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Firmament

Aimez-vous les jeux qui vous font vous sentir bête mais heureux ? Pas les jeux qui vous prennent pour des idiots, non. Ceux-là se moquent juste de vous, comme des petits trolls des réseaux. Ils agacent sur le moment, et on les oublie juste après. Je vous parle des jeux qui vous donnent toutes les clefs pour les comprendre, mais dans un tel ordre qu’il va falloir faire un gros effort intellectuel pour remettre l’ensemble dans le bon sens. Firmament, le dernier jeu des créateurs du célèbre Myst (probablement le puzzle-aventure le plus célèbre du monde), est de ceux-là. Il faut dire qu’avec une telle ascendance, il aurait été difficile pour lui de faire autrement.

Ainsi parlait Zarathoustra

La série des jeux estampillés Myst a débuté en 1993, sous la houlette de deux frères, Robyn et Rand Miller. Il s’agit de jeux d’aventure et de puzzle particulièrement exigeants qui nous placent dans la peau d’un personnage se retrouvant, sans trop savoir pourquoi au début, sur une île mystérieuse dont le nom donne son titre au jeu. Au fur et à mesure de l’exploration, il faudra résoudre tout un ensemble d’énigmes pour découvrir les secrets de Myst, incluant une ancienne civilisation disparue et des mondes parallèles.

Le succès du jeu amènera des suites plus ou moins directes, chacune suivant une histoire différente, mais toutes liées par des thèmes communs, tels que l’exploration, la découverte, la résolution de puzzles et la révélation de mystères. Les jeux connaitront plus ou moins de succès auprès du public, mais sont toujours considérés comme l’une des franchises les plus emblématiques et les plus influentes de l’histoire du jeu vidéo.

En 2019, les frères Miller décident de financer leur prochain titre par kickstarter. Le résultat est sans appel puisqu’ils engrangent près de 1.500.000$ pendant les 31 jours que dure la campagne de financement. Ils promettent une livraison en juillet 2020, sauf que la covid vient s’inviter à la fête et retardera quelque peu les choses. C’est donc ce 18 mai 2023, que sort enfin le titre.

L’être et le néant

Encore plus que les précédents jeux, Firmament se présente comme un walking sim. Il en a toutes les caractéristiques. Une vue à la première personne, une interface parfaitement intégrée, une ambiance mystérieuse et des décors somptueux. On y retrouve aussi tout ce qui fait la particularité des Myst : des architectures steampunk entre machineries victoriennes et art déco ; une absence humaine oppressante et, bien entendu, des énigmes à chaque étape.

On ne peut pas dire que Firmament nous jette dans l’action. Tout simplement parce qu’il n’y a pas d’action, pas de violence, pas de course-poursuite, et encore moins de jump-scare. Ici, il n’y a que douceur et émerveillement. Et pourtant de la violence il y en aura, mais uniquement dans votre tête. Vous sentirez physiquement vos neurones faire leurs valises pour vous laisser dans votre jus.

Mais la grande force de Cyan Worlds, Inc. (les créateurs de Myst donc), c’est leur capacité à vous faire rester dans leur univers, à vous accompagner et, sans que vous vous en rendiez compte, à vous faire entrer dans leur façon de concevoir le monde. Et, croyez-moi, vous immerger complètement dans le jeu sera le seul moyen de résoudre l’ensemble des énigmes qui vous sont proposées.

La naissance de la tragédie

L’histoire, dès ses premières minutes, vous jette dans le grand bain. Vous vous réveillez, entouré de machines étranges, incapable de dire qui vous êtes ou ce que vous faites là. Un peu désorienté, vous êtes rapidement pris en charge par ce qui semble être l’hologramme d’une Gardienne qui vous guide dans vos premiers pas. Elle vous accompagnera par la suite, distillant ici et là des explications parcellaires sur ce qui s’est passé avant votre réveil. Elle vous apprend plusieurs choses. Vous êtes vous aussi un gardien. Il y a eu des tas de gardiens. Elle va vous guider et vous mentir. Elle est morte.

Partant de ces informations réjouissantes, elle vous présente votre unique interface avec le monde : l’assistant. Une sorte de gant énergétique qui vous permet d’interagir avec tout un tas de machines. Vous voilà donc dans la peau d’un « Gardien du Firmament ». Pour autant que ça veuille dire quelque chose. Je ne détaillerai pas plus l’histoire du jeu, il serait dommage de vous priver de chaque instant de découverte.

Sachez seulement que, comme tout jeu de ce type, l’exploration et surtout l’observation de l’environnement jouent un rôle fondamental non seulement dans la résolution des énigmes, mais également dans l’appréciation du titre dans sa globalité. Qui êtes-vous, que faites-vous là, qui a construit ces architectures et dans quel but ? Ce sera à vous de répondre à toutes ces questions, à vous et à personne d’autre.

Les Méditations Métaphysiques

Puisqu’on ne peut parler de l’histoire sans la gâcher, parlons un peu technique. Je n’ai pas un ordinateur de pro. Ma carte graphique est tout à fait quelconque, mon processeur également, le tout allant vaillamment sur ses 3 ans d’existence, sachant que ce n’était déjà pas du haut de gamme à l’époque. Mais le jeu se comporte très bien en 1080p, avec quelques ajustements sur les options graphiques. J’ai pu noter ici et là quelques petits ralentissements, mais rien de bien grave.

Et heureusement, car la direction artistique est tout simplement magnifique. Comme évoqué plus haut, l’ensemble des constructions et bâtiments que vous traverserez sont dans un style rappelant furieusement les plus belles heures de l’époque victorienne et de l’art déco. Si vous avez aimé l’architecture dans Bioshock, vous allez être comblé.

L’habillage sonore, auquel j’attache beaucoup d’importance comme vous le savez sûrement si vous me lisez régulièrement, est lui aussi de grande qualité. La spatialisation du son est bien restituée (jouez au casque), la musique est présente sans être intrusive et sait s’absenter quand il le faut. Enfin le son participe souvent aux énigmes, en apportant son lot d’indices. On est en présence d’un sound design réussi, ce qui prouve que dans ce domaine-là également, les frères Miller ont le sens du détail.

Critique de la raison pure

Si vous êtes un grand fan des jeux « à la Myst » alors Firmament vous comblera. Je le vois comme le « best of » des créateurs du genre. Paysages, moyens de transport, architectures et même énigmes ont cette saveur de citation, de clins d’oeil qui créent un liant entre les précédents opus et ce dernier.

Parfois moins cryptique dans ses énigmes que certains de ses prédécesseurs, bien que sa logique, très spécifique, ne souffre d’aucune pause dans son cheminement. Firmament raconte une histoire singulière, mystique et envoûtante, comme ont toujours su le faire Robyn et Rand Miller. Il reprend leurs thèmes de prédilection, leurs mécaniques préférées, et en modernise absolument l’approche. Petit détail, le jeu est également prévu pour être joué avec un casque VR. L’immersion n’en sera que plus totale.

Et si vous souffrez trop sur les énigmes, n’ayez aucune honte à le parcourir soluce en main. Le jeu restera bien difficile et vous apprécierez tout de même l’ingéniosité de ses puzzles, la beauté de ses paysages et l’étrangeté de son histoire. Vous sortirez de Firmament avec l’impression diffuse, mais tenace, d’avoir participé à quelque chose de différent et probablement d’unique.

Genre : Myst-Like, Aventure, Puzzle

Développement : Cyan Worlds Inc.

Éditeur : Cyan Worlds Inc.

Date de Parution : 18 Mai 2023

Prix : 33.99€

Plateforme : PC

Testé sur une version presse fournie par l’éditeur

CekterDown

Fasciné par Sherlock Holmes et le mythe de Cthulhu, j'aime également la science-fiction et tout ce qui s'y rapporte, je ne réponds qu'aux superlatifs et ne désespère pas qu'on me voue un culte un jour. J'aime surtout m'entourer de gens plus talentueux que moi.