JouerWargames

Arabian Struggle

Je l’avais découvert à la PunchedCon 24 – en ayant la chance d’affronter un de ses créateurs, Tim Uren, et il a enfin atteint la France et surtout ma table de jeu ce petit Arabian Struggle. Je dis petit car il est au format slim, comme souvent pour les productions Catastrophe Games.

Une boîte toute fine donc pour ce deuxième volume de la série Conflict of Wills, inaugurée par Judean Hammer, créé par Tim Uren (qui a sévi, entre autres, sur certaines extensions de Battlestar Galactica et Arkham Horror) et Nick Porter, dont c’est le premier jeu.

Pour ce deuxième volet, on quitte l’Antiquité pour la péninsule arabique au début du XXème siècle, avec la lutte de trois Factions (Rasheedis, Hashémites et Saudi – je garde par fainéantise les termes anglais) qui vont se battre pour la domination de ce qui deviendra l’Arabie Saoudite, sous fond de Première Guerre Mondiale et d’ingérence de deux empires : ottoman et anglais.

Un thème très original – je ne connais pas d’autre jeu qui l’aborde – servi par l’approche somme toute classique d’un Card Driven Game. Dans la plus pure tradition du genre, les joueurs vont donc jouer des cartes pour leur événement, pour leur valeur ou pour des actions spéciales afin de soit atteindre un certain seuil de points de victoire (14 à 2, 12 à 3) soit contrôler les 4 cités majeures de la carte. Ils auront pour cela trois Eres divisées en 6 rounds, qui verront autant de carte jouée par joueur.

Vous noterez que je parle de conditions de victoire différentes selon le nombre de joueurs, car Arabian Struggle profite d’une excellente idée pour gérer le camp des Rasheedis si d’aventure le troisième larron faisait faux bond et annulait au dernier moment. Ce qui est dommage pour lui car le jeu est très fluide et les parties ne durent qu’une heure et demi au maximum.

Sur une carte de la péninsule découpée en 9 Régions elles-mêmes découpées en Zones (de 2 à 5), les joueurs vont recruter et déplacer leurs troupes pour prendre le contrôle des villes et de leur population. Les points de victoire sont calculés en fin d’Ere et octroyés au joueur qui contrôle le plus de points de population au sein d’une Région. Il ne sert donc à rien de contrôler chaque zone d’une Région, surtout que les zones rurales ne peuvent garantir l’approvisionnement que d’une seule unité.

Après avoir pioché 6 cartes (7 à deux joueurs), les joueurs vont alterner les tours. Ils doivent jouer une carte à chaque fois, pour son événement (si la carte est jouée à la bonne période : pre-war, Great War ou post-war), ses points ou pour déclencher une action spéciale. Comme il se fait habituellement, si un joueur joue un événement à la couleur d’une faction adverse, le joueur de cette faction peut activer l’événement.

Les actions spéciales possibles en défaussant la carte jouée (sans déclencher l’événement donc) sont la tentative d’invocation d’une conférence tribale afin de prendre le contrôle de celle-ci (avec un tirage de dé) et ainsi gagner un point de victoire à chaque tour ; et, en cas de jeu à deux, le déclenchement d’une action du camp Rasheedi, donc 3 cartes sont mises face visible à chaque Ere. Le joueur déclenchant la carte joue donc le camp Rasheedi comme il le veut, comprendre de la manière la plus pénible possible pour son adversaire.

Ces deux actions sont donc bien utiles pour se défausser d’une carte comportant un événement adverse puissant mais sont limitées à une fois par tour pour la conférence tribale et à 3 fois au maximum pour l’action des Rasheedis, sachant que les deux joueurs ont accès aux 3 cartes dévoilées. Il faut donc surveiller ces événements pour être sûr que l’adversaire ne les utilisera pas contre vous.

La dépense des points d’action de chaque carte est très classique et s’effectue en bloc, ce qui signifie qu’il est interdit de panacher les actions. Les joueurs peuvent soit recruter une unité par point dépensé dans une zone contrôlée ou dans une zone adjacente, soit déplacer un nombre d’unités égal à la valeur de la carte + 1 en octroyant à chacune 3 points de mouvements (1 point par zone via la route, 2 si le déplacement s’effectue à travers le désert), soit déclencher un combat contre un des deux Empires. En effet, ces derniers n’attaqueront jamais les joueurs et se contenteront de se défendre (et surtout de contester les zones, une seule unité impériale suffisant à contrebalancer n’importe quel nombre d’unités d’une des 3 factions).

Le joueur alerte et belliqueux aura noté que je ne parle pas de déclenchement de combats entre factions dans les actions payantes, car ils découlent des actions de mouvement et recrutement : en effet, il est possible de -se déplacer et surtout de recruter dans une zone occupée par l’adversaire. A la fin du tour d’un joueur, si des pièces de deux factions sont présentes dans la même zone, il y a combat.

Les combats d’Arabian Struggle sont traités de manière élégante et surtout rapide : chaque joueur additionne le nombre de ses troupes impliquées avec un chiffre issu d’une carte tirée de la pioche (en bas, sur chaque carte, figure une valeur différente pour chaque faction). Le camp ayant le plus haut total est désigné comme gagnant, sachant qu’en cas d’égalité, l’attaquant gagne. Ensuite, l’attaquant jette un dé : sur 5 ou 6 il perd une troupe. Le perdant perd automatiquement une troupe puis lance le dé. Sur un 4, 5 ou 6, il perd une unité supplémentaire et relance le dé et continue jusqu’à obtenir moins de 4.

Une fois que le perdant a fini de jeter son dé, soit parce qu’il a fait moins de 4 soit parce qu’il n’a plus d’unités, il y a deux cas de figure : si le défenseur a encore des unités, l’attaquant doit retraiter dans une zone amie ou inoccupée, s’il n’en a plus l’attaquant prend le contrôle de la zone et gagne un point de victoire (s’il a gagné le combat).

Oui, vous ne gagnez pas de PV en cas de combat défensif gagné, ce qui oblige à jouer offensif. Les combats sont donc très indécis et il faudra compter sur les bonus de certains événements, qui restent pour la durée de l’Ere, pour faire la différence.

Les tours vont donc s’enchaîner avec des joueurs qui vont tenter des infiltrations ou des attaques en force, jouant avec les bonus actifs de l’Ere en cours. Une fois les 6 (ou 7) cartes de chacun jouées, on va vérifier la surpopulation (chaque zone ne pouvant ravitailler qu’un nombre limité d’unités), déplacer les tribus nomades (qui comptent dans la population mais peuvent détruire une unité) et enfin calculer les points de victoire en regardant qui contrôle le plus de point de population dans chaque Région. Si un des deux camps arrivent à 12 (ou 14) PV la partie s’arrête, sinon on rafraîchit la pioche, on fait intervenir ou disparaître des troupes des deux Empires et on change d’Ere.

Vous le voyez, Arabian Struggle propose des règles et des mécaniques simples, surtout si les joueurs sont familiarisés avec les Card Driven Games, dont les grands principes sont scrupuleusement respectés. Le fait de pouvoir jouer à 3 est une excellente chose, les jeux multi-joueurs rapides n’étant pas les plus communs, avec surtout la possibilité de jouer à deux sans avoir à gérer un bot grâce à une solution élégante permettant de beaux retournements de situations.

Là où Arabian Struggle se démarque des autres, c’est dans sa gestion des espaces et la fréquence des batailles : impossible de croire que le front est figé ou que l’on peut verrouiller des zones car les événements peuvent radicalement changer les choses et surtout on peut recruter dans un territoire adjacent (pas forcément contrôlé donc).

Ajoutez à cela un système de combats qui laisse planer une grande incertitude et ne garantit pas la victoire en cas de surnombre, notamment du fait des bonus actifs, et vous obtenez un titre très nerveux où les zones changent de propriétaire de nombreuses fois à chaque Ere et où il faut exploiter au mieux sa main, comme dans tout CDG qui se respecte.

Le matériel est quant à lui très correct, avec des pions épais, une carte épurée et des règles agréables à lire bien que peu illustrées. Le format très compact de la boîte permet de plus de ranger ou transporter le jeu très facilement.

Arabian Struggle, deuxième volume de la série Conflict of Wills, est donc un jeu que je recommande si vous recherchez un titre simple au thème original auquel vous pourrez jouer en moins de 90 minutes et qui vous permettra d’initier facilement les néophytes. Le jeu à trois, avec chaque faction devant lutter sur au minimum deux fronts, est plein de rebondissements et sur les parties à 2, le fait de pouvoir contrôler la faction inactive le temps d’un événement est une excellente idée, bien plus intéressante que le bot habituel. Ne vous laissez donc pas abuser par cette boîte toute fine et ses règles simples si vous aimez les CDG ou si vous voulez vous y mettre en douceur.

Auteur : Nick Porter, Tim Uren

Artiste : Ilya Kudriashov

Editeur : Catastrophe Games

de 2 à 3 joueurs

60 à 90 minutes

Harvester

Collectionneur compulsif et un peu trop passionné, accumule jeux et livres en essayant d'entraîner un maximum de gens dans ses vices...

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *