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Chambre 2806 : l’affaire DSK

Ce n’est pas un grand secret que je suis féru de documentaires, sauf quand le documentariste se met en scène au point d’en oublier son sujet (Michaël Moore, si tu me lis). Quand Jalil Lespert se penche sur l’affaire DSK avec Chambre 2806, c’est intrigué que je me lance dans ses quatre épisodes allant de 45 minutes à 1 heure pour le dernier.

Pour remettre dans le contexte, DSK est arrêté en mai 2011 parce qu’il est soupçonné d’avoir agressé sexuellement une femme de chambre du très chic hôtel Sofitel de New York. L’affaire est hautement médiatisée du fait d’une campagne présidentielle en cours et d’un Dominique Strauss Kahn (DSK), grand favori loin devant tous ses rivaux.

L’enchaînement des évènements et le timing auraient pu faire de cette affaire l’explosion médiatique du mouvement #metoo existant depuis 2007, mais la justice va en décider autrement. Il faudra attendre 2017 et l’affaire Weinstein pour que le monde prenne conscience d’une certaine réalité. Celle que les puissants usent de leur pouvoir pour s’ériger au dessus des lois qu’ils peuvent considérer comme inapplicables pour eux/elles.

Si vous pensiez, avec Chambre 2806, avoir de grandes révélations sur l’affaire du Sofitel, les affaires précédentes et les suivantes, le documentaire n’est pas pour vous. En effet, point d’interview vérité de DSK, Nafissatou Diallo parle en haussant le ton comme si cela donnait plus de poids à son histoire, Ardisson admet à demi-mots que l’audimat est plus intéressant que l’empathie, les politiques font de la politique, les avocats jubilent en pensant à leur nécrologie et au final, tout le monde se retrouve face à ses paroles plus ou moins malheureuses de l’époque.

Chambre 2806 s’applique à poser les faits tout en les éclairant quand cela semble pertinent. En effet, il se permet quelques rappels de la vie de DSK pour apporter du contexte. Il applique une logique chronologique avec l’avant (et il y a du dossier), le pendant et l’après en y incluant les parties fines du Carlton à Lille, entre autres. La goutte d’eau qui signera la fin de la carrière politique de DSK, son divorce avec Anne Sinclair, un compte en banque plus garni (quoiqu’amputé d’un million et demi pour « compenser » son acte envers Nafitassou Diallo) avec sa carrière de consultant et une vie bien plus libre à l’abri des médias.

Finalement, Jalil Lespert se refuse à prendre parti en laissant le plus de place possible aux faits et la parole libre aux différents acteurs/actrices de ce moment. Il laisse chacun et chacune face à ses actes ainsi que ses paroles sans les condamner par l’image. Tout juste pourrais je regretter un plan fixe de Nafitassou Diallo avec les larmes aux yeux tant il semble ne pas correspondre à la sobriété de l’ensemble.

Faut-il pour autant jeter les quatre épisodes ? Non, parce qu’il est justement le parfait matériau pour comprendre l’affaire dans son ensemble et les raisons qui font que DSK a toujours un casier vierge à ce jour. A chacun de faire sa propre opinion sur le traitement de l’affaire et ses répercussions. Pour ma part, personne ne ressort vraiment grandi après ces quatre épisodes aussi réussis sur la forme (limpide, efficace) que le fond (factuel et laissant s’exprimer énormément de personnes impliquées).

Genre : Documentaire (4 épisodes)

Réalisateur : Jalil Lespert

Diffuseur : Netflix

Machiavel

Toujours à l'affût de ce qui peut piquer ma curiosité, peu importe le domaine avec une légère préférence pour les jeux vidéo, le cinéma, la littérature, les séries TV, les jeux de société, la musique, la gastronomie, les boissons alcoolisées et quelques autres petites choses . Ma curiosité est telle le tonneau des danaïdes, sans fond.