DystosealJeux vidéoJouer

Kingdom Come Deliverance 2

En 2018 sortait Kingdom Come Deliverance premier du nom, jeu de rôle tchèque issu d’une campagne Kickstarter plus que réussie. La sortie fut assez houleuse, avec des choix controversés et des soucis techniques, mais globalement le titre de Warhorse Studios était une pépite pour tout amateur de RPG exigeant et réaliste. J’y ai englouti des dizaines d’heures, arpentant la campagne tchèque du XVème siècle, un sourire aux lèvres devant ces paysages magnifiques et me faisant détrousser à chaque croisement. Lorsque Kingdom Come Deliverance 2 fut annoncé, je rassemblais donc de quoi survivre plusieurs jours sans bouger du PC et me préparais à souffrir.

Parce qu’autant vous le dire tout de suite : Kingdom Come Deliverance 2 est dans la droite lignée du premier. A vrai dire, c’est la suite tout ce qu’il y a de plus basique, étant donné que vous jouez toujours Henry, le fils de forgeron bohémien entré au service du Seigneur Hans Capon après moultes péripéties. L’aventure reprend d’ailleurs quelques semaines après l’intrigue principale du premier, avec une mission de la plus haute importance pour contrer Sigismond, le frère du roi.

Cette mission qui démarre plutôt bien va très vite vous ramener sur terre : oubliez l’armure rutilante, oubliez les compagnons d’armes, vous vous faites attaquer et devez vous refaire un nom dans la région de Trosky, où vous êtes non seulement inconnu mais aussi complètement dépouillé. Autant vous dire que ça n’est pas gagné.

Dans Kingdom Come Deliverance 2, inutile de vous projeter comme dans un RPG classique : vous n’allez pas devenir une machine invulnérable, vous n’allez pas massacrer des bataillons d’ennemis ou vous enrichir en quelques heures. Non, ça n’est pas du tout l’esprit du titre. Vous allez plutôt galérer à trouver à manger, concocter vous-même des potions à base d’orties et passer la moitié de votre temps la tête dans une auge pour vous débarbouiller.

Lorsque je parlais de jeu réaliste, c’est parce que rien ne vous est acquis : les gens n’ont au mieux qu’une indifférence polie à votre égard quand vous les rencontrez, si vous voulez des faveurs il va falloir bien présenter et rendre d’abord service, vos besoins naturels sont tout sauf accessoires et surtout, les combats sont d’une létalité impressionnante. En effet, ceux-ci reposent sur le placement intelligent de votre arme (et bouclier) pour parer et attaquer, le tout avec un timing à respecter – même si maintenant on a une indication visuelle claire pour savoir quand le faire. Autant vous dire que si vous n’êtes pas dedans, vous allez vous faire massacrer par le moindre quidam.

L’aventure de Kingdom Come Deliverance 2 n’est donc pas une recherche de combats pour gagner en expérience et monter de niveau. Les différentes caractéristiques d’Henry augmentent lorsqu’elles sont utilisées, ce qui permet d’avoir un personnage avec la carrière réellement souhaitée : guerrier, alchimiste, beau parleur ou tout ça à la fois, cela va dépendre de vous et de votre style de jeu.

Qui dit jeu exigeant, dit aussi choix difficiles : les quêtes sont nombreuses, bien souvent très longues avec de nombreux moments clés qui vous demanderont de faire des choix, bien souvent aiguillés par vos caractéristiques en éloquence ou autre. Ces choix sont bien souvent drastiques et peuvent vous faire tout perdre. Et n’espérez pas faire des sauvegardes toutes les 10 secondes, cela n’existe pas dans Kingdom Come Deliverance 2 : il faut pour cela boire un vin spécial que vous devez acheter ou fabriquer et qui vous rend alcoolique…

Tout est comme cela dans le jeu de Warhorse Studio : les déplacements sont lents car effectués à dos de cheval ou à pied, dormir nécessite de louer une chambre (interdit de dormir chez les gens !), les aliments pourrissent dans votre sac à dos, l’équipement s’abîme, vous vous salissez… Rien, absolument rien n’est fait pour vous faciliter la vie. Et… ça marche.

Kingdom Come Deliverance 2 fait partie de ces jeux gigantesques, où chaque chemin vous emmène vers une aventure. Et croyez-moi, chaque sentier est unique. Vous avez vraiment l’impression de vous promener dans une forêt, avec des petits ruisseaux serpentant entre les talus, les animaux sauvages  fuyant à votre approche. Une forêt est un véritable lieu fourmillant de vie et de choses à faire, pas un simple décor pour votre prochaine quête. Pour information, j’ai passé les 10 premières heures de ma partie à me promener et à chercher mon chien. Et je ne me suis pas ennuyé une seconde.

Quand vous parlez à un joueur de sa partie, il vous dira rarement comment il a résolu l’intrigue principale. Non pas qu’elle ne soit pas digne d’intérêt, bien au contraire. Mais ce qu’il expliquera, les yeux embués par l’émotion, c’est comment il s’est fait inviter à un mariage, comment il a réussi, petit à petit, à regagner son rang… Tant de choses vont différer d’une partie à l’autre, tant d’heures vont être passées à chasser, collecter des herbes, forger ou tout simplement apprécier les paysages grandioses du jeu.

Tout n’est cependant pas rose au royaume de Trosky. Si le jeu est techniquement très propre dès sa sortie, ce qui est une énorme évolution par rapport à son aîné, il souffre des limitations de son moteur physique, notamment lors des combats contre plusieurs ennemis. Difficile de jongler entre les verrouillages et parades, surtout contre les animaux sauvages qui sont bien trop agressifs. Ou d’éviter de blesser des alliés en combat.

Ensuite, les vétérans du premier pourront reprocher au jeu de n’être qu’une simple suite : il n’y a pas d’évolution majeure, pas de nouveau mécanisme de jeu. Est-ce un mal ? Pour certains oui, personnellement je prends tellement de plaisir dans ce jeu que je n’y prête pas attention. Tout comme je me fiche de ce côté rugueux sur les bords : on joue à Kingdom Come Deliverance 2 pour être couvert de boue et de sang, pour galérer à trouver une pièce d’armure digne de ce nom, pour aider une petite vieille à retrouver sa fille.

On en prend plein la tête, tout le temps. On planifie ses déplacements, on envisage une attaque de camp de bandits comme l’action la plus dangereuse qui soit, on entraîne son chien, on pense à faire sécher ses plantes ou à fumer sa nourriture. On est loin du héros habituel, on n’est qu’Henry, le fils de forgeron qui a su se faire un nom, un petit nom. C’est ce que j’attendais du jeu, cette promesse de mille et une aventures que j’aborderai comme je l’entends.

Pour tout cela, Kingdom Come Deliverance 2 mérite votre temps et argent. Pour ses décors superbes, qui vous donnent envie de passer des heures à simplement vous promener, pour ses bagarres de taverne, ses promenades dans des villes animées, son monde qui, tout simplement, vit sans vous. Tous ceux qui lui reprochent son côté rugueux, injuste parfois, ont raison car il a bien ces défauts-là. Mais ce sont aussi ses principales forces. On jubile à chaque combat gagné, chaque gain de réputation, chaque fouille rapportant gros. On est Henry, on lutte pour survivre, on découvre à son rythme cette Bohème médiévale et surtout, on n’oublie pas d’installer le mod pour désactiver l’animation du ramassage des plantes !

Genre : Jeu de Rôles

Développeur : Warhorse Studi

Editeur : Deep Silver

Date de sortie : 4 Février 2025

Testé sur une version presse fournie par l’éditeur

Harvester

Collectionneur compulsif et un peu trop passionné, accumule jeux et livres en essayant d'entraîner un maximum de gens dans ses vices...