Early Access: Arc Seed
En ces temps où le wargame se fait discret, je m’adonne à des plaisirs plus simples comme le tower defense ou le deckbuilding. Si j’omets pour cet article le premier (*hé psst*, jetez un œil à No Creeps Were Harmed !), en ce qui concerne le second, nous vivons une période faste avec d’excellents titres sortis et d’autres à venir prochainement. C’est dans cet océan de jouissance ludique que se jette Massive Galaxy Studio, essayant de se frayer une place avec Arc Seed, sorti fin juillet en accès anticipé. S’il cherche à séduire le public avec sa patte bien distincte, je dois malheureusement reconnaître que l’équipe a du pain sur la planche pour espérer rivaliser avec les titres du moment.
Inspiré par un trio gagnant
Arc Seed est l’enfant caché d’un triangle amoureux composé de Into the Breach, Fight in Tight Spaces et Evangelion. Aux commandes d’un Mecha, le joueur évolue dans ce roguelike à travers 3 actes, chacun une ville, parsemés de combats, coffres à ouvrir et magasins à dévaliser pour faire évoluer son engin de destruction massive afin d’affronter le boss final. Si nous avons l’habitude, sur ce genre de jeu, d’arpenter de longs actes, ici chacun se compose d’environ 5 combats seulement pour compenser la durée plus importante de ceux-ci.
Les batailles se déroulent sur un échiquier géant représentant un quartier de la ville, dans lequel le joueur combat un groupe de 1 à 4 ennemis déterminés à éradiquer la population. Leur méthode, peu orthodoxe, consiste à frapper et tirer sur les immeubles pour neutraliser de l’humain par grappe, quitte à les détruire ou les déplacer pour occasionner des dégâts en cascades sur les bâtiments adjacents.
Votre mission : ralentir puis éliminer ces nuisibles avant qu’ils ne tuent trop de civils. En vous y prenant ainsi, vous permettez à un pan de la population de fuir à chaque tour et empochez un salaire à la hauteur de votre sauvetage, qui sera dépensé pour évoluer.
Mech-building…
Pour mener à bien votre objectif, il vous faudra constituer un deck composé de cartes offensives et défensives, de déplacements spéciaux et de compétences, que vous jouerez à chaque tour en respectant votre quota d’énergie. Rien de bien original ici, si ce n’est que votre deck sera complété de cartes en rapport avec l’équipement installé sur votre mech, qui possède deux emplacements d’armes et trois d’armures. En sus du magasin, le jeu vous propose à la fin de chaque mission le choix d’une carte ou d’un équipement parmi une sélection, assurant malgré le faible nombre de combats un roulement suffisant pour développer votre build.
Enfin, vous améliorerez les caractéristiques de votre exosquelette entre chaque mission pour veiller à optimiser votre style de jeu et vous soigner avant le combat suivant. Choix original de « game design », contrairement aux autres deckbuilders, dans Arc Seed chaque énergie consommée pour jouer vos cartes ou vous déplacer draine votre batterie, l’une desdites caractéristiques.
Vous serez donc grés de veiller à recharger au besoin votre tank électrique auprès d’une borne présente sur chaque mission, sinon c’est la panne et vous perdez purement et simplement la partie. Je tiens à vous rassurer, la batterie se recharge automatiquement entre chaque mission et si cela peut aiguiller les amateurs, sa capacité par défaut est d’une quarantaine d’énergies, soit une bonne douzaine de tours d’autonomie.
Cela peut prêter à sourire, mais en jeu il en est autrement puisque vous devez surveiller votre jauge et, en toute probabilité, vous recharger une fois par mission. Une mécanique bien clivante que voici. D’un côté elle force à gérer une ressource, de l’autre elle empiète sur le combat tactique puisque le joueur se sent obligé de patrouiller non loin d’une borne en cas de besoin pressant.
… et building making
Comme dans Into the breach, la poussée est une mécanique centrale de Arc Seed. Vous pouvez pousser vos ennemis, mais aussi les immeubles, au risque de faire une poignée de victimes collatérales, afin de protéger les habitants d’une attaque plus destructrice encore, ouvrir un passage ou à l’inverse, bloquer un hostile. Ce dernier ne se gênera d’ailleurs pas pour vous bloquer à vous. À ce sujet, le jeu intègre un pouvoir spécial capable de faire sortir de terre un bloc s’apparentant à un immeuble, pour jouer avec ce concept sans jouer avec les vies des civils que vous devez protéger. Bon, je vais vous faire une confidence, j’ai fini le jeu sans pousser ni faire pousser quoi que ce soit… Mécanique gadget ou équilibrage en berne ?
Ré-tro(p)
Arc seed arbore un style rétro qui n’est pas sans rappeler l’âge d’or que furent les années 90. Si l’idée a du mérite, un style rétro bien réussi faisant toujours son effet, le résultat en jeu laisse à désirer. Au-delà du visuel léger comme en attestent les captures, le jeu manque de clarté, avec une lecture difficile des positions (surtout les ennemis qui volent) et des motifs des attaques en préparation.
Et pour peu qu’un bâtiment se place devant, c’est pire. Ne pensez pas faire pivoter la carte ou déplacer la caméra, le plan est fixe et doté d’un simple zoom x2 qui n’arrange en rien la situation. Difficile d’être clément sur ce point qui me tient particulièrement à cœur.
L’interface n’est guère plus réussie, avec des informations difficiles à trouver voire manquantes, comme le numéro du tour en question qui n’est pas communiqué alors que l’un des objectifs secondaires régulièrement proposé est de terminer la mission en 15 tours. Pour ce qui est de l’effet des cartes, expliqués nulle part faute d’infobulles ou d’encyclopédie, il faut tester quitte à foirer sa partie.
Un contenu insuffisant
Arc seed se résume aujourd’hui en une poignée de chiffres facile à retenir. 2 mecha (l’équilibré et le tank), 3 actes, 1 boss final et 100 cartes. C’est trop peu pour assurer au titre longévité et rejouabilité, d’autant plus que le bestiaire manque lui aussi de variété, en terme de type d’ennemis comme d’attaques à leur disposition. À titre de comparaison, la concurrence propose entre 400 et 900 cartes et des dizaines sinon des centaines d’ennemis et boss.
Le comble étant qu’aujourd’hui, le jeu ne propose qu’un niveau de difficulté qui se révèle trop facile. Malgré mon amour pour le genre, je possède un niveau exécrable. Pourtant, j’ai battu le boss final au premier essai, sur mon deuxième run, après 1h30 de jeu au total prise en main incluse. Plus grave, passé les crédits de fin je n’ai plus eu envie de le relancer, bien que pour rédiger un test votre serviteur se doit de retourner au front.
J’en ai ressenti lassitude et déjà-vu, soit pour ce style de jeu l’équivalent d’un drapeau rouge. Si l’on peut jouer la carte de l’indulgence en raison de l’accès anticipé, ce dernier est malheureusement prévu pour 3 à 6 mois. À moins d’un crunch monumental ou de contenu existant mais non distribué, j’émets des craintes.
Attendez
Le genre roguelike & deckbuilding recèle de nombreux titres passionnants et il m’est difficile de recommander Arc Seed en l’état. Le cœur du jeu n’est pas déplaisant, mais même si vous êtes fan de mecha, à l’heure où j’écris ces lignes son contenu chétif et ses lacunes techniques invitent à temporiser et surveiller l’évolution du titre. Wait and see.
Genre : Stratégie
Développeur : Massive Galaxy Studios
Editeur : Massive Galaxy Studios
Date de sortie en Early Access : 30 Juillet 2024
Testé sur une version presse fournie par l’éditeur