Early Access: Roman Triumph
Produit d’une fusion entre Caesar et Banished, le city builder Roman Triumph vous place à la tête d’une cité Romaine à développer et protéger. Conçu depuis 5 ans par un développeur en solitaire, le jeu a entamé ce 4 avril une période d’accès anticipé avec une version aussi surprenante que généreuse. Voici pourquoi.
City builder oblige, le cœur de Roman Triumph se situe dans la création et la gestion de votre cité. Après avoir placé avec soin votre Castrum pour profiter des ressources ou des barrières naturelles qui vous entourent, votre but est de faire grossir et prospérer votre cité grâce à un suivi accru de votre production et du bonheur de votre population. Inutile d’expliquer les bases, au final classiques et similaires à la majorité des titres sur le marché, sachez simplement que le jeu intègre déjà un contenu robuste avec 60 structures, 10 types de ressources récoltées ou produites (bois, pierre, nourriture, outils…), puis 5 critères de bonheur indépendants (santé, confort, loisir, culture, sécurité) qui vont influer sur la productivité de votre population et le taux d’immigration.

Roman Triumph retravaille cependant les vieilles recettes pour proposer une formule plus personnelle. Vous vous heurterez ainsi dès les premières minutes à l’outil de priorité de travail, fonction majeure du jeu probablement rêvée par les patrons du monde entier, depuis laquelle vous classez à votre guise les métiers par ordre d’importance et pouvez régler les effectifs maximums à allouer pour chacun d’entre eux. Fini l’emploi stable, votre population revêt désormais des airs d’intérimaires ultra-polyvalents qui changeront automatiquement de poste pour répondre aux besoins soudains de la cité.
Si besoins il y a, bien sûr. Cet outil de prime abord intriguant, pour ne pas dire contraignant, se révèle en réalité excellent à manipuler. Sa flexibilité offre une liberté d’action appréciable qui vaut largement les brefs moments de micro-gestion requis. Vous pouvez ainsi définir de larges zones boisées à abattre indépendamment des effectifs attribués, augmenter à votre guise le nombre d’ouvriers pour construire plus vite un bâtiment (toute votre population si vous le souhaitez) ou encore temporiser certaines productions pour mieux cibler vos besoins à court terme. Un point important lorsque l’on considère les coûts faramineux d’entretien de chaque structure.

En effet, la quasi-totalité de vos constructions, habitations comprises, nécessitent des matériaux ou de l’or pour fonctionner. Juste pour fonctionner, je ne parle pas ici d’éventuelles matières premières à transformer. Prêtez-y attention car ça surprend et quand ça tape, ça tape fort… Quelle joie lorsque votre économie se trouve soudainement paralysée faute de pierre en quantité suffisante pour entretenir vos bâtiments ! (ndlr : le dernier patch offre dorénavant une période de sursis avant la punition). En agissant de la sorte, le jeu vous invite à réfléchir sur l’utilité réelle de chaque projet, bien qu’il reste possible de désactiver temporairement une structure boiteuse ou trop gourmande pour sortir la tête de l’eau.
Je pense notamment aux balistes, fort pratiques pour empaler des dragons mais coûteuses à entretenir et d’un intérêt limité en période d’accalmie. Une pensée aussi pour l’or, talon d’Achille des expansionnistes trop pressés. Vous en obtenez via l’imposition (réglable mais génératrice d’insatisfaction) et certaines routes commerciales, mais il se dilapide à vitesse grand V entre la recherche, la construction de structures avancées et l’entretien de votre ville et de votre armée. Un conseil, épargnez dès que possible et gardez-en sous le coude.

La progression de votre cité s’accompagne en sus d’une évolution technologique à la carte. Accessible depuis l’académie, l’arbre technologique comprend 80 évolutions et se divise en 5 arbustes indépendants et semi-ouverts dans leur développement. Ce choix résulte d’un souhait d’offrir une expérience stratégique libre mais répond également aux contraintes environnementales qui diffèrent d’une partie à une autre. Peut-être que votre première cité sera fondée près de sols fertiles et propices à l’agriculture. Alors que sur la suivante vous serez forcé de vite investir dans la pêche ou l’élevage. Durant une autre partie, les montagnes vous protégeront avec efficacité des vagues ennemies alors que dans celle d’après vous vous trouverez au beau milieu d’une plaine où la défense occupera une part importante de vos investissements. Ce pan est aussi simple qu’efficace, à l’image du jeu.
Comme dans un simulateur de colonie, chaque membre de votre cité est une personne à part entière avec son identité et ses besoins (on sait même ce qu’elle a mangé au dernier repas). Pour satisfaire tout le monde vous devrez donc réfléchir au placement des nombreuses structures afin qu’elles impactent un maximum d’habitants (en général via une zone d’effet, sinon une limite de population) et que chacun bénéficie de tout ce que votre cité peut leur apporter. Sinon il y aura des disparités. Plus spécifique, vous pouvez aussi améliorer les logements au cas par cas -avec par exemple une meilleure isolation ou de meilleurs meubles- pour cibler des habitants en particulier. Ou bien tuer quelqu’un d’un simple clic si son visage ne vous plaît p…pardon, si cette personne est gravement malade, pour ne pas qu’elle contamine le reste de la ville !

De façon générale Roman Triumph s’avère coquin et – relativement – exigeant. Les hivers réduisent drastiquement la production agricole et dilapident de ce fait les réserves de nourriture, les crimes et épidémies vous arrachent un pan de la population en plus de vous flanquer un malus de bonheur, les coûts d’entretien explosent et forcent à vous retourner vers le commerce ou à revoir vos plans… quand les dieux n’ajoutent pas leur grain de sel à l’équation. Construisez leurs des temples, offrez-leur de la nourriture, organisez des festivals en leur nom, partez en pèlerinage et vous obtiendrez diverses faveurs. Sinon, votre ville subira leur colère de 1001 façons…
De ce postulat, le jeu stimule en permanence et vous invite à rester concentré, à l’affût des moindres opportunités pour optimiser votre cité. Et si les temps morts restent inévitables, notamment lors de longues constructions qui accaparent une grande partie de vos ouvriers, une brève avance rapide vous remettra vite dans le bain. À noter que le jeu propose différentes options de difficulté pour satisfaire à la fois les joueurs à la recherche d’une expérience relaxante et ceux qui veulent suer.

S’il fallait résumer, le jeu s’articule autour de mécaniques classiques auxquelles se rajoutent une poignée d’originalités qui s’imbriquent bien et rendent la gestion de ville passionnante. On prend un malin plaisir à développer notre cité fortifiée, à suivre le quotidien de notre population et à observer l’environnement évoluer de façon organique. Les forêts s’amenuisent arbre par arbre, les roches éparses se ramassent à la main et les collines se terraforment (oui, on peut faire ça aussi !) pour accueillir notre expansion. Bref, Roman Triumph est un véritable coup de coeur.
Si la gestion de votre cité accaparera la majorité de votre temps, prenez cependant garde aux vagues d’ennemis qui surgissent environ 1 fois par an. Des barbares, des berserkers, mais aussi des créatures mythologiques comme le dragon ou l’hydre chercheront à détruire votre chef d’oeuvre d’urbanisme. Érigez des remparts et des défenses statiques puis formez une armée de légionnaires contrôlables en temps réel pour bouter l’ennemi hors de votre propriété. Bien que simple, le volet combat permet de constituer des groupes, d’adopter des formations et de donner des directives, à la façon d’un ersatz de Total War. Il demeure cependant un pierre-papier-ciseau légèrement évolué, fonctionnel mais peu passionnant.

Sur le plan technique on peut considérer l’amphore à moitié vide comme à moitié pleine. D’un côté les textures ne cassent pas trois pattes à un canard. De l’autre, le jeu fourmille de détails, de vie et nous plonge avec facilité dans notre belle cité. Il s’accompagne en outre de jolis effets de lumière, d’une bande-son réussie et d’un sympathique passage des saisons et de la météo qui nous immergent d’autant plus.
Enfin, et plus important, le jeu se dote d’une interface intuitive et fait un quasi sans faute en terme de performances et de stabilité (il perd progressivement les pédales lorsque votre ville atteint des proportions… optionnelles). J’aurais tout de même apprécié un listing plus détaillé des productions et consommations. Le résultat net de chaque ressource s’avère volatil du fait des nombreux facteurs en amont mais le jeu ne nous indique pas pourquoi. M’enfin, pour un jeu développé seul, Roman Triumph propose selon moi un volet technique tout à fait satisfaisant.

Un bref paragraphe à propos de l’accès anticipé, prévu un an et qui vise à étoffer sensiblement l’ensemble du jeu. La feuille de route nous informe de l’arrivée de nouveaux environnements, d’ennemis supplémentaires (comme le minotaure), de structures, défenses et chaînes de productions en plus… sans oublier les traditionnelles fournées de corrections et optimisations. De ce que je comprends, le jeu se trouve donc réellement dans un état avancé, contrairement à tous ces accès anticipés à peine présentables et amputés du gros de leur contenu. Le développeur planche cependant sur des aspects plus ambitieux, comme un éventuel mode conquête et l’ouverture au modding, mais sans certitude à ce jour.
Pour conclure, je suis agréablement surpris par Roman Triumph. Surpris par le degré de finition de ce jeu qui démarre à peine son accès anticipé. Surpris par le fun que sa formule en apparence classique procure, par le doux équilibre entre l’exigence de ses mécaniques et l’intuitivité générale dont fait preuve le titre. Affectez vos ouvriers en réglant les priorités de travail, apaisez les dieux pour obtenir des faveurs en tout genre, puis développez avec minutie votre Rome en devenir afin de garder sous contrôle le bonheur de vos citoyens, les charges d’entretien de vos infrastructures et les hordes d’ennemis. Tout n’est bien sûr pas parfait et il subsiste quelques zones d’ombres mineures propres au statut d’accès anticipé, mais en l’état Roman Triumph propose déjà une base solide capable de vous occuper durant des dizaines d’heures. Une bonne pioche pour les amateurs de gestion.
Genre : Construction de villes
Développeur : Coreffect Interactive
Éditeur : Forklift Interactive
Date de sortie : 3 avril 2025
Testé sur une version presse fournie par l’éditeur
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