcher de répondre…

En plein âge d’or des pirates, vous vous retrouvez dans les Caraïbes à la recherche du trésor de la flotte espagnole. Forcément, comme vous êtes un peu tout seul à bord d’une coquille de noix, il va falloir recruter et vous enrichir. Comme prévu le scénario ne casse pas trois pattes à un perroquet mais bon, les meilleures histoires de pirates sont celles qu’on se raconte.

Vous voilà donc dans votre port de départ, appartenant à une des factions principales du coin (France, Angleterre, Pays-Bas ou Espagne), des étoiles plein les yeux et les poches pleines. Pour vous faire un peu d’argent de poche, plusieurs possibilités s’ouvrent à vous : commercer (yerk !), faire le taxi (mouais), escorter des convois (ah, c’est mieux) ou même en intercepter (ah ben voilà !). Vous pouvez prendre des missions chez les différentes factions, sachant que vos actions auront une influence, positive ou négative.

Vous voilà parti en pleine mer, équipage complet et cale ne demandant qu’à être remplie – prenez quand même des provisions, on sait jamais. Si la haute mer est bien vide, il n’en est pas de même le long des côtes où des dizaines de convois se croisent dans tous les sens.

Pour en intercepter un, rien de plus facile : hissez le pavillon noir et… ah, raté, il s’est barré. Une fois que vous aurez compris qu’il faut être capable de rattraper un convoi pour pouvoir l’attaquer, place à la bataille.

Vous aurez remarqué que depuis le début je vous parle de convois. J’aurais pu dire flotte aussi. Sur la carte globale, tous les convois sont représentés par un seul petit bateau et fournissent les informations suivantes : nombre de vaisseaux, puissance totale et nationalité. Vous savez donc à quoi vous attendre, même si le type exact de bateau est inconnu.

Une fois le combat engagé, vous basculez sur une carte tactique découpée en hexagones et représentant la zone du monde où l’interception a eu lieu. Cela veut dire que si vous étiez le long d’une côte, il sera moins possible de manœuvrer.

Le camp ayant l’initiative va commencer par faire agir tous ses vaisseaux, puis son adversaire, puis… jusqu’à ce que mort s’ensuive. Parce que non, dans le monde de Tortuga: a Pirate’s Tale, on ne se rend pas, on coule avec son navire.

Chaque bâtiment peut, lorsque c’est à lui de jouer, bouger puis tirer ou passer à l’abordage. Le nombre de cases parcourues lors du déplacement va dépendre des caractéristiques du bateau et du sens du vent. Quant aux différentes attaques, elles vont coûter un certain nombre de points d’action dépendant de votre capitaine et de vos marins. Si votre équipage est décimé, vous ne pourrez quasiment rien faire, vos marins n’étant pas assez nombreux pour diriger le navire, recharger les canons et tirer avec.

A l’abordage !

Comme nous sommes dans du combat naval, il ne faut pas oublier que vous avez deux bords, chacun équipé de canons. Donc oui, si vous vous mettez entre deux navires, vous pouvez tirer sur chacun d’eux. Mais ça ne serait pas forcément l’idée du siècle. Parce que si vous avez différentes couches de blindage (et chaque zone est indépendante : bâbord, tribord, proue ou poupe) pour vous rassurez, votre adversaire pourrait s’en prendre aux voiles pour vous handicaper. Ou détruire votre blindage d’un côté pour tuer votre équipage à coup de mitraille.

Sous ses airs de jeu d’action, Tortuga: a Pirate’s Tale présente en fait des combats tactiques très intéressants, à défaut d’être réalistes (mais bon, ça on s’en fiche un peu). Si au début ils ne sont guère passionnants, quand vous monterez en puissance et que vous aurez des vaisseaux de ligne surarmés ou des bateaux avec de multiples ponts, il va falloir réfléchir et optimiser.

J’aime personnellement équiper chaque navire d’un mortier pour détruire directement la coque (le blindage ne pouvant rien) des petits vaisseaux pendant que je monte à l’abordage des plus gros. Pendant que les combats font rage sur le pont (via différents choix tactiques offrant des pourcentages de succès différents pour des résultats variés), le reste de mes vaisseaux arrose ce qui reste à flot avec des canons à courte portée.

Parce que oui, mille fois oui, on peut personnaliser les navires dans Tortuga: a Pirate’s Tale. Et c’est d’ailleurs le plus marrant. Monter à l’abordage, soumettre l’équipage, récupérer le vaisseau dans sa flotte et l’amener au port pour mettre de nouveaux canons, de meilleures voiles ou même des hamacs.

Certains canons sont efficaces de loin, d’autres sont polyvalents, d’autres sont dévastateurs à courte portée mais ne valent pas tripette de loin… Il faut connaître les caractéristiques de vos navires et toujours vous placer idéalement pour exploiter au mieux votre armement. Heureusement, une aide visuelle est offerte quand vous planifiez votre déplacement.

Comme je vous le disais, une fois la bataille gagnée, vous pouvez récupérer les marchandises, quelques marins désireux de changer de camp et bien sûr repartir avec les navires que vous n’aurez pas coulés. Et même si c’est le plus risqué (mais quand même le plus rapide), vous allez devoir capturer un maximum de navires pour les revendre et vous faire de l’argent, la revente de marchandises n’étant pas très lucrative.

On passe son temps à parcourir les mers à la recherche de cibles d’opportunité ou d’un adversaire désigné par une mission, on fait escale ici et là pour réparer et on enrôle des marins à la taverne. C’est d’ailleurs là que l’on va faire la chose la plus risquée du jeu : partager le butin… En effet, de temps en temps et surtout quand vous voulez utiliser vos points d’expérience pour débloquer de nouvelles capacités, il va falloir diviser l’argent gagné.

Le truc c’est que vous marins en veulent toujours plus et qu’ils vous font promettre des choses. Cela peut être de couler 20 navires, de recruter 1000 marins… Accomplir ces mini-objectifs vous offrira du crédit au prochain vote, les rater vous en fera perdre. Oui vous avez bien lu : vote. Vos hommes vous reconduisent dans vos fonctions si vous dépassez les 50% d’approbation, sinon c’est merci bye bye !

Seul souci avec ce système : les demandes sont de plus en plus conséquentes et bien souvent très difficiles à remplir, à moins de rester des semaines en mer, ce qui fait baisser le moral, ce qui vous oblige à faire plus de promesses qui vous font rester trop longtemps en mer… Un cercle vicieux qui vous oblige à être prudent et raisonnable dans vos promesses et à répartir régulièrement le butin.

Il en est de même avec vos capitaines – vous pouvez en avoir cinq au maximum – qui dirigeront chacun un navire et qui ont tous une petite série de quêtes secondaires sympathiques. Si vous faites trop de trucs qui leur déplaisent (commercer, embaucher des Espagnols…) ils quitteront votre flotte. Il faut donc toujours surveiller la jauge de moral ainsi que les finances, même si ce dernier point ne devient très vite plus un souci.

Bôôôô !

En plus de toutes les factions et de tous les ports disséminés dans les Caraïbes, vous trouverez aussi des factions de pirates. Triomphez de leur flotte puis de leur repaire et celui-ci sera à vous. Libre à vous d’y construire différents bâtiments pour vous en servir comme base secondaire (et faire des voyages rapides, vite indispensables).

De manière anecdotique, sachez qu’il est aussi possible d’attaquer les ports : vous devez triompher de la flotte qui le défend puis ensuite, à l’aide de choix textuels, accomplir la mission voulue (kidnapper le fils du gouverneur, mettre à sac la taverne…). Ce n’est pas vraiment l’activité la plus intéressante et elle ne rapporte pas tant que ça.

Des mers superbes, des côtes verdoyantes, des bateaux finement modélisés avec des marins qui s’activent en chantant, Tortuga: a Pirate’s Tale est un plaisir pour les yeux, même si vos oreilles ne seront pas trop gâtées par une bande son quelconque. Niveau technique presque rien à redire non plus, j’ai eu en 20h de jeu un seul crash, heureusement sans conséquence, et un bug étrange qui m’a obligé à changer plusieurs fois ma configuration de touches avant de m’autoriser à déplacer mon navire.

Tortuga: a Pirate’s Tale mériterait-il un Dystoeseal ? J’avoue y avoir cru au début mais en creusant plus, je me suis rendu compte qu’il est victime de défauts qui le pénalisent sur le long terme. Tout d’abord, il n’est pas possible de passer les batailles navales et c’est franchement pénible au bout d’un moment, quand vous avez des capitaines suicidaires qui jettent leurs quatre barques moisies contre vos galions. Les batailles s’enchaînent, se ressemblent, le plaisir de la découverte a disparu mais il faut vous y coller pour récupérer des navires à revendre pour faire plaisir à vos hommes. J’avoue que je ne m’attendais pas à autant de grind dans un jeu comme ça…

Ce qui me fait râler sur l’IA adverse aussi, qui a tendance à être suicidaire et à venir se coller au milieu de votre flotte. Impossible aussi de voir vos ennemis se rendre, il faut aller au bout de la bataille alors que tout est perdu pour un camp…

Le principe même du jeu – surtout en se focalisant sur la vie à bord et en occultant le pan terrestre – devient aussi lassant à force. On en vient à prendre en même temps des dizaines de quêtes pour avoir toujours quelque chose à faire, quel que soit le port visité. Ça pète un peu l’immersion et surtout si comme moi vous n’avancez pas la quête principale en même temps, vous vous retrouvez avec une armada face à des adversaires faibles.

N’espérez pas non plus être happé par l’écriture, le scénario s’avérant ultra conventionnel. Ultime coup de gueule : on ne peut pas annuler un choix pendant les batailles. Je ne compte pas le nombre de misclicks qui m’ont mis dans l’embarras, surtout que la lisibilité n’est pas toujours idéale.

L’un dans l’autre, Tortuga: a Pirate’s Tale est un jeu que je ne peux que recommander aux amateurs de pirates et combats tactiques. Les batailles sont très originales, avec de nombreuses capacités de capitaine permettant des approches variées, surtout quand vous arrivez à bien les personnaliser. C’est d’ailleurs un grand pan du jeu, ce tweaking de navires et de personnages et on se prend à tester de nombreuses configurations pour voir celles qui conviennent le mieux.

Certes on peut se lasser de n’avoir que si peu d’activités différentes – mais ça n’est pas un RPG mais juste un jeu d’action – mais j’y ai joué une quinzaine d’heures de suite en quelques jours avant de commencer à bougonner en voyant une flotte pirate essayer de m’intercepter.

La durée de vie est énorme, avec des dizaines de missions à accomplir pour chaque faction, autant de planques à conquérir et de capitaines avec leurs quêtes annexes. Franchement, il serait dommage de passer à côté, sauf si vous êtes allergiques aux phases de grind qui, je l’avoue, peuvent être particulièrement pénibles. C’est un risque à prendre…

Développeur : Gaming minds studios

Genre : Simulation de pirates avec combats au tour par tour

Éditeur : Kalypso Media

Plateformes : PlayStation 5, PlayStation 4, Xbox One, Microsoft Windows, Xbox Series

Date de sortie : 19 janvier 2023

Testé sur une version presse fournie par l’éditeur

Harvester

Collectionneur compulsif et un peu trop passionné, accumule jeux et livres en essayant d'entraîner un maximum de gens dans ses vices...