MachiaVillain
Passé par la case Kickstarter en 2016, MachiaVillain est le bébé de deux esprits un peu dérangés, Alexandre Lautié et Zimra. Ils ont pris le parti d’assumer leurs influences et de les transposer, à leur sauce, dans un mélange aussi barré qu’attirant. Pensez-donc, un zeste de Dungeon Keeper, un soupçon de Prison Architect et un autre de Rimworld, le tout saupoudré de graphismes rappelant Don’t Starve. Le tout pour un jeu de gestion où vous aurez à construire le manoir hanté de vos rêves (ou cauchemars, si vous êtes un grand sensible).
Dans les bottes d’un Vilain en devenir, vous vous retrouvez aux commandes d’une équipe monstrueuse chargée de terroriser la région. Pour ce faire, et comme annoncé en introduction, vous allez devoir construire un manoir hanté dans lequel attirer vos victimes que vous dépècerez pour nourrir vos minions. Un plan simple et machiavélique sur papier, un peu moins évident clavier en main… Les débuts sont d’ailleurs assez douloureux, avec un tutoriel dispensé sous la forme de quelques images. On a vu plus complet et agréable, surtout que le wiki est encore en construction.
Mais à force de tâtonnements, le joueur comprend comment procéder et surtout, comment faire bosser ses monstres. Emprunté à Rimworld, le principe est d’ailleurs assez simple : on affecte, via un tableau, chaque monstre à une ou plusieurs tâches (construire, récolter, nettoyer…). Chacune d’entre elles a une priorité et chaque minion y est plus ou moins à l’aise. Il faut donc jongler avec les capacités limitées de nos monstres (certains ne peuvent être affectés qu’à 3 tâches par exemple) et la situation en cours. Il est d’ailleurs dommage que les priorités ne s’appliquent qu’à l’ensemble de vos monstres et qu’il ne soit pas possible de les affiner individuellement.
Une fois votre force ouvrière répartie, à vous la construction de votre repaire. Bureau dans lequel préparer les lettres attirants les innocents villageois, cuisine dans laquelle les découper ou fabrique dans laquelle produire les composants les plus élaborés, il va vous falloir sérieusement réfléchir à l’implantation et bien séparer votre zone de vie de la zone où vous massacrerez vos victimes. Car figurez-vous que celles-ci, XXIème siècle oblige, ont toutes un téléphone portable qu’elles utiliseront dès qu’elles auront peur, faisant monter une jauge de méfiance dont le remplissage signifie la raréfaction des futurs donneurs d’organes et les assauts de héros sur vos terres.
Il va donc falloir créer une zone spéciale pour les victimes dans laquelle il faudra les distraire pour mieux leur sauter dessus et les démembrer. Et évidemment, les règles les plus élémentaires des films d’horreur s’appliquent pour les mises à mort : si vous tuez les victimes lorsqu’elles sont seules ou si vous éliminez les vierges en dernier (par contre, il ne faut pas toucher au chien. Super important ça.), vous gagnerez plus de points d’Evilium. Cette ressource sert à agrandir votre équipe ou déverrouiller de nouveaux types de monstres. Indispensable donc.
Le principe de MachiaVillain est donc bien rôdé : agrandir la partie du manoir où vos monstres vivent, produisent, entretenir et améliorer celle que vos victimes vont visiter et récolter des ressources. C’est beau comme une mécanique bien huilée, surtout quand le jeu est servi par des graphismes aussi choupinous (mais si, c’est mignon un zombie, ne soyez pas sectaires comme ça). Sauf que, bien évidemment, il y a quelques rouages grippés dans la machine de Wild Factor. Quelques bricoles qui me font dire qu’il aurait fallu quelques mois de plus avant de sortir d’accès anticipé…
Si les fautes de grammaire et autres coquilles (en français comme en anglais) ne sont pas bien gênantes, l’IA défaillante de vos sbires qui refuseront parfois d’accomplir leurs tâches l’est un peu plus. Mais le plus gênant est quand même cette interface qui est loin d’être un modèle d’ergonomie et qui rajoute plein de petits moments pénibles lorsque l’on n’arrive pas à faire ce que l’on veut. Ou ce manque d’équilibrage qui oblige à farmer pendant plusieurs dizaines de minutes lorsque l’on veut construire certaines installations. C’est dommage mais tous ces défauts ne sont pas rédhibitoires et ne nécessitent qu’un peu de boulot de la part des développeurs, en espérant que ceux-ci suivront bien leur jeu.
En dehors de ces considérations techniques, il y a quelques autres points qui me gênent et qui m’empêchent de vous hurler de vous jeter sur le jeu. Si le concept en lui-même est excellent, il est tiré vers le bas par des choix étranges. Un cycle de jeu se déroule en plusieurs étapes : le joueur affecte ses monstres aux différentes tâches, lance des constructions et autres recherches et regarde tout le monde s’agiter. Grâce à une campagne de publicité, il fait venir plus ou moins de victimes (qui rapporteront de la nourriture, de l’argent ou des composants spécifiques), interrompt ses sbires pour qu’ils aillent massacrer les intrus ou repousser les attaques de héros venus raser votre manoir un peu trop louche, puis reprend le cours de ses activités.
Inlassablement. En essayant de varier les profils de victimes. C’est un peu dommage que le jeu, passé le cap de la découverte, tourne un peu trop en rond du fait d’un manque de contenu. Il aurait suffi d’implémenter une campagne scénarisée avec divers objectifs à remplir pour relancer l’intérêt. J’espère qu’elle sera apportée par un prochain DLC, si possible gratuit ! Et s’ils pouvaient ajouter de nouvelles technologies et autres monstres par la même occasion, je suis preneur !
Mais malgré tout cela, impossible de ne pas aimer MachiaVillain. Certes, il est imparfait comme les monstruosités que le joueur dirige, mais il a un côté attachant qui donne envie de le relancer pour tenter d’autres optimisations pour son manoir. Les développeurs ont mis du cœur à l’ouvrage, c’est certain, ont fait quelques erreurs de conception en passant et ont peut-être été trop pressés de sortir en version finale. Il aurait fallu quelques mois de plus de polissage et d’équilibrage, enlever cette attente interminable pour la construction de certains équipements et offrir de vrais challenges aux joueurs. Toujours est-il que ce simulateur de manoir hanté, en plus de son concept original et de ses mécaniques inspirées, est un bol d’air frais qui change des habituels jeux de gestion. Vous grincerez parfois des dents, c’est sûr, mais comment résister à cet humour omniprésent et cette direction artistique ? Gardez le dans votre liste de souhaits et jetez-vous dessus dans quelques patchs !
Genre : Gestion, Stratégie
Développeur : Wild Factor
Éditeur : Good Shepherd Entertainment
Date de parution : 16 mai 2018
Site officiel : http://www.wildfactor.net/
Version presse fournie par l’éditeur.
Difficile d’arriver à concurrencer Dwarf Fortress ou Rimworld…
Mais du coup : faut-il y préférer Rimworld justement ? Pourquoi choisir l’un plutôt que l’autre ?
Rimworld est LA référence du genre, même s’il n’est pas sorti d’EA. Je ne l’ai pas encore testé (j’attends la v1.0) mais je m’attends à y passer quelques nuits blanches…