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Space Adventure Cobra: The Awakening

Apparemment, les miracles surviennent parfois dans la vie. Alors que j’avais demandé à mon très, très gentil rédac’ chef, sans grande espérance, une clé pour le jeu Space Adventure Cobra: The Awakening, adaptation du cultissime (n’en déplaise à certaines féministes) manga de la fin des années 70, je reçois, contre toute attente, mon précieux.

Reste à savoir si cette bénédiction ne va pas subitement se transformer en malédiction qui me fera, une fois de plus, regretter d’avoir accepté un job au sein de cette rédaction de l’enfer. Réponse dans les lignes qui suivent.

Première chose à noter : il s’agit d’une production signée Microids, éditeur français bien connu, issu de la première vague aux côtés des Titus, Infogrames et autres Ère informatique. Les plus vieux se rappelleront probablement de Highway Patrol, Genesis ou Nicky Boom, tandis que les un tout petit peu plus jeunes évoqueront plus volontiers Syberia.

Bien entendu, la société a eu plusieurs vies depuis sa naissance et ne ressemble que très vaguement à celle qu’ont pu connaître les joueurs Amstrad, Amiga ou Atari ST. Elle appartient désormais à Anuman Interactive. Deuxième chose à noter : la société s’était récemment illustrée en sortant une adaptation de Goldorak qui s’était avérée bien moins calamiteuse que les premières images ne le laissaient penser.

C’est sobre. Pas moche, mais sobre.

Ce qui tombait assez bien, puisque Microids avait dû faire face, les années précédentes, à un certain nombre de critiques sur la qualité de ses productions les plus récentes. L’espoir est donc de mise au moment d’appuyer sur la touche Play et de lancer ce qui semble être une sorte de run & gun au pays du Psychogun et des pin-ups de l’espace. Avant d’entrer dans le vif du sujet, un bref rappel s’impose, d’autant qu’il me permet de meubler sournoisement ce test.

Comme je le disais en intro, Space Adventure Cobra est un manga de référence paru entre la fin des années 70 et la première moitié des années 80. Dessiné de main de maître par Buichi Terasawa, il narre les aventures plus ou moins rocambolesques de Cobra, célèbre pirate de l’espace et ex-éminent membre de la Guilde des Pirates, qui a décidé de tirer un trait sur ses anciennes amitiés et qui, après un ravalement de façade intégral, cherche désormais à ne plus attirer l’attention de ses anciens amis, lesquels ne goûtent que très modérément son repentir.

Quand il le faut, Cobra sait mettre le turbo.

Désormais amnésique, il coule une vie tranquille de salaryman sous une identité et un visage d’emprunt, en compagnie de son robot domestique. La trahison, comme l’alcool, se consomme avec modération. Lors d’une virée en ville qui tourne assez mal — et qui vous est brièvement racontée dans l’introduction du jeu — il recouvre ses souvenirs et retrouve ses anciens amis, manifestement assez emballés à l’idée de lui refaire une nouvelle fois le portrait.

Ce brusque retour à la réalité sera également l’occasion pour lui de découvrir que derrière l’identité de son robot domestique se cachait en réalité son ancienne équipière, transformée malgré elle en androïde (à vue de nez, la version 16) à l’issue d’un accident professionnel bien costaud, et désormais affublée du sobriquet d’Armanoïde (ou Lady).

Armanoïde ou Lady, à vous de voir.

De retour aux affaires et arborant désormais une magnifique tête de Jean-Paul Belmondo, Cobra écumera l’espace et sera amené, au cours de ses multiples voyages, à affronter des djinns maléfiques, les troupes de la Guilde des pirates, des robots fous, des hommes de verre, des amazones et autres joyeusetés que seule la SF psychédélique des 70’s pouvait concevoir. Bref, la suite ne sera pas de tout repos.

Fort du succès du manga, l’auteur avait confié à la société Fuji Television le soin de l’adapter en anime. Grand bien lui en a pris puisque cela donnera naissance à une série de 31 épisodes, réalisée — une fois encore de main de maître (oui, c’est très clairement une succession de talents) — par l’immense Osamu Dezaki (Rémi sans famille, L’Île au trésor, Lady Oscar, et tellement d’autres).

Oui, ça dépayse un petit peu.

Si vous ne me croyez pas, regardez le soin apporté aux animations de cette série, pourtant réalisée en 1983, et comparez donc à ce qui se fait aujourd’hui par informatique. L’exercice est d’autant plus aisé que la série a connu les joies de la remasterisation à l’occasion de plusieurs rééditions en DVD puis en coffret Blu-ray.

Vous n’avez donc aucune excuse si vous ignorez de quoi je vous parle, à moins d’être foncièrement allergique à l’imagerie légèrement graveleuse — et probablement un peu misogyne — de l’auteur. Il faut savoir que dans l’espace, un string suffit amplement pour se couvrir dans l’univers de Terasawa. À noter qu’une nouvelle série plus courte, faisant figure de préquelle, a également été créée au beau milieu des années 2010.

Que serait un jeu cobra sans Dominique ?

Mais revenons au jeu vidéo qui nous intéresse aujourd’hui. Bien évidemment, et comme cette très longue introduction le laisse entendre, le principal intérêt du jeu tient au plaisir de retrouver le héros de nos jeunes années et l’univers de Buichi Terasawa. Bien évidemment également, et comme dans tout bon jeu à licence qui se respecte, on a l’impression que l’essentiel du budget est passé dans l’acquisition des droits.

Non pas que le jeu soit vilain, mais tout cela ne respire pas la production AA, et encore moins AAA. Si l’on reconnaît bien Cobra, Armanoïde ou encore les sbires de la Guilde des Pirates de l’espace, il faut reconnaître que l’on n’est guère noyé sous un déluge de polygones et de textures 4K.

Pour une fois que ce bouclier nous protège.

Bien entendu, le jeu vise un rendu dessin animé et use et abuse du cell-shading — que nous avons appris à bien connaître depuis la sortie du fantastique Jet Set Radio de Sega — mais l’ensemble reste visuellement assez simple et à des années-lumière du rendu de jeux comme Silksong ou Dead Cells.

De même, les décors restent assez basiques et passe-partout, à l’image de ces séquences sur un train (coucou Bad Dudes vs DragonNinja) ou dans une base secrète et souterraine (coucou Chelnov the Atomic Runner).

Ce bon vieil homme de verre !

Bref, Microids ne met pas forcément le paquet sur la réalisation et compte bien sur la renommée de Cobra — tout comme pour le récent Goldorak — pour attirer les hordes de fans grisonnants (tout le monde n’a pas l’invraisemblable longévité d’un Dragon Ball Z) et les délester de quelques menus euros.

Il est comment, le gameplay, Papy Grenier ? Alors, tout d’abord, je me dois de vous préciser que vous vous êtes trompés de salle. Et le gameplay alors, me demanderont les plus patients d’entre vous ? Secundo, le gameplay est… hum… correct. Correct mais basique et, au final, moyennement fun.

Vous l’attendiez : Mesdames, Messieurs, je vous présente le Psychogun !

À noter toutefois que, faute de cobaye, je n’ai pas pu tester le jeu à deux joueurs. Allez savoir, ça change peut-être la donne. Bien évidemment, Cobra peut se servir de son célèbre rayon Delta (ou Psychogun) pour flinguer tous les hommes de main sous-payés de la Guilde, ainsi que tous les drones et droïdes que ses ennemis vont lui balancer — mais pas que.

En effet, le rayon Delta aura également d’autres utilisations récréatives, puisqu’il sera possible de diriger le tir. Bien entendu, cela servira à atteindre des adversaires a priori hors de portée, mais également à activer certains mécanismes, de manière à résoudre quelques puzzles que je n’ai pas trouvés particulièrement attrayants.

En passant de niveau en niveau — lesquels reprennent la trame générale de l’anime, depuis le réveil de Cobra jusqu’à la rencontre avec Dominique — j’ai eu une étrange impression : celle de ne pas tellement m’amuser alors que rien n’est vraiment mauvais dans le gameplay.

J’imagine que vous avez déjà expérimenté cette drôle d’impression de jouer à un jeu qui, sans être foncièrement déplaisant, vous use tout de même sur votre motivation et votre envie de poursuivre l’aventure. C’est un peu l’équivalent d’une série Netflix qu’on regarde pour passer le temps, mais sans être particulièrement captivé.

Le tir à guidage manuel fait des ravages

D’autant que le gameplay est assez redondant : une phase de run & gun étant quasi invariablement suivie d’une vague phase de puzzle dans laquelle le rayon Delta doit vous permettre de passer outre certains pièges ou blocages en actionnant des interrupteurs à distance. En fait, le principal défaut du jeu, en dehors d’une réalisation pas spécialement flamboyante, c’est de ressembler à tellement d’autres jeux auxquels on a déjà joué auparavant que cela en devient soporifique.

Et c’est un peu la pire chose à laquelle je pouvais m’attendre en retrouvant enfin Cobra dans un nouveau jeu, tant d’années après les antiques adaptations PC Engine et Sega CD (hélas non traduites). On a donc affaire à un jeu correct mais sans grande ambition, et qui peine à raviver l’esprit Cobra (serait-ce seulement possible et accepté en 2025 ?).

À l’arrivée, c’est pour moi un bon gros coup d’épée dans l’eau, même si j’imagine bien qu’un certain nombre de joueurs pourront y trouver suffisamment d’aspects positifs pour prendre plaisir à y jouer.

Je doute toutefois que ces mêmes joueurs soient indifférents à l’anime, car en dehors de l’habillage Cobra, il existe de bien meilleures propositions sur le marché, à l’image du magnifique Neon Inferno, dont le test sera… hum… bientôt publié en ces lieux.

Genre : Run & Gun

Développeur : Magic Pockets

Editeur : Microids

Date de sortie : 26 août 2025

Testé sur une version presse fournie par l’éditeur

Baalim

Vieux joueur, atariste convaincu, collectionneur de trucs bizarres et hétéroclites, geek à ses heures perdues, pratiquement certain de n’avoir rien signé et de ne pas être payé, il se demande encore ce qu’il fait là.

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