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Opus: Echoes of Starsong

La voix lactée

Dans la ceinture d’astéroïdes de Thousand Peaks, les pirates demeurent. United Mining, la toute puissante compagnie minière qui mit fin à la guerre, n’a pas tout à fait fini d’écraser la concurrence. Partout, on revend des tuyaux pour découvrir les derniers gisements de Lumen, l’énergie créatrice qui se cache encore au fond de certaines mines. Jun, jeune aristocrate déchu d’une galaxie lointaine, compte en profiter pour regagner les faveurs de son clan. Il va croiser le chemin d’Eda, une sorcière capable de localiser l’énergie divine grâce à sa voix. Ainsi commence Opus: Echoes of Starsong. 

Amis excités de tous poils : vous pouvez sortir de la salle. Si possible sans faire grincer les chaises avec vos gestes brusques, merci. Opus: Echoes of Starsong ne s’adresse pas à vous. J’ai personnellement abordé le jeu par doses d’une heure, pour survivre au rythme lent, égrainé par des notes de piano tristes. Mon épopée spatiale aura duré 8 heures. Le temps de vérifier une fois encore ce proverbe cliché : l’important n’est pas la destination, c’est le voyage vers Taïwan, où un petit studio a une belle histoire à nous raconter.

Faster Than Love. Opus: Echoes of Starsong se structure un peu comme Faster Than Light dans sa progression, la difficulté niveau “prison Turque” en moins. On découvre un lieu, on explore les 4-5 dialogues illustrés, on revend son loot et on démarre l’engin. Ce gameplay en vue “carte du cosmos” occupe les trois quarts du temps. Le reste, c’est de l’exploration linéaire en 2,5D, le plus souvent dans les fameuses caves de Lumen, parfois dans notre vaisseau. La seule raison de bifurquer sur les nombreuses (mais petites) quêtes annexes est la collecte des nombreux “souvenirs”  (un objet, un lieu). 

Ces petits recoins de textes cachés un peu partout sont autant de témoins de l’amour que le studio porte à son jeu. Des bouts de lore détaillés, souvent illustrés, qui épaississent l’univers. Le lecteur avide, attiré par le moindre caillou flottant au radar, aura beaucoup d’escales à faire. L’univers dépeint est crédible, et la relation entre Eda et Jun est originale, à des années-lumière du cliché qu’on pourrait redouter. D’une manière générale, l’écriture parvient à dépeindre un monde vaste et complexe, avec très peu. Ce qui, à l’échelle d’un visual novel à 15€, est une belle prouesse. 

C’est lent mais c’est beau. Les mauvaises langues diront que dans l’espace, tout se ressemble et que visuellement le jeu n’est pas très diversifié. Ceux-là, qui n’ont jamais été dans l’espace vérifier par eux-mêmes, feraient mieux de travailler pour se payer un billet SpaceX plutôt que de médire. Car le jeu est plutôt classe, le design épuré mais suffisamment détaillé pour éviter la sécheresse des yeux. Les astéroïdes sont variés, du poste frontière à la station radio, en passant par le casino. Les plans de voyage très récurrents, comme la vue du vaisseau fonçant dans le vide, pourraient sans problèmes intégrer n’importe quel film animé.

Au départ choqué par la longueur du jeu, j’ai appris à le consommer par petites sessions. Pour la raison assez physique que, du piano et des dialogues, ça endort. Mais aussi, avec le recul, parce qu’on ne lit pas une histoire comme celle-là comme on dévore un roman policier. Enfin j’imagine : je lis très peu de drames spatiaux dans lesquels des sorcières de l’espace ouvrent les portes en chantant. Mais, une fois dans l’orbite du jeu, j’ai aimé mes rendez-vous du soir avec Eda et Jun. Jusqu’à jouer de plus en plus longtemps au fur et à mesure qu’approchait le dénouement.

On peut trépigner devant de rares mais dispensables séquences de gameplay, bailler devant les puzzles Fisher Price. Mais si la crédibilité d’un univers et l’histoire sont vos premiers critères, vous ne serez pas déçu. Car sous la combinaison spatiale,  le frisson final guette. Les Taïwanais de SIGONO imposent leur rythme, prennent leur temps. Face au résultat, on ne peut qu’inviter les férus du genre à suivre leur travail de près.

opus echoes of starsongSite officiel

Développeur : SIGONO (Taïwan)

Sortie : 1er septembre 2021

Testé sur une version presse fournie par l’éditeur

Bofang

J'écris pour justifier le temps perdu à jouer pendant que d'autres montent des start-up.