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BEAUTIFUL DESOLATION

J’ai un souvenir mitigé de STASIS. Je me souviens d’un univers déglingué, flippant et torturé. On y découvrait un vaisseau à l’abandon, dans une ambiance horrifique, dans les pas d’un pauvre amnésique à la santé mentale mise à l’épreuve par ce qui l’entourait. Mais tout ce décorum était partiellement gâché par des graphismes qui se voulaient travaillés et qui se révélaient approximatifs, ainsi que, et c’était plus gênant, une maniabilité pénible et des énigmes oubliables.

Quand THE BROTHERHOOD, les mêmes auteurs, ont sorti BEAUTIFUL DESOLATION (oui, encore un studio qui laisse la touche Caps Locks enfoncée au moment d’écrire le titre de ses jeux), j’espérais qu’ils allaient bonifier leur capacité à créer des univers tout en gommant les défauts de STASIS. Dès les premières secondes, j’ai compris que le contrat ne serait que partiellement rempli.

L’intro du jeu nous emmène dans une Afrique du Sud dystopique, pas complètement post-apo mais pas loin. Dans les années 70, un énorme artefact extraterrestre, le Penrose, s’est matérialisé dans le ciel et a changé la face du monde. Après un accident de voiture provoqué par cette apparition soudaine, Mark, notre héros (surnommé Markie par son frère Don et que j’ai mentalement appelé Markie Mark durant toute l’aventure), a perdu sa femme et a gagné une prothèse.

Fasciné par le Penrose, il convainc son frère, pilote de son état, de l’emmener sur ce triangle flottant et par un incompréhensible enchainement d’évènements, ils se retrouvent propulsés dans le futur. Leur quête pour retourner à leur époque commence alors, dans ce monde inconnu aux codes qui les dépassent.

Ce qui saute tout d’abord aux yeux, c’est la justesse du titre. L’environnement dans lequel ils vont évoluer est en partie retourné à l’état sauvage, la végétation a envahi les anciennes constructions, les rares habitations en dur côtoient principalement des huttes et des cabanes. La désolation est partout, magnifiée par des graphismes de grande qualité.

Malheureusement, la seconde observation que j’ai faite immédiatement, c’est la pénibilité des contrôles. Dans une vue en 3D isométrique, on se déplace comme dans Fallout 1 ou 2 (oui, j’ai lâché le mot, ce qui est plutôt facile vu l’ambiance post-apo). A la différence près que le moindre clic semble approximatif, surtout que le double-clic ne déclenche pas forcément la course pour aller plus vite. Pour examiner un élément, il suffit de passer la souris sur son nom, mais le curseur se retrouve alors sur le texte descriptif histoire de le rendre difficile à lire.

Pour les rares éléments interactifs, parfois il faut cliquer dessus, d’autres fois il faut drop un objet dessus, bref, c’est rarement intuitif. L’histoire mettant un peu de temps à démarrer jusqu’au moment où on dispose d’un moyen de transport pour se déplacer d’un lieu à l’autre, j’ai plusieurs fois mis le jeu de côté, découragé par cette ergonomie d’un autre âge.

Et puis, poussé par une petite voix (en l’occurrence, celle du rédac’ chef qui venait régulièrement mettre des coups de pieds dans la porte de mon placard à la rédac en me menaçant comme à son habitude de me priver de nourriture si je ne rendais pas mon article), j’ai repris la route, accompagné de Don qui ne sert pas à grand-chose et de K-Bot, le robot iench bien plus touchant que ne le laisse croire sa nature mécanique.

J’ai bien fait, car si les problèmes mentionnés ne s’arrangent pas avec le temps, l’histoire, elle, devient plus intéressante, plus consistante au fur et à mesure des rencontres improbables avec des êtres décharnés, des fanatiques religieux, des clans accros à la fumette et autres pêcheurs solitaires. Souvent désespéré, parfois même sombre à la limite du glauque, l’univers est la plus belle qualité de BEAUTIFUL DESOLATION.

Cependant nos interactions avec les nombreux PNJ, au delà des dialogues parfois savoureux (malgré un bémol général sur la qualité de la traduction française, par moments inspirée, mais souvent trop littérale), se limitent trop souvent à un enchainement de quêtes FEDEX. Ils vous obligeront à multiplier les allers-retours sur la carte du monde, divisée en secteurs reliés par des portails, ce qui implique de se coltiner la jolie mais répétitive animation à chaque fois.

Son univers réussi, ses personnages hauts en couleur, ses graphismes soignés, compensent en partie ce gameplay peu engageant. En partie seulement, parce que mon impression générale reste mitigée. Si je reconnais la qualité du travail effectué sur l’enrobage, auquel j’associe les doublages très propres et l’ambiance sonore immersive, je ne peux conseiller BEAUTIFUL DESOLATION qu’à ceux pour qui l’histoire prime sur le gameplay. Si STASIS vous a rendu claustrophobe, les environnements plus ouverts et colorés de l’Afrique du Sud post-apo devraient vous satisfaire.

Genre : Point&click

Développeur indépendant : THE BROTHERHOOD

Plateformes : SteamGoG

Prix : 16,79€

Date de sortie : 26 février 2020

Testé sur une version presse fournie par l’éditeur

Ruvon

Chaologue pas encore retraité, traître renommé, survivant accompli. Mon domaine, c'est le jeu vidéo, du FPS hardcore au point&click niais, et depuis toujours amoureux du tour-par-tour.

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