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Glory : un Jeu de Chevaliers

Il y a des jeux comme ça, dont le thème vous pousse à craquer. Les jeux avec des dinosaures. Les jeux avec des chats. Et les jeux avec des chevaliers. Et dans le cas de Glory : un Jeu de Chevaliers, pas des chevaliers faisant de grandes charges héroïques pour massacrer des dizaines de paysans ou partant en croisade. Non, dans le jeu de Dominik Mucha et Marcin Wisthal, vous jouez un chevalier en quête de gloire, que vous gagnerez en participant à des tournois et en accomplissant des quêtes. Et ça en récompense de phases de placement d’ouvriers. Franchement, comment pouvez-vous hésiter ?

Glory est un jeu long à installer, c’est d’ailleurs un défaut qui fait qu’il ne sera pas votre premier choix quand vous voudrez faire une partie, là maintenant tout de suite. Et honnêtement pour un débutant il y a un effet tsunami devant le plateau bien chargé, j’en veux pour preuve la tête de plus en plus médusée de mon adversaire la dernière fois où j’ai sorti le jeu. Oui il y a beaucoup de choses sur ce très beau plateau, mais non, en définitive ça n’est pas bien difficile à jouer une fois un tour entier effectué.

Une partie est divisée en trois rounds, eux-mêmes divisés en trois phases dont les mécaniques sont étonnamment différentes. Dans la première phase, chaque joueur va, à tour de rôle, utiliser ses six petits chevaliers pour visiter autant de lieux afin de récupérer de l’argent, de la foi, engager des serviteurs, s’entraîner… Il y a une bonne dizaine d’actions différentes possibles, rien que là il y a moyen de se gratter pensivement le menton. Parce que cette phase est primordiale pour la suite : c’est lors de celle-ci que vous allez récupérer les différents moyens de vous en sortir lors des tournois.

Par exemple, pour être performant, il vous faut un bon cheval et une bonne armure, qui coûtent de l’argent. Que vous n’aurez qu’en accomplissant des quêtes ou en allant à deux ateliers sur la carte. Mais il vous faut aussi de la force, disponible dans les ateliers d’entraînements. Et des servants qui vous apporteront différents bonus mais qui coûtent eux aussi de l’argent… De plus, certains lieux rapportent plus que d’autres mais ne sont disponibles que pour le premier qui y va. Il faut donc établir des priorités et avoir un plan précis en tête sans quoi la tentation de se disperser est forte et ne mène pas à grand-chose.

Sur le plateau figurent aussi trois rivières de cartes, parmi lesquelles chaque joueur peut aller piocher. Ne vous en faites pas, cela n’entraînera pas une phase de deckbuilding. Non, ces cartes servent lors de la deuxième phase, lorsque les joueurs partent en voyage pour accomplir des quêtes. Dans les faits, ils ont l’opportunité de résoudre trois cartes de leur main. Dans une catégorie, ce seront des gains directs : argent, force ou reliques ; dans une autre ce seront des achats (argent contre reliques, argent contre armure…) et dans la dernière ce seront des combats contre des chevaliers errants qui rapporteront une grande variété de récompenses. Et comme ces cartes sont récupérables lors de la première phase, c’est une bagarre en plus pour aller les chercher en premier.

Une fois toutes ces cartes résolues, chacun gagne ses revenus et s’inscrit aux tournois, qui peuvent être de deux types : joute ou pas d’armes. Dans le premier si vous gagnez un combat vous êtes qualifié pour le suivant jusqu’à la finale. Dans le deuxième vous pouvez participer jusqu’à trois tournois dans trois villes différentes. Et forcément, les chevaliers adverses sont de plus en plus forts au fil de la partie.

Et nous voici au gros morceau de Glory : un Jeu de Chevaliers : les combats. Le principe est simple : chaque combat se déroule en deux manches gagnantes et chacun ne peut utiliser que les ressources dont il dispose et qu’il investit au départ. Impossible d’aller en chercher d’autres, vous faites avec ce que vous avez et ce pour la durée du tournoi. C’est d’ailleurs ce qui donne tout son sel. Investir beaucoup de ressources pour être sûr de passer ou être radin en espérant avoir de la chance pour passer à la suite et avoir ainsi plus de marge de manœuvre ? Ah, j’entends d’ici les grincements de dents devant le mot chance. Oui on jette des dés dans Glory : un Jeu de Chevaliers. Plein.

Ils sont de trois couleurs : blancs (d’une valeur de 0 à 3), apportés par le niveau de votre armure ; noirs (d’une valeur de 0 à 4), qui dépendent du niveau de votre cheval et enfin les rouges (d’une valeur de 1 à 5), qui dépendent du nombre de jetons de force que vous investissez. Ceux-ci étant en nombre limité, ils seront la première ressource à surveiller. A chaque round, vous lancez donc vos dés et ne gardez que le meilleur de chaque couleur. La somme des trois vous donne votre total à opposer au niveau du chevalier adverse. Si vous avez moins, vous pouvez utiliser de la foi pour relancer deux dés. Ou utiliser un soutien ou une relique pour changer un résultat ou booster votre total.

Mais si vous faites cela, votre soutien ou relique sera inutilisable jusqu’à la fin du tournoi, et non pas juste du combat. C’est donc pour cela qu’il faut venir le plus préparé possible et surtout savoir quand cramer ses soutiens. Le gagnant de deux rounds gagne de la gloire et continue son aventure, alors que le perdant récupère quelques bricoles et rentre chez lui pleurer. Le moment est assez sympathique lorsque deux joueurs se rencontrent et que chacun sort ses bonus un à un, un grand sourire sur les lèvres.

Une fois le tournoi fini, on repart pour une séquence de placement d’ouvriers pour préparer le prochain tournoi, le tout jusqu’au troisième et dernier tournoi. Les points de gloire sont alors comptés, en prenant en compte des objectifs communs (avoir six reliques en sa possession, avoir gardé 3 points de force et deux de foi…) et ceux piochés pendant la partie. Un joueur peut donc avoir roulé sur tout le monde pendant les tournois et se retrouver à la traîne s’il a négligé les cartes Titres (les fameux objectifs).

Vous le voyez, Glory : un Jeu de Chevaliers mélange les genres de fort belle manière, offrant une phase de planification très intéressante avant des combats où il faut oser pousser sa chance. Le niveau des adversaires augmente suffisamment pour rendre les trois rounds intéressants et on affronte avec plaisir les autres joueurs, bluffant et chambrant comme jamais. Si le plateau est très chargé, avec de nombreux jetons, et si la complexité peut sembler élevée, la clarté des règles (notamment grâce à une excellente traduction) et les nombreux exemples font qu’on comprend très vite comment tout s’imbrique. Bon, de là à dire qu’il est simple de s’en sortir, il y a une douve que je ne franchirai pas.

Passé par Kickstarter mais maintenant disponible en boutique, Glory est un jeu que l’on trouve régulièrement en soldes et qui est à mon avis injustement ignoré. Le mode solo est intéressant, les interactions nombreuses sans être méchantes, il y a une réelle montée en puissance des joueurs et il est très prenant une fois la partie lancée car, même lors des combats qui ne les impliquent pas, les joueurs vont s’amuser à encourager ou chambrer les jouteurs. Si vous cherchez un jeu atypique au thème très bien exploité, que vous aimez le placement d’ouvriers mais que vous n’êtes pas contre un peu de folie, alors n’hésitez pas !

Auteurs : Dominik « Lir » Mucha, Marcin « Wis » Wisthal

Artistes :Tymoteusz Chliszcz, Sandra Guja, Milek Jakubiec, Radosław Jaszczuk, Jarek Nocoń

Editeur : Super Meeple

De 1 à 4 joueurs

De 45 à 120 minutes

Harvester

Collectionneur compulsif et un peu trop passionné, accumule jeux et livres en essayant d'entraîner un maximum de gens dans ses vices...